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Stooges: Les essentiels, les inédits


Moon, le 04/09/2007

Les albums : ce qu'il faut connaître

Au commencement, Elvis créa le rock'n'roll. Il vit que la musique était bonne, aussi il se reposa de toute son oeuvre. Longtemps. Trop longtemps... Parce qu'en à peine une dizaine d'années, les hordes déchaînées des petits bluesmen de pavillons, des hippies velus, des progueux naissants et des chanteurs sirupeux avaient déjà passablement sali son oeuvre. C'est à ce moment (en 1967 pour être précis), qu'un jeune homme nommé James Osterberg décida de foutre un coup de pied dans la fourmillière du rock, qui commençait déjà tout doucement à s'endormir sur ses lauriers. Il était aidé pour cela par une belle paire de tâcherons, les frères Ron et Scott Asheton, ainsi que par Dave Alexander, un bassiste qui jouait mal et buvait trop, mais qui avait une chouette bagnole. Le temps pour le jeune James de prendre le pseudonyme d'Iggy Pop, et de se faire signer chez Elektra Records (la maison de disque de leurs potes du MC5, mais aussi de Love, des Doors...), et l'affaire était dans le sac. S'ils se sont reformés en 2003, c'est bien durant ces premières sept années et ces trois albums que le gang de Detroit a changé à jamais le face du rock. Si vous ne me croyez pas, écoutez ça :

The Stooges (1969)


Le premier essai des Stooges n'est pas un coup de maître. N'en déplaise aux fans du Velvet Underground, la production signée John Cale est franchement datée. A cause d'elle, l'album perd en rage et frustration adolescentes ce qu'il gagne néanmoins en langueur libidineuse. Mais même s'il n'est peut-être pas le plus important d'un point de vue historique, ce premier album éponyme renferme déjà quelques unes des plus gros tueries des Stooges.

A écouter d'urgence
* Il y a d'abord le premier single, l'hymnesque et salace "I Wanna Be Your Dog", tellement bon qu'il a même été récemment utilisé dans une pub SFR, c'est dire.
* Vient ensuite, en toute logique, le second single, un "1969" qui exprime en dix vers à tout cassé tout l'ennui d'un gamin crêchant dans une banlieue triste de Detroit.
* Terminons avec "No Fun", qui développe le même thème, et prouve que l'ennui est quand même un sujet de chanson vachement enthousiasmant. Morceau de bravoure des Stooges depuis leur reformation, "No Fun" est un prétexte pour Iggy qui fait systématiquement monter des dizaines de spectateurs sur scène afin de l'aider à gueuler "C'mon!" ad lib.

Mais aussi
* "We Will Fall", et, dans une moindre mesure, "Ann", deux curiosités très morrisonniennes : les Doors ont toujours été l'un des groupes préférés du jeune Iggy Pop.
* "Real Cool Time", la plus psyché et la plus hypnotique des chansons des jeunes Stooges.
* "Not Right", le premier coup de sang, la révolte face à la frustration et à l'impuissance (sexuelle en l'occurence; on ne se refait pas).
* "Little Doll", pas un mauvais titre, mais trop proche de "1969" pour être réellement intéressant.

Funhouse (1970)


La Funhouse, c'était la crêche des Stooges, une sorte de grande ferme (eux préféraient parler de "manoir") qui leur servait au choix de local de répèt', de garçonnière, de spot de défonce, ou de planque quand cela faisait un peu trop longtemps qu'ils n'avaient pas réglé l'ardoise du dealer. Dans le jardin, Iggy a participé a un court métrage avec Nico. Dans la salle de bain, Scott a repeint les murs avec son sang et une seringue. Sa chambre, Ron l'a décorée à la gloire de l'uniforme SS. Le salon enfin, a été criblé de balle un jour de crise paranoïaque d'héroïnomanes. Inutile de la chercher sur une carte : la baraque a depuis longtemps été rasée, pour y construire une banque.

Mais Fun House, c'est aussi le deuxième album des Stooges. Celui dont tellement d'artistes ont dit que c'était leur disque de chevet, celui qu'ils emmèneraient sur une île déserte, qu'on ne les compte plus. Autant le son du premier album du groupe, malgré la qualité de ses compositions, a beaucoup vieilli, autant Fun House n'a pas pris une ride, et n'en prendra sans doute jamais. Cet album, c'est de la lave, voire du foutre, en fusion. Brûlant, dangereux, et lubrique. On doit la production "live" et brute de décoffrage de cette véritable bombe à retardement à Don Gallucci, un mec connu pour avoir joué dans un show débile quand il était enfant, et pour avoir mis en boîte le cultissime "Louie Louie" des Kingsmen. Autant dire : un has been, mais un mec bien quand même.


A écouter d'urgence
Tout ou presque. Mais puisqu'il faut bien motiver ses choix :
* "Down on the Street", avec son riff évident et conquérant, son refrain dont la seule écoute accélère le pouls. Et le solo qui, déjà, annonce la couleur générale de l'album : défoncé et incandescent. Iggy invoque déjà l'"O-mind", sorte de transe chère aux bluesmen et concept sous-jacent à tout l'album.
* "Loose", suite logique de la piste précédente. Où l'on s'aperçoit que les jeunes Stooges qui se cherchaient un an plus tôt, atteignent déjà des sommets de frime minable, d'arrogance de loser, le tout servi par une vieille moue de catin. Avec, en prime, un nouveau solo complètement trippatoire de Ron Asheton.
* "TV Eye". Il suffit d'entendre les cris d'animal en rut que pousse Iggy et la guitare innexorable de Ron après le break pour se convaincre que ce morceau est l'un des plus bestiaux de l'époque. Nous sommes en 1970, les futurs-Ramones et Sex Pistols jouent encore à la poupée.
* "Dirt" est tout ce qu'il reste des vélliétés doorsiennes du premier album. Sauf qu'ici les influences sont digérées, transcendées. Chanson lente, suintante, rampante, libidineuse au possible. "J'ai été sale, et je m'en fous".
* "1970" ne casse pas trois pattes à un rocker. Elle reste néanmoins une excellente chanson. Un an après "1969", l'heure est au bilan : la frénésie a remplacé la glande, mais au fond, est-ce que ça change vraiment quelquechose? Ce qui change vraiment sur cette chanson, c'est l'irruption du sax de Steve McKay à la troisième minute. Il hantera le reste de la l'album de son jeu habité et chaotique.
* "Fun House", c'est le trip que nous promet Iggy depuis le début de l'album. Une montée de délire de près de huit minutes (record absolu des Stooges), qui culmine avec le refrain martelé, l'écume aux lèvres, par un Iggy possédé, tandis que l'auditeur se retrouve écartelé à l'infini entre le saxo de McKay qui l'emmène très haut et la rythmique très terrienne de la paire Scott Asheton / Dave Alexander, pendant que la guitare de Ron le chatouille sous les bras.
* La fin du morceau précédent avait déjà largement pété une durite. "L.A. Blues" est sa continuié, une douloureuse gueule de bois, une sale descente d'acide. Une vague impro qui se veut free-jazz, et qui sert surtout à foutre une bonne baffe à l'auditeur, histoire de le ramener sur terre.

Raw Power (1973)


Trois ans, un split, et de nombreuses galères après Fun House, on retrouve les Stooges à Londres, sous la houlette de David Bowie. L'Anglais, l'un des très rares fans du groupe, a décidé de les aider à enfin accoucher d'un troisième album. Entre temps, il y a eu du changement chez les Stooges. Ron Asheton était jusqu'ici guitariste et compositeur aux côtés d'Iggy : ce sera désormais le nouveau venu James Williamson qui assurera ces deux fonctions. Ron, lui, est relégué à la basse. Il accepte sans broncher, mais clame encore aujourd'hui que Raw Power est un album d'Iggy Pop et de James Williamson, pas des Stooges. En effet, Williamson transforme singulièrement le son du groupe : moins psychédélique, moins barré, mais plus sec et encore plus violent. Sans compter qu'avec Iggy, il compose des morceaux qui ressemblent presque à de vraies chansons rock, là où ils proposaient auparavant de purs trips.

Il existe une vieille querelle à propos de Raw Power : faut-il préférer la version brute (qui circule en pirate), ou la version "officielle", mixée par David Bowie, et souvent jugée trop "fragile" (dixit les intéressés)? Il y a dix ans, Iggy a décidé de régler le problème en remixant lui-même la réédition CD de l'album. C'est de celle-ci dont il est question ici.

A écouter d'urgence
* "Search & Destroy" : le morceau qui ouvre l'album est un pur bijou de poésie rock'n'roll ("I'm a street walking cheetah with a heart full of napalm"), soutenu par la très impressionnante et réjouissante performance de guitariste de Williamson. Avec "I Wanna Be Your Dog", "Search & Destroy" est sans discussion possible l'autre hymne des Stooges, une véritable bombe tellement destructrice que le reste de l'album paraît forcément un peu en deça.
* "Penetration", on l'écoutera pour son souffle rauque qui pue le stupre. Et surtout pour le contraste saisissant avec le mignon petit tintinabulement qui se promène sur toute la chanson.

A écouter aussi
* "Gimme Danger", pour le chant d'Iggy, et toute sa rage contenue. "Kiss me like the ocean breeze"...
* "I Need Somebody", une excellente balade bluesy, avec un Iggy en rut qu'on a très envie de croire quand il dit qu'il "a besoin de quelqu'un".
* "Raw Power", pour une des meilleures parties de guitare des Stooges.

The Weirdness (2007)


Après l'enregistrement de Raw Power, les Stooges se sentent prêt à conquérir le monde. Sauf que leur nouveau manager, MainMan, la boîte de Tony DeFries, s'avère plus préoccupé de la carrière de David Bowie (son autre poulain, alors en pleine gloire Ziggy Stardust) que de la leur. Certes, ils se voient prêter une charmante villa sur les collines d'Holywood, avec pour ordre de rester bien sages. Mais les putes et la coke, ça va un temps. Et bientôt, le groupe pète complètement les plombs, Iggy et James Williamson s'injectant de l'héroïne en quantité quasi-industrielle, devenant bientôt tricards un peu partout à Los Angeles. Finalement éjectés par MainMan, ils se lancent seuls dans une tournée américaine un peu à l'arrache qui les laissera sur les rotules, complètement flingués. Finalement, au lendemain d'un concert désastreux à Detroit (un hasard?), Iggy saborde le groupe, et demande de son plein gré à être interné dans un hopital psychiatrique. Là, Bowie est un des seuls à venir lui rendre visite régulièrement, et lui propose un jour de l'accompagner sur une tournée en Europe. La carrière solo de l'Iguane commence ici, mais c'est une autre histoire.

Dans les années 1980, puis 1990, on a parfois parlé d'une éventuelle reformation. Las : Iggy ne veut rien savoir. L'initiative viendra finalement de Mike Watt. Au début des années 2000, l'ex-bassiste des Minutemen décide de monter un groupe-hommage aux Stooges, avec Jay Mascis (Dinosaur Jr, excusez du peu) à la guitare. Un projet en forme de simple récréation, auquel vient pourtant rapidement se greffer Scott, puis Ron Asheton. The Stooges Project, c'est son nom, donne à travers le monde entier des concerts rarement excellents, mais toujours très attendus. Ayant vent de la rumeur, Iggy Pop décide de faire appel à ses vieux potes, pour enregistrer quelques titres avec eux sur son prochain (et dernier à ce jour) album solo. La bande des trois, rejoints par Mike Watt, ainsi que par Steve McKay (le saxophoniste de Fun House), se lancent ensuite dans une impressionnante tournée mondiale, et décide bientôt de sortir un nouvel album, The Weirdness.

On en a vu, des reformations bidons. Mais de l'avis de tous, les Stooges sont peut-être les seuls à avoir encore l'étincelle. Pourtant, à sa sortie, l'album reçoit des critiques assez tièdes (sauf peut-être sur Albumrock, ainsi que dans un obscur fanzine nommé Rock & Folk). Les pauvres s'attendaient sans doute à un nouveau Fun House (à part Mike Watt, qui remplace feu Dave Alexander, les deux albums partagent exactement le même line-up), alors qu'avec ces vraies chansons aussi hargneuses que bien construites, il ressemble davantage à Raw Power. Offrons leur donc une petit séance de rattrapage.


A écouter d'urgence
* "She Took My Money" : instantanément un classique. Le riff de guitare est hypnotique à souhait, et l'hypnose ne tarde pas à devenir transe quand, en fin de morceau, Steve McKay s'en mêle. Iggy s'énerve, éructe et jubile en même temps. A écouter très fort, bien sûr.
* "Mexican Guy", une sorte de rap désertique qui prouve que les vieux savent encore se ré-inventer. On pense à Ian Dury, mais en mieux.
* "Passing Cloud", qu'on écoutera en boucle, malgré le sax peu inspiré. Iggy a sorti sa superbe voix de crooner du placard dans lequel il n'aurait jamais dû la remiser. Un vrai titre de vieux sage, durant lequel les Stooges arrêtent un instant de faire croire qu'ils ont le tiers de leur âge.
* Mais parce que le naturel a une facheuse tendance à revenir au galop aussitôt chassé, "I'm Fried", le morceau final, est sans doute le meilleur de l'album. Tout va à 100 à l'heure dans cette chanson qu'Iggy psalmodie la bave aux lèvres, tandis que Ron Asheton et Steve McKay dessinent des motifs singulièrement menaçants.

Mais aussi
* "Trollin'" : un bon titre d'ouverture, sur lequel Ron assure comme il faut, tandis qu'Iggy revient en chantant (bien) sur sa vie de rock star. Rigolard, il a le malheur de dire, à presque 60 ans, que sa bite "is turning into a tree". Il n'en faut pas plus pour que les rocks critics se gaussent, et ne retiennent que ça du disque. Mais les Stooges s'en foutent, et l'avaient de toutes façons prévu. "Rock critics wouldn't like this at all"...
* "ATM" : sympathique, mais ressemble trop à "Trollin'" pour être vouée aux gémonies.
* "Idea of Fun" est la plus ancienne de ces nouvelles chansons. Elle est jouée depuis 2004 en concert, et a acquis peu à peu ses lettres de noblesses, reprise en coeur par le public, aux mêmes titres que les autres classiques du groupe. Ron y fait preuve, si besoin était, d'un sens du riff toujours exceptionnellement aiguisé. Mais gare aux solos : à force de vouloir nous montrer qu'il a progressé, le gros Ron sonne parfois un peu toc.
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