The Experimental Tropic Blues Band

Pourquoi ne pas prendre, une fois, nos voisins belges au sérieux ? Certes, dEUS ou Ghinzu ont déjà émergé des eaux tels des icebergs impatients d'en découdre avec les gaz à effet de serre, pourtant leur crédébilité peine à se décrocher de la calotte glacière. Et, The Experimental Tropic Blues Band , c'est qui ces rigolos, me direz-vous ? Eh bien, après avoir écumé le plat pays de l'Europe, passant de nombreuses années à trimer, ces trois garagistes remontent l'étage du devoir s'adjugeant un premier album studio effrayant et défrayant.

Les deux premières bombes de Hellelujah, "Rene the Renegate" et "Jealous Rock", annonce d'entrée un brulôt sans concession, sans fioritures. Car les guitaristes Boogie Snake et Dirty Wolf catapultent des riffs empreints de blues et de punk qui ne sont pas sans rappeler l'excellent combo The Jon Spencer Blues Explosion . Ici, pas de basse, juste deux guitares affolées s'assemblant à merveille accompagnées de voix nerveuses et déjantées. Des bribes d'harmonica remplissent les compositions courtes du trio comme sur l'énorme "Twice Blues" qui trouve un juste accordage décapant. L'auditeur a bien du mal à distinguer la batterie dans cette puissante démonstration sonore mais les chansons passent vite et bien à la manière d'un cheval entraîné aux sauts d'obstacles. Quelque peu désorienté après une première partie déjà bien réussie, on salive d'avance lors du traditionnel changement de face.

En effet, c'est une reprise de The Cramps , "Garbage Man", qui débute la seconde face. Celle-ci subit un arrangement des plus personnel avec une prise jack torturée canalisant le rythme d'une des meilleurs chansons du célèbre groupe psychobilly, toujours actif. La déferlante ne s'arrête pas en si bon chemin. Ainsi, "Snake Vs Wolf" mais aussi "Hallelujah" ou "Mexico Dream Blues" attaquent plein pot les oreilles. Des compos toujours rapides, efficaces et d'une envie mordante. Les tempos accélérés donnent une énergie revendicative d'un blues joué sans prétention, attirant de même une bonne dose d'humour façon belge. Grosse satisfaction également du côté du chant. C'est clair que Boogie Snake n'est pas un excellent chanteur mais le feeling suffit amplement à nous faire passer un bon moment rock and roll. Surtout que Dirty Wolf aide impécablement son acolyte d'une voix grave mêlant rockabilly et punk. Et puis, pour parachever le tout, dans "I Went Down" Boogie Snake suffoque dans le micro, hurle comme un animal et souffle, à n'en plus finir, dans son harmonica. "I think I'm gonna get over it with that blues power !"

Donc, The Experimental Tropic Blues Band risque de réveiller vos voisins, et pas qu'eux d'ailleurs, si vous ajustez correctement vos amplis. Courrez également les voir en concert car ce groupe s'est déjà taillé une sulfureuse réputation scénique où les slams et les pogos sont vivement conseillés et l'exhibitionnisme est autorisé. C'est certainement lors de ces solides et bancales prestations que le trio s'est engagé avec le très jeune label Jaune Orange hébergeant déjà Holywood Porn Stars . En tout cas soyez sur vos gardes, The Experimental Tropic Blues Band est bien décidé à ne plus vous lâcher la grappe, si solidemment est-elle attachée !