Wishbone Ash
Elegant Stealth
Produit par Andy Powell
1- Reason to Believe / 2- Warm Tears / 3- Man With No Name / 4- Can't Go It Alone / 5- Give it up / 6- Searching For Satellites / 7- Heavy Weather / 8- Mud-slick / 9- Big Issues / 10- Migrant Worker / 11- Invisible Thread / Reason To Believe (Remix)
À ma connaissance, c’est Iron Butterfly qui a donné au papillon son statut d’"animal rock". Peut-être pas au même titre que le loup, le lion, le serpent, le tigre ou l’aigle, mais au moins autant que le coq (Atomic Rooster) ou le blaireau (Badger). Enfin, c’était avant que Superbus et Coldplay viennent nuire à son image en l’aseptisant. En 2011, Wishbone Ash pouvait donc légitimement tenter de restaurer son image en l’adoptant sur la pochette de son nouvel album, Elegant Stealth.
Il fallait pour cela faire mieux que les deux derniers opus, qui manquaient clairement d’inspiration et d’entrain, et, miracle, il semble que les quatre années de pause discographique ait été mises à profit pour aboutir à un album plus solide que ses prédécesseurs. En effet, celui-ci commence très bien avec "Reason to Believe", doté d’une belle introduction, de riches interventions de guitares, et d’une énergie enfin retrouvée quitte à s’aider d’une esthétique proche du rock alternatif sur le refrain. Et ce n’est pas le seul morceau remarquable de l’opus. Sans vraiment retrouver l’esprit d’Argus, la tournure celtisante de "Can't Go It Alone", offerte au titre avec l’aide du violon de l’excellent Pat McManus, permet une autre démonstration du retour à un beau niveau d’inspiration.
Même les titres plus classiques dans leur approche demeurent bien plus efficaces que ceux de la décennie précédente, comme en témoignent le chaloupé "Warm Tears", où les twin-guitars s’amusent et où le registre est à la fois plus Heavy et plus complexe. Citons aussi l’instrumental purplien "Mud-slide" (Don Airey y est invité aux claviers), les belles guitares déployées sur "Invisible Thread" et le bien nommé "Heavy Weather", au riff lourd et à l’écriture plus alambiquée au-delà de sa simplicité évidente. La plupart des morceaux est non seulement mieux composée, mais aussi plus riche, dense et varié, en accordant de place aux guitares - Powell se rappelant enfin que c’est l’un des principaux atouts de sa formation.
Wishbone Ash essaye de ratisser large et de moderniser un peu ses mélodies, quitte à minauder sans jamais faillir pour autant et tout en restant très agréable ("Man with No Name", "Give It Up"). Il est peut-être moins pertinent sur le slow kitsch et mou ("Searching for Satellites" – les chœurs sont un peu douloureux), ou sur les funk "Migrant Worker" et "Big Issues". Ce dernier affiche une basse agressive et un rythme jazzy, et bien qu'il soit de prime abord minimaliste et redondant, il dispose d’un long solo très convenu même s'il reste brillamment exécuté, qui aurait mérité d’être raccourci (le titre fait près de huit minutes). Enfin, la version techno/danse de "Reason to Believe" en hidden track, évoque (en mieux tout de même) le couplet de 1998 (Trance Visionary et Psychic Terrorism), mais il est difficile de leur en tenir rigueur puisqu’elle est censée rester cachée à la plupart des auditeurs.
Elegant Stealth apporte enfin les bonnes idées qu’il manquait aux deux derniers albums : riffs plus efficaces et saturés, modernisation intelligente sans sortir du classic-rock, écriture plus complexe, plus dense et quasi progressive, et surtout, compositions aux mélodies magistrales avec présence plus importante de la guitare et des twin-guitars libérées. Nous ne crierons pas au chef-d’œuvre, mais c’est un bien bel album de l’éméritat.
À écouter : "Reason to Believe", "Can't Go It Alone"