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Critique d'album

Mark Lanegan


Whiskey For The Holy Ghost


(18/01/1994 - SubPop - - Genre : Rock)
Produit par

1- The River Rise / 2- Borracho / 3- House A Home / 4- Kingdoms Of Rain / 5- Carnival / 6- Riding The Nightingale / 7- El Sol / 8- Dead On You / 9- Shooting Gallery / 10- Sunrise / 11- Pendulum / 12- Judas Touch / 13- Beggar's Blues
Note de 5/5
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Note de 3.0/5 pour cet album
"Le difficile cap du deuxième album, atteint avec pertes et fracas par un Mark Lanegan déjà au bord du précipice"
Maxime L, le 24/06/2022
( mots)

On avait laissé Mark Lanegan en 1990, après un premier album solo remarqué, mais qui restait alors un coup d’essai sans lendemain.


Il faudra attendre 4 ans pour lui voir un successeur. 4 longues années pendant lesquelles Mark Lanegan n’a cessé de tourner et d’enregistrer avec son groupe initial, les Screaming Trees, qui demeure alors encore son principal projet, et qui sortira sur cette période deux disques importants. D’abord Uncle Anesthesia en 1991 mais surtout Sweet Oblivion en 1992, avec lequel la formation sera a deux doigts de toucher le jackpot*.
4 ans qui auront également vu l’explosion, et la surexposition du grunge, et dont les “Trees” se contenteront bien malgré eux des quelques miettes laissées par Nirvana, Pearl Jam et toute la clique de Seattle.


On le sait, les Screaming Trees sont parfaitement ingérables, à la scène comme à la ville, et la possibilité pour Mark Lanegan d’écrire en solo est une véritable échappatoire pour ne pas sombrer totalement dans la folie, ou finir dans la rubrique fait divers. Seulement voilà, le rythme éreintant des tournées, de la promo et des enregistrements avec les frangins Conner ne lui autorise que quelques plages de temps libre pour se consacrer à sa musique, beaucoup plus personnelle et introspective que le grunge psychédélique des Trees.


"Pour ce deuxième disque, ce que j'avais initialement prévu d'être une expérience d'enregistrement rapide s'est étendu sur quatre ans. De nombreux musiciens, ingénieurs, producteurs et studios différents ont été sollicités et usés. Mon comportement est devenu erratique, impossible à gérer car je réécrivais continuellement, réenregistrais et mixais des morceaux selon une sensibilité interne chimiquement fissurée qui frôlait parfois la paranoïa."**


Pour ce qui est de sa paranoïa, elle est directement imputable à son hygiène de vie, qui ferait passer Pete Doherty (d’avant son exil Normand évidemment) pour Mathieu Ricard et qui nous donne une petite idée des conditions dans laquelle Whiskey For The Holy Ghost a vu le jour.


Un disque a bien failli ne jamais exister, les bandes étant à deux doigts d’être jetées dans une rivière Américaine, par un Lanegan insatisfait, dépressif, hagard, et à côté de ses pompes. Il faudra l’intervention in extremis du producteur Jack Endino pour sauver ce qu’il y avait à sauver, à savoir un disque de country-blues-folk sauvage et habité. C’est d’ailleurs assez cocasse que le premier morceau de ce disque se nomme “The River Rise”. Un titre qui donne le ton de l’album : des lignes de guitares lancinantes et répétitives, et une pureté dépouillée telle un premier matin du monde, mais dont on commencerait à sentir les effluves d’essence et de whisky. Une sorte de “jusqu’ici tout va bien, mais préparez vous à l’apocalypse”. Un apocalypse dont Mark Lanegan n’est pas encore le messager qu’on connaitra par la suite. Sa voix n’est pas toujours complètement assurée, même si l’on percoit du bout de l’oreille cette cassure si caractéristique et qui s’étendra à mesure des deuils, des bad trips et des dépressions vécus par l’artiste.


Du côté de “Borracho”, qui fit office à l’époque de “single”, on retrouve davantage de repère : la voix y est plus râpeuse, les guitares y sont électriques (un des rares morceaux où c’est le cas, avec “Pendulum”) et les refrains s’égosillent furieusement, faisant du morceau une ligne de flottaison entre blues désabusé et grunge incandescent. De loin la pièce de choix du disque. Si l’album marche clairement sur les traces de The Winding Sheet au niveau de l’ambiance générale “grunge-bluesy”, symbolisée par une pochette très explicite, Whiskey For The Holy Ghost s’avère être un disque beaucoup moins spontané d’un point de vue musical. Là où les structures étaient jusque là basées avant tout sur la guitare acoustique et la voix, on trouve sur ce second album des arrangements bien plus fournis, sans pour autant dénaturer l’aspect instinctif et viscéral des compos de Lanegan. Des lignes de violons sur le désuet et charmant “House a Home”, du banjo sur le presque enjoué “Carnival”, et même du saxophone sur “Sunrise”.


Pour cela, Mark Lanegan a su très bien s’entourer, comme il saura le faire sur chaque oeuvre. Si on retrouve le fidèle Mike Johnson (alors bassiste de Dinosaur Jr et comparse de Lanegan jusqu’à son avant dernier album) à la co-production et sur une bonne partie des instruments (guitares, basse, piano, claviers, harmonica), le casting est complété par une dream team made in Seattle à la batterie, jouée selon les morceaux par Mark Pickerel (Screaming Trees), Dan Peters (Mudhoney), Tad Doyle (du groupe Tad), mais également par Jay Mascis, leader-chanteur-guitariste des géniaux Dinosaur Jr et batteur de formation.


L’autre vraie petite nouveauté, anodine au premier abord, est la présence de choeurs féminins (par Krisha Augerot et Sally Barry) qui constituent un parfait contrepoint au chant de Lanegan sur “Kingdoms Of Rain” et “Sunrise”, deux autres belles réussites et qui sonnent comme un avant goût des nombreuses et excellentes collaborations de Lanegan avec des chanteuses (de Pj Harvey à Isobel Campbell en passant par Martina Topley-Bird).


Si de multiples références sont faites au Soleil, “Sunrise, “El Sol”, ne nous y trompons pas, l’ensemble est d’une noirceur certaine, implacable et inextricable. Pas ou peu d’éclaircies ici, mais des complaintes réhaussées d’orgues sépulcraux et solennels, “Kingdoms of Rain” encore, ou “Dead On You”. Une obscurité qui croît et s’étire sur les 13 chansons de l’album, avec néammoins quelques titres plus faibles, on pense en particulier à “El Sol” ou à un “Riding The Nightingale” bien trop long.


L’accueil de Whiskey For The Holy Ghost à sa sortie fût bon, mais à double tranchant, comme l’expliquait Lanegan dans son autobiographie :


" A sa sortie, Whiskey For The Holy Ghost a été salué par la critique, bien plus que n'importe quel album des Screaming Trees. Certaines publications ont même parlé de « chef-d'œuvre », soit le terme exact qui m'avait poussé et hanté pendant les trois longues années où je m’étais débattu pour finir le disque. Cependant, c'était une consécration dangereuse : j’avais dépensé des milliers de dollars, des heures, des jours, des mois et des années, perdant presque la raison, tout ça pour parvenir à un produit fini pas très éloigné de la maquette de départ. En faisant cet album, j’étais devenu un véritable connard paranoïaque, et, en le qualifiant de brillant, le monde semblait signifier que j’avais eu raison de me comporter ainsi. Voilà ce que j'appelle une consécration dangereuse".


Un disque un peu sacré et à la fois un peu maudit donc, et qui s’il fait partie des préférés des fans de l’artiste Américain, s’avère, très subjectivement, très inférieur à ce qui arrive..


 


 


À écouter : "The River Rise", "Borracho", "Kingdom of Rains".


 


 


 


*Malgré la présence du single à succès “I Nearly Lost you” sur la BO du film “Singles”, le groupe n’en reçut presque aucune rémunération.


**traduction d’un passage de son livre “I am the Wolf” paru en 2017.


 


 

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