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Rétrospective : 1997, c'était pas mal


Maxime, le 19/12/2017

Janvier - avril


Daft Punk - Homework (Virgin)
17 janvier



L’année commence en trombes avec la mise sur le marché de l’opus inaugural du duo frenchie, après une année 1996 où l’irrésistible "Da Funk" (rythme funkoïde, basse hydraulique, wah-wah croassante) avait affolé playlists radio et robinets à vidéo clips. Conçu patiemment et minutieusement dans le bunker parisien des compères (d’où le titre), Homework est un disque malin et redoutablement efficace, où le talent se dispute à la roublardise, régurgitant tout l’imaginaire discophile de ses géniteurs sur fond de house dure et de techno sous néons. Les Daft se voient presque malgré eux bombardés ambassadeurs éternels de la french touch (Laurent Garnier, St Germain et Etienne de Crécy avaient déjà bien préparé le terrain) et deviennent une exception que l’on brandit systématiquement depuis vingt ans lorsque nos camarades anglo-saxons raillent notre musique franchouillarde et inexportable.


Un peu long et redondant à la réécoute (près de 75 minutes au compteur tout de même) mais constamment relancé par de furieux singles shootés par la crème des clippeurs de l’époque (Spike Jonze, Michel Gondry), Homework réinscrit à son corps défendant (impossible de déceler la moindre trace de françitude dans cet océan de samples et de boîtes à rythme) l’Hexagone sur la carte de la pop mondiale.


 


Silverchair – Freak Show (Murmur/Sony)
4 février

La planète rock est encore sous le choc de la disparition de Kurt Cobain et l’on cherche un substitut de tous côtés. L’Australie propose alors Silverchair, composé de trois adolescents dont le nez pisse encore du lait (ils frôlent à peine la majorité). La rock critic déteste mais la jeunesse, celle qui en France lit Rock Sound plutôt que Rock & Folk, adore. Daniel Johns est présenté comme une réincarnation acnéique du christ grunge, offerte aux petits frères, ceux qui étaient encore à l’école primaire lorsque la tornade Nevermind ravagea le paysage musical des jeunes années 90. Charge à Freak Show de confirmer que l’inaugural Frogstomp (1995) n’était pas qu’un vulgaire coup marketing.


Une écoute lapidaire de ce deuxième album suffit à condamner le power trio au rôle de copie carbone de Nirvana ; plus sabbathienne, moins punk, plus juvénile, moins morbide, plus scolaire, moins géniale. Le groupe tend même le bâton pour se faire battre en défouraillant d’entrée de jeu ses compositions les plus explicitement grunge, saturées de flanger et de distorsion et transpercées par un chant élimé ("Slave", "Freak", "Abuse Me"), jusqu’à ce "Lie To Me" calquant piteusement "Territorial Pissings". Il faut attendre la moitié de l’album, le presque solaire "The Door", le goguenard et atrabilaire "Pop Song For Us Reject" ou les plus ambitieux "Cemetery" et "Petrol & Chlorine" pour mesurer le véritable potentiel de Silverchair, autant travaillé par les murs de décibels drus à la limite du metal que la pop orchestrale richement ornementée. Les Australiens se cherchent encore sur ce manifeste mal dégrossi, poursuivant leurs travaux sur Neon Ballroom (1999), jusqu’à l’aboutissement magnifique de Diorama (2002), ce très beau disque que personne n’a écouté. Tant pis, The Vines a depuis repris le flambeau, ajoutant de grosses rasades beatlesiennes dans son cocktail juvénile et électrique. Teenage angst has paid off well.



The Offspring – Ixnay On The Hombre (Columbia/Epitaph)
4 février

Lassé d’être devenu la pompe à fric de Brett Gurewitz, Dexter Holland et sa bande quittent Epitaph (qui conserve néanmoins les droits de distribution de ce disque pour l’Europe) avec fracas et signent sur la major Columbia. Les puristes s’étranglent de rage et crient à la trahison, sans savoir que le nettement plus mainstream Americana suivrait 18 mois plus tard. Les masses adolescentes avaient accordé un triomphe à Smash (qui détiendra longtemps le record de ventes pour un disque indépendant) et attendaient de nouveaux "Come Out And Play" et "Self Esteem" pour rythmer la bande-son de leurs après-midi skate. Manque de bol pour eux, Ixnay On The Hombre est un opus sombre, rêche, anti commercial, doté d’un son dur, sec, et dont les singles abrasifs (la ruade punk "All I Want" et la power ballad "Gone Away") manifestent tout sauf l’envie de rivaliser dans les charts avec ceux de son prédécesseur multiplatiné. En conséquence, les gaillards en vendirent quatre fois moins.


Placé sous le patronage de Jello Biafra qui apparaît en maître de cérémonie, ce quatrième long format propose pourtant un parfait condensé du Offspring mid-nineties, ce punk crasseux et métallique (Helmet n’est jamais loin), friand de ruades analphabètes ("Mota", "Meaning Of Life") comme de rengaines limite grunge ("Amazed"), célébrant le californian lifestyle avec une ironie grinçante ("Cool To Hate", "Way Down The Line"). Boudé par le grand public, Ixnay reste un must pour les fans et le groupe a célébré son anniversaire cet automne par le biais d’une réédition vinyle et d’une mini-tournée dans son fief d’Orange County.



Blur – Blur (Food/EMI)
10 février

Poussés par la presse, ils se sont lancés dans la guerre de la britpop et l’ont perdu par K.O. (What’s The Story) Morning Glory? s’est (massivement) plus vendu que The Great Escape et les branleurs de Blur se sont soudainement demandés s’il n’y avait pas mieux à faire que de se tirer bêtement la bourre avec les crétins d’Oasis. Surtout, on dit le groupe au bord de l’implosion, alors qu’il est en réalité à la recherche d’une nouvelle impulsion. Qu’il trouve en tournant son regard vers l’Amérique honnie. Dos au mur, les Londoniens amorcent un virage artistique complet sur ce cinquième disque qui ose prendre à contrepied l’obsession insulaire du mouvement britpop (s’inspirer de l’indie rock américain relève presque du crime de lèse-majesté) et de ses tubes aux allures de vignettes à la gloire de l’english way of life.


Devenu fan de Pavement sur le tard, Graham Coxon se complait dans le triturage de pédales d’effets et tire de sa guitare des vagissements larseniques inarticulés ("You’re So Great", "Essex Dogs") tandis que Damon Albarn, renonçant à son statut de Ray Davies des années 90, compose des textes plus personnels tout en malmenant de vieux synthétiseurs ("Death Of A Party", "On Your Own"). La maison de disque prend peur, mais le quatuor a pondu deux tubes brillants pour donner du change : "Beetlebum", sorte de pépite beatlesienne vitrifiée façon Guided by Voices, et "Song 2", aussi grisant que bruyamment régressif. Blur se réinvente et on parle d’album de la maturité. On se rend alors compte que leur véritable rival n’est pas la fratrie Gallagher mais Radiohead, sur le point de sortir OK Computer et de faire définitivement muter la pop britannique.



Elliott Smith – Either/Or (Kill Rock Stars/Domino)
25 février

Avec Jeff Buckley, Elliott Smith est l’autre grand singer-songwriter des années 90, le genre d’échalas fragile et émotif que l’Amérique désenchantée engendrait à l’époque à une cadence industrielle. Either/Or est l’œuvre maitresse du poète de la génération X. Désirant marquer un tournant après deux disques très lo-fi, le natif du Nebraska devient multi-instrumentaliste, habillant ses compositions de basse, batterie, guitare électrique et piano. La forme est plus dense et travaillée, mais le fond reste inchangé. Il n’est question que de mort, dépendance, solitude, vide, dépression, le long de mélodies blafardes et cafardeuses, poussées par une voix effacée, presque fuyante. Idéal pour chialer dans sa bière un soir de novembre. Smith y prend une dimension supplémentaire et se révèle songwriter d’exception, pondant des chansons immenses, subtiles, riches en audaces harmoniques.


Avec Nevermind, Either/Or est l’autre grand manifeste désespéré des années post-reaganiennes. Le bruit blanc des décibels a fondu, mais la mélancolie persiste, d’une épaisseur à couper au couteau. Gus Van Sant, grand cinéaste des adolescents paumés, ne s’y trompe pas et y puise quatre titres pour garnir la B.O. de son film Good Will Hunting. Le musicien connaît alors un succès rapide et proposera par la suite des albums plus produits mais tout aussi sensibles. D’aucun préféreront ce diamant noir irradiant à jamais une discographie brillante qui, hélas, s’interrompra trop tôt.



Aerosmith – Nine Lives (Columbia)
18 mars

Remise en scelle grâce à la reprise rap-rock de "Walk This Way" (en duo avec Run-DMC) et au triomphe de jeunes loups qui lui doivent tout (Guns N’ Roses), la paire Tyler/Perry, pas encore au stade de la décrépitude, s’avère encore capable de produire quelques jolies étincelles. Après le succès radiophonique et télévisuel de Get A Grip (Alicia Silverstone dans le clip de "Cryin" restera une madeleine de Proust pour toute une génération de pré-ados en émois), la suite était logiquement attendue. Entre défection puis réintégration du batteur historique, changement de producteur et de studio, procès contre l’ancien manager et brouilles à répétition entre les deux leaders qui ont de plus en plus de mal à cacher qu’ils ne se supportent plus, la gestation du douzième effort des Dupont volants est un véritable calvaire. Au bout de ces longs mois de labeur, Steven Tyler promet un album dans la veine des cultes Toys In The Attic et Rocks.

Le bullshit marketing ne trompera pas longtemps sur la marchandise. Nine Lives n’est pas au retour aux sources mais un blockbuster discographique exhibant toutes les caractéristiques d’un bon gros disque de rock bien ricain tel qu’on pouvait le concevoir dans les années 90 : long comme un jour sans pain (14 titres, 66 minutes), surproduit, farci jusqu’au trognon d’overdubs graisseux, plombé de ballades sirupeuses et maintenu à ébullition par une palanquée de clips matraqués sur MTV (ce coup-ci c’est à Eva Mendes de provoquer des rêves humides avec son apparition dans la vidéo d’"Hole In My Soul"). Mission accomplie, Aerosmith relève les compteurs et place un méga-tube (le over-crémeux "I Don’t Want To Miss A Thing") dans la BO du dernier nanar intersidéral de Michael Bay (Armageddon) l’année suivante. Pour le reste, oui, le disque a passablement vieilli mais il demeure le dernier effort correct des papys de Boston, comportant une poignée de titres à peu près dignes de leur légende ("Nine Lives", "Falling In Love", "Something’s Gotta Give"). La suite ne sera qu’un long naufrage discographique. So long, les toxic twins.



The Chemical Brothers – Dig Your Own Hole (Freestyle Dust/Virgin)
7 avril

Née dans les boîtes branchées au milieu des années 80, se disséminant des friches industrielles au cœur des campagnes endormies ensuite, la techno (on n’employait pas encore l’expression « musiques électroniques ») prend d’assaut le mainstream au cours des années 90. 1997 est à ce titre une année décisive, puisqu’elle verra exploser Daft Punk, The Prodigy, Aphex Twin, Amon Tobin, The Crystal Method ou encore DJ Shadow. Le deuxième long format des frangins chimiques fait assurément partie de cette cohorte glorieuse. Les Mancuniens avaient déjà frappé fort avec leur premier album (Exit Planet Dust, 1995), grisant creuset musical qui concassait l’acid house à grand renfort de boîtes à rythmes débridées.

Dig Your Own Hole enfonce le clou au marteau piqueur : plus trippant, plus virtuose, plus aventureux, c’est le son chemical 2.0 et XXL. Sans jamais renier ses origines club (l’ensemble constitue une imparable machine à danser), le duo accumule les exercices avec brio : funk sous stéroïdes ("Block Rockin’ Beats"), big beat musculeux sur lequel Propellerheads bâtira toute sa carrière ("Piku"), explosions psyché fluo sous kétamine (hypnotique "Lost In The K-Hole"), ambient pour lendemain de nuit blanche ("Where Do I Begin" en duo avec Beth Orton), "Tomorrow Never Knows" déchiqueté par une escouade de samplers à l’agonie avec le renfort de Noel Gallagher ("Setting Sun", qui traumatisera à jamais les nigauds de Kasabian)… Les compères ne s’interdisent rien et mettent dans le mille à chaque coup. Pièce centrale d’une trilogie liminaire absolument parfaite, le disque n’a pas pris une ride, reste aussi frais, intense et excitant qu’au premier jour et demeure la parfaite initiation aux paradis électroniques pour toute une génération.



Depeche Mode – Ultra (Mute/Reprise)
14 avril

Le printemps 97 récupère un Depeche Mode tombé dans le caniveau. Rincé par trois années de tournées livrées à tous les excès, Alan Wilder quitte le groupe. Camé jusqu’à la moelle, Dave Gahan frôle la mort et subit une longue cure de désintoxication. Resserrés sous forme de trio, comme à leurs débuts, les Anglais amorcent un come-back au sein d’un paysage musical qui semble avoir été aplani exprès pour eux. Sur l’archipel britannique, tout le monde s’échine à marier pop, rock et électro, du David Bowie fasciné par la drum and bass de Earthling jusqu’aux inénarrables péteux de U2, qui viennent de lâcher leur dernier navet (un de plus), Pop. On s’arrache les services des Dust Brothers, Howie B, William Orbit.

Vénérable ambassadeur de Casio et Bontempi (ou Korg et Roland pour être plus gentil) dans les années 80, Martin Gore se sent comme un poisson dans l’eau et empile claviers saturniens, pedal steel et guitares réverbérées sur un roulis grouillant de boucles rythmiques. "Barrel Of A Gun" se déploie lourdement comme dans un tunnel dévoré par les ténèbres, sous les invocations d’un Dave Gahan supplicié. "The Love Thieves" convoque The Cure, algorithmé et noyé dans une flaque de goudron. La suite est du même tenant, entre ballades post-apocalyptiques ("Insight", "Home"), disco-pop sardonique ("It’s Not Good") et noisy rock technoïde ("Useless"). Depeche Mode renait de ses cendres et s’acquiert les faveurs d’une nouvelle génération. Si le groupe reste en haut de l’affiche encore aujourd’hui, il le doit bien sûr à Violator et Music For The Masses mais aussi à cet Ultra accouché dans la chaud et le sang.



Supergrass – In It For The Money (Parlophone/EMI)
21 avril

Tandis qu'Oasis pique du gland et que Blur tourne son regard vers l’Amérique alternative, les frères pétard de la britpop déballent tranquillement, l’air de rien, leur Rubber Soul. Attendu au tournant après le succès de son premier album (I Should Coco, 1995), le trio d’Oxford propose une suite aussi pétillante que son prédécesseur mais plus variée, plus dense, comme tout bon deuxième disque qui se respecte. Les grisants "Richard III" et "Sun Hits The Sky" côtoient ballade kinksienne ("Late In The Day"), blues pour chambre d’étudiant enfumée ("G-Song"), "Strawberry Fields Forever" brillamment transmuté ("Going Out") et psychédélisme bariolé ("Sometimes I Make You Sad"), entre autres joyeusetés.

La formation, qui n’aura jamais eu le succès qu’elle mérite, est ici à son zénith et défenestre avec un entrain irrésistible une pop aussi teigneuse que rafraichissante. Autant dire que la galette n’a fait que se bonifier avec le temps. A rattraper d’urgence.


Commentaires
Maxouzzz, le 07/01/2018 à 09:55
Je reste effectivement aussi persuadé que Metallica aurait eu tout à gagner à tout condenser dans un seul disque..voir un double ? Personne ne sait ce qu'il en serait advenu.
Gogo, le 28/12/2017 à 08:38
Pop, pour moi le dernier album réussi de U2. Depuis, on creuse toujours un peu plus bas.
Mik, le 24/12/2017 à 15:32
Voyons, Pop est une tuerie.
Eily, le 21/12/2017 à 13:16
Je corrige mon commentaire précédent: après avoir lu la section sur OK Computer, je trouve que ce qui est dit sur U2 est 'achement sympa à côté de ce qui l'est sur Radiohead !
Eily, le 21/12/2017 à 13:07
Pop de U2 un navet ? Beaucoup de défauts certes, mais de là à le qualifier de navet, c'est un peu fort. Pour moi, leur dernier album un peu aventureux avant de retomber dans des poncifs mainstream.
Kefran , le 20/12/2017 à 10:31
Excellent article, en cette année 2017 triste en sortie rock. C’est vrai qu’il y’a eu des gros albums en 97! Le passage OK Computer m’a beaucoup fait rire. Continuez comme ça , vous faites du super boulot!