Parcours secret

C'est vrai qu'un indice, au-delà de celui qui donnera des coups de soleil, ne serait pas de refus au moment de rejoindre le point de rendez-vous du parcours secret et de s'enfiler avec une avidité (très moyennement) justifiée un goûter carbonnade flamande/ frites de l'ami Ladeyn. Une aventure brève et en toute sécurité certes, mais on ne sait pas si l'on sera en plein soleil, et ce dernier tape pas mal après un automne/hiver qui aura duré ici dix mois. Cool ou presque, on se retrouve à l'abri d'un des plus beaux lieux de Dunkerque: l'entrepôt AP2 près du musée FRAC, aussi appelé "cathédrale" au vu de sa hauteur sous plafond. Heureusement il n'y fait pas trop chaud (sous les tôles) et il ne pleut pas (car les tôles) et chacun s'installe comme possible sur des poufs et des galettes à terre, autour d'un pianiste qui phosphorise déjà une ambiance douce-amère.

On n'est pas aux Nuits Secrètes d'Aulnoye Aymeries, mais quand même dans la même organisation alors on a le droit à du pointu quoi (souvent le cas dans ces parcours). Le mélomane exigeant viendra donc aujourd'hui se repaître des douces notes de Clara Ysé qui s'excuse d'avance de l'acoustique qui lui rendra bien, enfin pas. On fait ce qu'on peut vu le lieu voulu insolite. Koh-Lanta on a dit. Lors de ces parcours on a toujours l'impression d'interrompre une intimité, à débarquer comme ça (à cent), bras levé au dessus de la tête pour montrer le bracelet, tels des envahisseurs. Dans ce cas, on nous a comme donné l'autorisation de surprendre une audition de conservatoire, d'élèves déjà gradés et bien rompus à l'exercice du public même si la timidité et la gêne touchantes sont présentes. L'émotion est d'emblée propulsée avec "j'ai perdu la raison de vivre, je ne réponds plus de moi" et le titre "La Maison". La voix se situe entre Barbara et Zaho de Sagazan, pour une dame qui a clairement été formée dans le lyrique sur fond de voix d'alto.

Des vibratos charmants et des titres qui donnent l'illusion de s'enchainer sans aucune pause, avec beaucoup de grâce fluide, voilà le plein contenu du concert. Et des larmes aussi aux premiers rangs remplis de quelques fans de l'artiste, bien contents de tomber sur elle. En mode mineur et avec beaucoup d'arpèges maitrisés par le pianiste malgré un doigt blessé, Clara, telle Luciani, met en garde "si tu savais la chienne que je cache à l'intérieur". Certains profitent de ce moment réellement suspendu (vraie désorientation temporelle), d'autres calment leurs coups de soleil, (digèrent), dorment. C'est sûr qu'on est au plus loin des tubes de l'été mais les mélodies n'en sont pas moins mouvementées et tourmentées, autant que le pont vingt minutes plus tôt.

Après un rappel enthousiaste, le duo viendra jouer trois derniers titres, dont un dans lequel il est question d'un "coeur qui bat au dedans", repris en choeur. Oui, on aura vu une nommée aux Victoires de la Musique et une prestation (peut-être un peu trop) impeccable. Comme après un massage, l'audience s'est détendue, deux quinquas regrettent tout de même: "C'est dommage qu'on comprend pas tout ce qu'elle dit, mais c'est joli". Aussi joli que le beau ciel bleu qui n'en finit pas de perdurer, alors on se donne rendez-vous l'année prochaine pour une autre programmation dénuée d'artifice avec ceux qui voudront bien une fois de plus tenter l'aventure. Le parcours secret: votre échauffement pour les festivals à venir cet été.

Setlist:

- La Maison

- L'Etoile

- Douce

- Les Rois du Désespoir

- La Louve

- Pyromanes

- Magicienne

- Lettre à M

- Le Monde S'est Dédoublé

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- Ce Soir avec Vous

- Immortels

- Soleil à Minuit