Lunatic Soul

Après un excellent premier opus à la beauté ténébreuse produit sous le nom de Lunatic Soul, Mariusz Duda fait sienne la thématique de la dualité entre noirceur et lumière avec la sortie d'un second album à la blancheur immaculée. Poursuivant la narration initiée sur l'album précédent avec un personnage parcourant les limbes entre l'au-delà et le monde des vivants, Duda joue une nouvelle fois une grande partie des instruments en plus d'assurer les vocaux. Il est à nouveau secondé par plusieurs invités issus de la scène progressive polonaise, en particulier Maciej Szelenbaum à la flûte et parfois aux claviers et Wawrzyniec Dramowicz du groupe Indukti à la batterie et aux percussions.

Les compositions de ce Lunatic Soul deuxième du nom se situent dans la continuité du précédent, tout en accentuant le caractère répétitif et hypnotique du premier opus avec des titres très inspirés par les rythmes et les sonorités orientales, à l'image d'un "Escape from Paradlce" qui rappelle aussi bien les inspirations de Dead Can Dance que certaines partitions de jazzmen comme Avishai Cohen. Lunatic Soul alterne une nouvelle fois entre des ballades acoustiques magnifiées par la voix mélancolique de Duda, à l'instar d'un "Otherwhere" poignant et dépouillé ou des arpèges feutrés de "Gravestone Hill", et des instrumentaux plus touffus et expérimentaux, en particulier sur le court "Limbo" ainsi que le titre fleuve, "Transition". Ce dernier vagabonde pendant 11 minutes d'une ambiance à une autre, les nappes de claviers du début laissant place à une boucle trip-hop hypnotisante où viennent se greffer diverses sonorités et bruitages électroniques.

Les pistes les plus longues marquent ainsi une vraie progression en termes de densité musicale, à l'image de "Suspended in Whiteness", acoustique et aérien dans son intention première avant l'apparition d'une section rythmique plus lourde qui noie la légèreté initiale avec une sensation de chape de plomb oppressante. Un sentiment sinistre accompagne également l'écoute d'"Asoulum" et ses accords menaçants, à la limite de la dissonance, finalement sauvés par un refrain rédempteur accompagné d'un mur de synthétiseurs. Le conclusif "Wanderings" se distingue également par un beau travail sur la mélodie malgré un son de batterie électronique un peu plombant.

Globalement ce second jet est ainsi moins réussi que son prédécesseur, avec une instrumentation plus synthétique, moins aérienne et méditative, suggérant davantage une impression de noirceur et de violence contenue. L'album possède pourtant une entrée en matière proprement somptueuse, au rendu très cinématographique, conjuguant mélodie subtile au piano et motifs harmonieux de guitare acoustique tandis que les cordes et canons de voix viennent envelopper le tout avec grâce et légèreté.

Avec ce second album, le Polonais écrit donc noir sur blanc ses intentions musicales mais accuse le coup d'une production aux arrangements pas toujours très inspirés. Prenant le contre-pied de cet album à la lourdeur un peu trop marquée, Duda enchainera avec un album plus expérimental et quasi-instrumental intitulé Impressions avant l’exceptionnel Walking On A Flashlight Beam en 2014.