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Critique d'album

The Beatles


Let It Be


(08/05/1970 - Apple Corps Ltd - Culte - Genre : Pop Rock)
Produit par Phil Spector

1- Two Of Us / 2- Dig A Pony / 3- Across The Universe / 4- I Me Mine / 5- Dig it / 6- Let It Be / 7- Maggie Mae / 8- I've Got A Feeling / 9- One After 909 / 10- The Long And Winding Road / 11- For You Blue / 12- Get Back
Note de 4/5
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Note de 3.5/5 pour cet album
"Dans le désordre, les Beatles concluent leur discographie avec un album au titre devenu emblématique"
Julien, le 14/07/2020
( mots)

Sur le plateau du tourne-disque le vinyle poursuivait sa parade circulaire, dans le vide. Un trou noir hypnotique qui avait envie de partager quelques accords, mélodies ou rythmes en plus. Mais ce fut bien le silence, assourdissant, qui criait la conclusion de l’odyssée sonore avant que le moteur de la platine ne s’arrête et que le bras de lecture ne reprenne sa position initiale. La dernière production studio de The Beatles venait de se terminer sur ces mots empreints d’une ironie au fort goût de cynisme : “Get Back” (“Reviens”). Car de retour il n’y aura pas, voilà déjà quelques temps que les doutes sur la dissolution des Fab’ Four ont été officialisés pour le monde entier par Paul McCartney, quand Let It Be parait ce 8 mai 1970.
Le disque de la fin, celle qui fascine, qui vient donner un sens après l’expectation née du début. Pour autant, est-il juste de parler de fin quand la légende se poursuit ?
N'est-il pas possible que l’Histoire continue après ?
Je crois que si, il faut juste l’écrire. 


Nous sommes en 1968, précisément le 22 novembre, le dixième album des Beatles le White Album (alias The Beatles) connait un immense succès commercial, perçu comme une grande réussite par le public et les critiques de l’époque. A l’intérieur du groupe, en revanche, un mur glacial s’est bâti au sein du quatuor pendant l’enregistrement. Chacun des membres enregistrait dans son coin et quand ils se retrouvaient en studio, l’omniprésence de Yoko Ono dérangeait passablement, accentuant encore plus l’isolement dans la conception jusqu‘à une forme de paranoïa où tous avaient l’impression d’être mis à l’écart par les trois autres musiciens.
Tout cela a fortement perturbé Paul McCartney qui, pour ressouder le groupe, arrive en janvier 1969 avec un projet intitulé : “Get Back”. Son idée est la suivante : les Beatles doivent recomposer du rock, revenir aux origines, à un groupe de quatre gars enchainant les répètes, les impros, les captations en live. Les sessions d’enregistrement, McCartney les veut filmées pour “montrer au monde un groupe qui se serrent les coudes“, permettant, au passage, d’honorer le dernier film qu’ils doivent contractuellement à la société de production United Artists. A travers ce processus, le groupe doit retrouver l’alchimie. Il n’en sera rien. 


Les sessions d’enregistrement dans les studios de cinéma de Twickenham deviennent, immédiatement, une longue procession dépourvue de qualité. Les Beatles jouent de tout, et surtout beaucoup de n’importe quoi, fait de bribes de nouvelles compositions, de reprises ou d’improvisations. Si la cohérence et l’harmonie ne sont clairement pas au rendez-vous, les relations du quartet se tendent encore un peu plus. L’arrivée du nouveau manager Allen Klein (notez ce nom, il aura son importance par la suite), n’est pas du goût de McCartney. Ce dernier s’est mué en un petit caporal autoritaire, dictant les horaires de présence au studio, et surtout la manière dont ses comparses doivent aborder les morceaux. Une attitude qui irrite passablement Georges Harrison qui le fait savoir à son bassiste, face caméra, où après un énième reproche, il lance un ironique : “Je jouerai ce que tu veux. Et si tu ne veux pas que je joue, je ne jouerai pas du tout ! Tout ce qui te fera plaisir, je le ferai”. John Lennon lui, « plane » au-dessus de tout ça, comme il le résume parfaitement lui-même : “J’étais désormais avec Yoko, je n’en avais rien à foutre de rien. J’étais, en plus, tout le temps défoncé au hasch, etc.
Si ce n’est des heures d’enregistrements, pas grand-chose ne subsiste de ce projet “Get Back”. Les Beatles quittent Twinckenham pour retourner au Apple Studio de Savile Row où Georges Harrison convie le claviériste américain Billy Preston. Une présence supplémentaire qui apaise les tensions et enclenche une dynamique de compositions autrement plus productive, si bien que toutes les chansons présentes sur Let It Be sont enregistrées en un peu plus d’une semaine. L’enthousiasme naissant retombera au moment de produire l’album. Un art qui, pourtant, passionne les Fab’Four et dans lequel ils excellent. Cette fois ils s’en désintéressent royalement. 29 heures de bandes sonores mais personne n’est d’accord, ni sur les chansons à garder, ni sur l’ordre du tracklisting et encore moins sur l’orientation sonore à donner. Le projet finit au placard, comme un symbole des belles intentions initiales devenues un camouflet pour ce groupe en proie à un inévitable déchirement. Le talent et la fierté conduisent le quatuor, fin février 1969, à redémarrer les enregistrements de zéro. Ils extériorisent toute leur magie et publient Abbey Road avec le succès qu’on connait. En septembre, Lennon annonce aux autres membres qu’il quitte les Beatles. Le secret est, à ce moment-là, plutôt bien gardé, si bien que le manager Allen Klein se met d’accord avec le groupe pour qu’un dernier album soit publié. Les bandes sonores existent, reste la réalisation. Et Klein choisit (sans jamais consulter McCartney), le producteur Phil Spector.
Le travail chirurgical peut alors commencer. 


Spector se tient face à une œuvre, pareille à un comateux, qu’il faut tirer de sa léthargie et qu’il convient de rendre présentable. Pour l’opération, il utilise son outil favori : l’orchestration. C’est à lui que l’on doit cette technique d’enregistrement, appelée Wall Of Sound.  C’est bien elle qui éveille l’âme de cet album qu’est “Across the Universe”, bardés d’effets et soutenue par les chœurs, cette merveille de composition, signée John Lennon, devient une œuvre épicurienne prenant directement l’auditeur aux tripes avec sa mélodie cousue dans la mélancolie. Le producteur pousse son art beaucoup trop loin sur “The Long And Widing Road”. McCartney nous plonge dans un gouffre d’ennui avec sa voix pleurnicharde. Une longue procession grandiloquente, pour un morceau sur-botoxé, que le bassiste reprochera fortement en écrivant un cinglant “Ne me refaites jamais ça” à Allen Klein.
Le corps, lui, est issu du dernier concert des quatre musiciens, le “Rooftop Concert”, joué en 1969 sur le toit de l’immeuble Apple Music. Les titres, “Dig a Pony”, “I’ve Got a Feeling” et “One After 909” sont tous les trois tirés de ce live. On retrouve ici les intentions Rock et Blues voulues par le concept des premières sessions d’enregistrement. Sans jamais être ratées, les chansons citées arrivent péniblement à faire passer une vague sensation nostalgique des sonorités originales du quartet. A côté des morceaux à la production surdéveloppée, ces captations live donnent à l’album cette impression décousue, voir bancale. Des titres issus des premières répétitions, on retrouve également “Maggie Mae” mais coupé à vif. Une version courte, transitoire entre deux chansons, qui renvoie inévitablement à la genèse des Fab’ Four, quand ces derniers n’étaient encore que des adolescents. (A l’évocation de ce titre, je ne peux m’empêcher de mentionner, et vous inviter à regarder, le film Nowhere Boy qui raconte les jeunes années d’un John Lennon, magnifiquement interprété par Aaron Taylor-Johnson accompagnée par une époustouflante prestation de Kristin Scott Thomas).
Comment souvent, il faut chercher les pépites du coté de Georges Harrison. Sa composition “I Me Mine”, à la force d’un regard captivant, celui qui intrigue, qui pénètre quiconque le croise. Les arrangements du chirurgical producteur lui apportent cette profondeur imposante, conférant merveilleusement la puissance qui se dégage de ce titre. Une vraie réussite qui passera, malheureusement, beaucoup trop inaperçue au sein de la légende The Beatles. Du coté de la puissance “Get Back” est la chanson qui montre les muscles avec son shuffle viril, l’insolente démonstration technique au piano de Billy Preston -certains diront même que son solo justifiait à lui seul la présence de ce cinquième membre- confirme, un peu plus, l’arrogante magie qui peut se dégager d’une composition originale des Beatles.
Enfin nous terminerons par le cœur de cet album, la chanson qui insuffle toute la vie de ce dernier disque. Un titre qui va au-delà du culte, peut-être le premier qui vient à l’esprit à l’évocation de ce groupe légendaire. On parle bien sûr ici de “Let It Be”. Tous les superlatifs ou métaphores seraient bien pâles pour décrire un pareil monument, qui appartient aux souvenirs de tous plutôt qu’aux lignes de cette chronique.  


L’histoire s’arrête donc là, avec un album qu’on peut qualifier de posthume eut égard à la dissolution du groupe au moment de sa parution. Un disque qui n’avait ni la vocation ni la prétention d'être la dernière pièce de la discographie de The Beatles. Pourtant au fil de cette chronique, je n’ai pu m’empêcher de me dire que cet album est exactement à la place qu’il faut : plutôt qu’un simple et modeste The End, le grand public retiendra que la légende s’est terminée sur trois mots. Trois mots qui apportent la dernière dose de mysticisme à un groupe qui aura marqué l’histoire de la musique pour des siècles et des siècles. Pour l’éternité.
Ainsi soit-il.

Commentaires
Arbitre, le 24/09/2020 à 22:53
Assez déçu par cet album. Surtout quand on songe que des morceaux ont été entièrement réarrangés par Spector à la grande déception des auteurs ("The long and winding road" et "Accros the universe" pour ne pas les citer). Conçu à la base comme un retour aux sources du rock qui a lancé les Beatles, je ne vois pas vraiment de morceaux rock particulièrement intéressants. Ceux du White album avaient nettement plus de caractère. Musicalement, "I dig a pony" est un bon blues (avec un solo intéressant de Harrison, malheureusement trop court), mais les paroles sont du même genre que "I am the walrus", c'est-à-dire incompréhensibles.