Weezer
SZNZ: Summer
Produit par Daniel Omelio
1- Lawn Chair / 2- records / 3- Blue Like Jazz / 4- The Opposite Of Me / 5- What's The Good Of Being Good / 6- Cuomoville / 7- Thank You and Good Night
Vous l’avez noté, Weezer tient une place importante dans ces pages. Un peu trop peut-être ? Il faut dire que quantitativement parlant, les plus bostoniens des californiens enchaînent les productions à une allure ahurissante. Mais autant les années 2000 les avaient vu abuser en termes d’expérimentations oiseuses collant à un air du temps qui ne cessait de les fuir, autant la décennie 2010 a remis les pendules à l’heure avec des albums moins nombreux et plus qualitatifs. On se souvient en particulier d’une belle triplette Everything Will Be Alright Until The End - White Album - Pacific Daydream qu’ils ont fièrement portée sans plus nourrir de complexes vis-à-vis de leur époque ni d’une faune de détracteurs qui n’ont de cesse, depuis le Green Album, de vomir tripes et boyaux sur un carré accusé d’enchaîner les pires atrocités. Attention néanmoins à ne pas tendre le bâton, n’est-ce pas ? Car si Van Weezer se montrait franchement réjouissant, le duo Teal - Black ne volait guère haut. Idem à la mi-chemin de ce pantagruélique programme de 2022, rien moins que 4 EP de 30 minutes environ chacun, soit un peu moins de 2h de musique promises avant de sonner les cloches de Noël, et le tout sur revisite des quatre saisons de Vivaldi. Ouais. Si certains n’ont pas encore oublié la version printanière du quarteron, qu’ils aillent se frotter à son pendant estival. C’est, grosso modo, bonnet blanc et blanc bonnet. Mais l’artwork change et, autant l’avouer, il est chouette.
Pour le reste, Weezer fait du Weezer avec plus ou moins de bonheur. Ça mélange toujours Kiss et The Beach Boys, c’est toujours aussi candide que tourmenté, aussi juvénile dans l’esprit, néanmoins un peu plus “ambitieux” sur le papier, et ça, ce n’est jamais bon signe de la part de Rivers Cuomo. La dernière fois qu’il nous a fait le coup, c’était pour Songs From the Black Hole, le fameux opéra rock avorté faute de matière et de maîtrise, avec à la clé une année à Harvard foirée, un Pinkerton qui a accumulé les emmerdes et une dépression de quatre ans. Gosh. Ne lui souhaitons pas tant de malheurs, mais il faut reconnaître qu’on ne se faisait guère d’illusion à l’avance. SZNZ: Summer entérine néanmoins un travers que l’on sentait poindre avant même de l’avoir entendu : ce deuxième EP ne diffère pas stylistiquement parlant du premier, ou en tout cas pas assez - un comble quand on est censé refléter les quatre saisons si dissemblables de nos zones tempérées. On le sent peut-être un peu plus robuste (l’introduction en arpèges métalliques de “Blue Like Jazz” et les jolies distos de "Thank You And Good Night" renvoie davantage aux clowns grimés qu’aux garçons de plage, certes), mais si peu. Cela reste de la power pop souvent efficace, en témoigne notamment un “Records” parfait, candide, puissant, porté par le pathos post-adolescent du binoclard à la barre, cheveux longs et moustache de rigueur - ça faisait longtemps. Ailleurs, c’est nettement plus oubliable, un peu de stadium par-ci (“Blue Like Jazz”, pataud), un peu de contraste couplet-refrain (“What’s The Good Of Being Good”, sympa), un peu de proto punk-rock cali pas si éloigné de Green Day avec nettement moins de mordant (“The Opposite Of Me”, sauvé par son refrain qui fait mouche), la chanson un peu intello que tout le monde oubliera (“Cuomoville”, un comble de composer un titre aussi éphémère quand on y fourre son propre nom dedans, et tant pis pour son pont il est vrai assez inattendu). L’intro demeure vautrée sur sa chaise à bascule (“Lawn Chair”, sympa la flemme de juillet). La seule réelle curiosité de cet EP, c’est sa conclusion omnibus "Thank You And Good Night" - un peu sur le modèle “The Greatest Man That Ever Lived (Variations on a Shaker Hymn)” du Red Album - en plus ramassé, cohérent et pertinent, quoique l’élucubration reste difficile à suivre. En tout cas il se passe au moins un petit quelque chose sur ce dernier morceau, c’est déjà ça. En définitive : si vous avez aimé le printemps, laissez-vous tenter par l’été, sinon faites l’impasse sur le reste de l’année. Nous, en tout cas, on reste sur les rangs, et advienne que pourra.
À écouter : "Records", "Thank You And Good Night"