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Ozzy Osbourne
Patient Number 9
Produit par
1- Patient Number 9 (feat. Jeff Beck) / 2- Immortal (feat. Mike McCready) / 3- Parasite (feat. Zakk Wylde) / 4- No Escape From Now (feat. Tony Iommi) / 5- One of Those Days (feat. Eric Clapton) / 6- A Thousand Shades (feat. Jeff Beck) / 7- Mr Darkness (feat. Zakk Wylde) / 8- Nothing Feels Right (feat. Zakk Wylde) / 9- Evil Shuffle (feat. Zakk Wylde) / 10- Degradation Rules (feat. Tony Iommi) / 11- Dead and Gone / 12- God Only Knows / 13- Darkside Blues
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
Comme le veut la coutume italienne telle qu’on l’imagine parfois (1), la famille élargie s’est ici réunie pour entourer la Mamma qui sent sa dernière heure venue.
Les plus jeunes s’activent dans la cuisine (Andrew Watt à la console, Robert Trujillo à la basse, Chad Smith à la batterie) tandis que, vêtus de deuil, les vieux gratteux (Jeff Beck, Tony Iommi, Eric Clapton) font mine de veiller gravement sur la mourante. Dans l’attente qui d’un café corsé, qui d’un verre de vin frais et fruité.
Il y a même Zakk, le fils maudit au regard mauvais, venu du Sud du New-Jersey qui, à un moment ou à un autre, va accorder une guitare et gratouiller des arpèges en sourdine.
La scène mêle le pathétique au rituel. L’agonie peut être brève ou interminable. Nul ne le sait. La Mamma est coutumière du fait. Ce n’est pas la première fois que ses descendants sont convoqués pour un ultime Ave Maria.
Cela dit, était-il vraiment nécessaire d’enregistrer tout ça ?
La question restera posée et c’est, une fois encore, le temps qui passe qui décidera ce dont il faudra se souvenir. Ou pas.
Le merchandising est à la hauteur du non-événement : artwork parfait (et sinistre), production cinq étoiles, marketing étudié, visages plus maquillés que la truffe de Gene Simmons, ambiance oppressante, … Mais, musicalement, l’album est tristement dénué d’intérêt. A l’exception peut-être de la plage titulaire en introduction, dont la construction est assez putassière pour glaner des Grammys puis, au bout d’une très longue nuit, d’un "God Only Knows" qui pourrait retenir l’attention.
Par bonheur, il y a Jeff Beck, devant qui les étoiles et les soleils se prosternent quand il dégaine la six-cordes pour balancer quelques – trop rares - soli anthologiques ("Patient Number 9" et "A Thousand Shades").
Mais il y a aussi Eric Clapton, en complet décalage avec cet univers. Comme disait l’autre belge, on n’écoute même pas ce que ses pauvres mains racontent.
Pire encore il y a, Tony Iommi qui parvient à endormir son monde avec deux titres proto-sabbatiques et Zakk Wylde qui enfonce abominablement le clou de cercueil rouillé en pastichant le style pachydermique de son aîné.
C’est juste pesant. Et mille fois entendu.
Chaque instant qui s’éternise laisse à imaginer les trésors d’ingénierie qui ont été déployés pour assembler les pièces du puzzle. Surtout, pour "recréer", au départ d’un souffle, cette voix de chanteur damné qui semble parfois irréelle tellement elle est traficotée.
Patient Number 9 est, a contrario, un parfait plaidoyer en faveur d’un garage-indie-rock qui serait joué avec fureur ou enthousiasme par des gamins et/ou des gamines. Il y a plus de rock dans trois minutes mutines de (par exemple) Wet Leg que dans cet album qui s’éternise comme une veillée de prières impies.
Est-ce qu’il ne serait pas plus opportun de laisser la Mamma reposer (ou ressusciter) en paix ?
(1) Loin de moi l’intention de me moquer. La coutume est similaire en Ardenne belge, à ceci près qu’il n’y a pas de vin blanc fruité, que le café est trafiqué à la chicorée et que personne ne songerait à venir avec une guitare.