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Critique d'album

Thank You Scientist


Terraformer


(14/06/2019 - Evil Ink - Prog rock ; jazz fusion - Genre : Rock)
Produit par Tom Monda et Thank You Scientist

1- Wrinkle / 2- FXMLDR / 3- Swarm / 4- Son Of A Serpent / 5- Birdwatching / 6- Everyday Ghosts / 7- Chromology / 8- Geronimo / 9- The Life Of Vermin / 10- Shatner's Lament / 11- Anchor / 12- New Moon / 13- Terraformer
Note de 5/5
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Note de 4.0/5 pour cet album
"Avec Terraformer, vous allez aimer les sciences… et le prog par la même occasion!"
Franck, le 02/04/2021
( mots)

Vous souvenez-vous des matières scientifiques étudiées durant vos années scolaires ? Ah, cette belle période d’insouciance durant laquelle, entre une lecture endiablée de Montaigne et une séance de sport dans la moiteur du gymnase du bahut, vous abordiez des sujets aussi variés que la mutation génétique des mouches drosophiles et le cortège électronique de l’atome. Vous étiez un expert pour modéliser les forces exercées sur un pavé en mouvement, et fier de savoir schématiser toutes les étapes de la mitose ; sacrés chromosomes, vous nous en aurez fait baver ! Aujourd’hui, vous avez toujours un doute sur l’ordre des planètes dans le système solaire et le tableau périodique des éléments ne vous évoque rien de plus qu’un lointain souvenir accroché sur un mur de classe ; dans le meilleur des cas vous avez le rideau de douche associé. Vous aussi, vous n’avez jamais compris l’intérêt d’une triple intégrale et vous redoutez le jour où vos enfants vous replongeront malgré vous dans les fonctions mathématiques en commençant par la fonction affine, cette fameuse ligne infinie pointant en direction d’un avenir incertain…


Ne vous en faites pas, Terraformer - troisième album des Thank You Scientist - va vous faire aimer les sciences… et le rock progressif par la même occasion ! Pas convaincu ? Cette superbe pochette vous aidera peut-être à franchir le pas. Car, si certains reconnaissent aux deux domaines le même côté barbant ainsi qu’un réel penchant pour la complexité à filer une migraine à un moine tibétain, il faut bien reconnaitre qu’une fois les bases acquises (avec pour maîtres mots : patience et entrainement), l’immersion finit par se révéler en tout point passionnante et sans retour. 


Les Américains de Thank You Scientist pratiquent quant à eux un rock progressif teinté de metal et de jazz fusion, pour un cocktail détonnant faisant part d’une étonnante accessibilité. C’est durant le programme musical de l’université que le groupe s’est formé, en réunissant dans un premier temps un trio instrumental guitare, saxophone et trompette. La petite bande originaire du New Jersey, influencée par d’illustres représentants tels que Frank Zappa, The Beatles ou Mahavishnu Orchestra (groupe précurseur de la fusion du jazz et du rock progressif), passe le cap de l’université et étoffe ses rangs à partir de 2009 avec un batteur, un bassiste, un violoniste (violon électrique) et surtout un chanteur (ce qui n’est pas si courant pour ce genre de groupe à prédominance instrumentale). Après deux premiers albums remarqués et des tournées avec des formations comme Coheed and Cambria, Periphery ou Haken, le groupe américain remet le couvert en 2019 avec une production particulièrement ambitieuse.


L’introduction instrumentale donne le ton : nous sommes ici sur la science des rythmes complexes avec des orchestrations symphoniques dotées d’une précision à la troisième décimale ; de véritables équations aux multiples lignes mélodiques qu’il vous faudra déchiffrer. Polyrythmies, contretemps et motifs syncopés sont au programme. Pas d’inquiétude, tout est fait pour que l’initiation se fasse en douceur. Tout d’abord en se familiarisant avec le jeu dynamique de saxophone et de trompette qui procure un incroyable panache à l’ensemble. Puis avec le morceau "FXMLDR" (à prononcer Fox Mulder en référence au personnage de la série télévisée X-Files) déversant une vague d’énergie positive aussi irrésistible que vivifiante. On découvre alors le chant clair de Salvatore Marrano - dans un registre légèrement "emo" - pour un refrain aux sonorités pop punk des plus prenant. Difficile de prédire où chaque titre va nous mener, le groupe parvenant en un rien de temps à alterner entre passages jazzy et registres beaucoup plus rock, voire metal. "Swarm", un des meilleurs titres de l’album, débute d’ailleurs sur un air quasi djent, que ne renierait pas un groupe de metal comme TesseracT. La batterie, à la fois puissante et précise, n’est pas là pour jouer la fanfare et n’hésite pas à envoyer la cavalerie lourde, avant de dégager le terrain pour un premier solo de guitare émergeant au milieu des cuivres. Si vous n’êtes toujours pas convaincu, vous finirez probablement par succomber au final dantesque de "Son of a Serpent" avec ses chœurs énergiques.


Au bout d’une demi-heure, vous vous apercevrez que vous n’êtes qu’au cinquième morceau. Qu’est-ce que c’est que ce traquenard ? A l’image de ce professeur de maths, remplissant de formules le moindre recoin de son tableau en ardoise, Thank You Scientist se montre particulièrement généreux, tant sur le contenu que sur la quantité. Terraformer est long. Pas ennuyeux, loin de là, mais très dense. Il vous faudra en effet un peu de temps pour digérer ce double album de 84 minutes. Là où, sur la même durée, un groupe comme Tool aère ses compositions à coup d’interludes, nos scientifiques en herbe ne nous laissent aucun moment de répit. Au risque de me voir jeté au bûcher par une confrérie d’adeptes de rock progressif, je vous conseille vivement de ne pas écouter l’ensemble d’une traite, vous perdriez en concentration et passeriez à côté de véritables pépites.


Malgré un grand nombre d’instruments, le tout reste particulièrement harmonieux et lisible et chacun a droit à son moment de mise en lumière. En témoigne le morceau "Chromology", véritable démonstration de presque 10 minutes durant laquelle chacun y va de son récital. En plus d’être des pointures dans leur domaine, chacun des musiciens de Thank You Scientist est multi-instrumentiste, ce qui confère à l’album une grande richesse de sonorités et de détails permettant de prolonger indubitablement la durée de vie des compositions. L’ambition des américains ne s’arrête pas là : dix musiciens supplémentaires ont en effet pu participer à l’enregistrement de Terraformer (chœurs, percussions, violons, violoncelle, alto, clavecin, trombone…). Cette escalade instrumentale confère parfois un aspect cinématographique particulièrement savoureux à l’ensemble, le tout renforcé par un côté grandiloquent et spectaculaire complètement assumé. Si vous avez du mal à rentrer dans l’univers foisonnant de Frank Zappa et à adhérer aux folles expérimentations de The Mars Volta, Terraformer sera à coup sûr une bonne porte d’entrée - nettement plus accessible - vers une musique imprévisible et exigeante à la frontière, entre le prog et le jazz fusion.


Même s’il faut reconnaître une deuxième partie de programme légèrement moins marquante, pas question de sécher les derniers cours de l’année avant les vacances d’été. Les plus patients et assidus seront récompensés avec le titre final "Terraformer", venant clôturer cet album de manière brillante. 


Finalement, peu importe la longueur de l’équation et la complexité des formules employées, la musique progressive, tout comme la science, peut tout à fait devenir limpide et divertissante dès lors qu’elle utilise un langage adapté et qu’elle est transmise avec passion et énergie. Car à l’écoute de Thank You Scientist, on se concentre, on admire et surtout on s’éclate. Et même si on se perd par moment, on finit toujours par raccrocher les wagons d’une musique qui nous tend la main. Terraformer est à ce titre une belle prouesse, rendant relativement accessible des genres aussi exigeants et hermétiques que le rock progressif et le jazz. En plus de cela, il s’agit tout simplement d’un des meilleurs albums de 2019. Qu’attendez-vous pour tenter l’expérience ? 

Commentaires
Rock, le 30/04/2021 à 10:16
Une vraie pépite cet album ! C'est vrai qu'il peut paraître un peu long, mais franchement ça vaut le détour. Merci pour la chronique.