
Franz Ferdinand
Always Ascending
Produit par Philippe Zdar
1- Always Ascending / 2- Lazy Boy / 3- Paper Cages / 4- Finally / 5- The Academy Award / 6- Lois Lane / 7- Huck And Jim / 8- Glimpse Of Love / 9- Feel The Love Go / 10- Slow Don't Kill Me Slow


On garde un souvenir ému des Franz Ferdinand de leurs débuts, de leur inoubliable “Take Me Out” qui fit la joie de Virgin Radio (autres temps, autres moeurs), de leur premier disque aussi espiègle que futé et de son successeur à peine moins appréciable, de leur post punk dansant, nonchalant et drôle, de leurs textes truculents et de leur voracité à jongler avec les tonalités et les rythmes. Oui, on garde un souvenir ému de ces sympathiques écossais que l’on pensait capables de se maintenir à flot, voire même de progresser encore et toujours. Or déjà dans Tonight, on sentait que quelque chose ne tournait pas rond : Alex Kapranos et sa bande commençaient à se prendre au sérieux, à faire leur mue post-adolescente, à se parer de postures de poètes mélodramatiques. L’album posait le tempo, renforçait l’électronique, mais surtout perdait énormément en spontanéité en même temps que la qualité des compositions allait décroissante. La suite ne nous a donc pas étonnés : un quatrième disque anecdotique (Right Thoughts, Right Words, Right Actions, à moins que ce ne soit l'inverse) dont on peine même à se remémorer ne serait-ce qu’un morceau, une dispensable collaboration avec Sparks, et là-dessus le départ - prévisible - de Nick McCarthy, la caution “rock”, qui scellait a priori le glas du carré de Glasgow. Sauf que Kapranos a décidé de se maintenir en première division et de tout changer en embauchant non pas un mais deux remplaçants, Dino Bardot et Julian Corrie, nettement plus orientés synthétiseurs. Le résultat, c’est Always Ascending, et que dire ?
Produit par le frenchy Philippe Zdar (Phoenix, Two Door Cinema Club et même OneRepublic, ouais ouais), ce cinquième album de Franz Ferdinand se veut dans l’air du temps, c’est-à-dire mainstream, consensuel, synthétique et surtout le moins rock possible. Pas étonnant que çà et là tout le monde salue la “renaissance” du phénix écossais. On en oublierait presque qu’indépendamment de ses sonorités kitch / has been / de mauvais goût (rayez les mentions inutiles, ou ne rayez rien du tout), Always Ascending ne fait que recycler de vieilles recettes éculées sans y apporter la moindre once de peps ni d’originalité. On est plus que jamais à des années lumières de Franz Ferdinand et de You Could Have It So Much Better. Mais c’est plus que ça : les morceaux sont pauvres sur le plan de la construction. Le single liminal pêche par un manque de matière, obligeant Kapranos à de brusques et bancales descentes d’octaves pour lier le pré-chorus au chorus, et on ne parle vous parle pas des gimmicks de clavier ridicules et des “outchou na-na-na” égrenés en boucle, tellement horripilants qu’on a en envie de fracasser sa platine à grands coups de hache. Les textes sont aux abonnés absents, et si l’essai de rimes riches en “tion” sur “Paper Cages” fait tendre l’oreille, c’est pour voir la formule bâclée dès le second couplet. Certains morceaux sont d’une pauvreté confondante (“Lois Lane”, “Huck And Jim”), d’autres interpellent par leur décalage thématique dont on ne sait s’il est voulu - et dans ce cas c’est raté - ou subi - et dans ce cas c’est pathétique (“Academy Award”). On a envie de sauver quelques trucs tout de même, comme le tonique “Lazy Boy”, seul titre rappelant un peu le glorieux passé du groupe, ou le clinquant “Glimpse Of Love”, tout en s’apercevant en fin de titre que ce serait une épreuve de s’enquiller une seconde réécoute. On a envie d’être indulgent avec “Slow Don’t Kill Me”, il est vrai pas trop nul dans le genre de la balade conclusive, mais c’est déjà (beaucoup) trop tard. Ombres d'eux-mêmes, les Franz Ferdinand ont, de gré ou par défaut, cédé à la sirène de la facilité et de la paresse, sans oublier de compromettre gravement leur héritage guitaristique, et ça commence à faire beaucoup. Alors autant s’arrêter là et se quitter bons amis, parce que si ça continue comme ça, la prochaine critique risque d’être nettement moins tendre...

