↓ MENU
Accueil
Première écoute
Albums
Concerts
Cinéma
DVD
Livres
Dossiers
Interviews
Festivals
Actualités
Médias
Agenda concerts
Sorties d'albums
The Wall
Sélection
Photos
Webcasts
Chroniques § Dossiers § Infos § Bonus
X

Newsletter Albumrock


Restez informé des dernières publications, inscrivez-vous à notre newsletter bimensuelle.
Critique d'album

Melvins


Melvins!


(12/05/1986 - C/Z Records - Melvins - Genre : Rock)
Produit par Chris Hanzsek

1- Easy as It Was / 2- Now A Limo / 3- Grinding Process / 4- At a Crawl / 5- Disinvite / 6- Snake Appeal
Note de /5
Vous aussi, notez cet album ! (0 vote)
Consultez le barème de la colonne de droite et donnez votre note à cet album
Note de 3.0/5 pour cet album
"Douze minutes d'intensité sonore inouïe"
Nicolas, le 19/05/2023
( mots)

Après des débuts en free style au trash assumé et des maquettes de titres parfois très (très) rapides (cf l’aperçu de Mangled Demos From 1983 pour ceux que ça intéresse), voici que les Melvins en viennent enfin à enregistrer leur premier EP. Nous sommes alors en 1986, soit trois ans après leurs premiers méfaits. Et trois ans, c’est long. Que s’est-il passé durant cette période ? Pas grand-chose. Quelques concerts à Olympia tout d’abord, puis la renommée des trois hommes a fini par diffuser jusqu’à Seattle. Voilà qu’en 1984 Buzz Osbourne sympathise avec Jonathan Evison, leader des March of Crimes basés sur l’île de Bainbridge, vous savez, là où sévit le Malfunkshun des frères Wood. March of Crimes comporte à l’époque dans ses rangs Ben Shepherd (futur bassiste de Soundgarden) et Stone Gossard (futur guitariste de Green River - il est d’ailleurs en train de se faire alpaguer par Steve Turner à la même période), excusez du peu. MoC est un groupe de guignols, jugez : Evison est allé jusqu’à refiler une cassette de démos à Jello Biafra, qui l’a égarée, et devinez quoi ? Il n’en avait fait aucune copie… Et la fine équipe de se retrouver le bec dans l’eau !


Bref, si March of Crimes périclite tranquillement, il n’en est rien des Melvins qui ont donc tapé dans l’œil d’Evison, lequel leur dégote des concerts à Rain City. Et voilà le trio occupé à passer ses week-ends à faire la navette entre Montesano et Seattle. C’est un certain Krist Novoselic qui leur prête sa fourgonnette et qui leur sert de chauffeur (la plupart du temps en état d’ébriété avancée), tout en jouant les roadies quand le besoin s’en fait sentir. De temps en temps - de plus en plus souvent, en fait -, un pote de Novoselic, Kurt Cobain, suit les quatre hommes dans leurs déplacements et jamme avec les Melvins dès qu’il en a l’occasion. La rumeur prétend que le blondinet d’Aberdeen se soit fait recaler à une audition pour devenir le bassiste du groupe, ce que Buzz Osborne réfute avec force. Où est le faux, où est le vrai ? Difficile à dire. Mais la bande à King Buzzo fait beaucoup de bruit en ville, à tel point qu’ils finissent par devenir des incontournables des bas-fonds de Seattle. Néanmoins, cela ne suffit pas à enregistrer un disque, malheureusement. Loin s’en faut, même, quand il n’y a pas un seul pro des studios dans les parages…


Le déclic vient avec Deep Six, la fameuse compil séminale du grunge éditée chez K/Z Records par Chris Hanzsek début 1986. Les Melvins y interprètent quatre titres, dont deux en dessous des quarante-cinq secondes (c’est dire si c’est expéditif), mais ils partagent surtout la playlist avec le gratin du coin, Green River, Malfunkshun, Soundgarden, Skin Yard et les U-Men. C’est presque aussi bourrin et presque aussi crade que ce que l’on retrouvait sur leurs démos initiales, mais qu’importe : enfin les Melvins mettent les pieds dans un vrai studio d’enregistrement - nous sommes à l’été 1985. Saisissant la balle au vol, ils sollicitent le même Hanzsek pour immortaliser leurs débuts commerciaux officiels : ce sera chose faite moins de six mois plus tard, avec la parution début 1986 de Melvins!. Noter que curieusement, alors que l’EP est enregistré même pas six mois après Deep Six, dans le même studio et avec le même producteur, le son s’avère nettement plus qualitatif. Preuve indirecte de la volonté de Hanzsek d’homogénéiser le rendu des six groupes de Deep Six vers le crade… donc vers le grunge ? On vous laisse juge.


Melvins! répond affectueusement au sobriquet de Six Songs, attendu qu’il contient… six chansons, oui, merci à ceux qui suivent au fond. Sachez néanmoins qu’il existe un Eight Songs et un Ten Songs reproduits en 1991 ainsi qu’un Twenty Six Songs datant de 2003, tous ajoutant de-ci de-là du matériel inédit ou alternatif au fil du temps. Ce qui n’a pas grand intérêt car l’essentiel de ce proto-Melvins tient dans ces six morceaux choisis initialement, qui eux-mêmes tiennent en à peine plus de douze minutes. L’expérience se montre donc brève mais pas le moins du monde inintéressante. Première plus-value, le son. Nous ne sommes pas encore au niveau du rendu effroyablement gras de Gluey Porch Treatment, mais ça commence à avoir de la gueule. On a bien affaire à un trio qui sonne vraiment, vraiment heavy, distordu, fuzzé à bloc, ça vrombit, ça racle l’asphalte, ça ratisse le béton, bref c’est assez saisissant de ce point de vue. Deuxième plus-value, Dale Crover. Oui parce qu’on ne vous l’a pas dit, mais Mike Dillard s’est fait éjecter assez vite courant 1984 parce qu’il préférait glander avec sa petite copine plutôt que de se pointer en répé. Et Dale Crover, son remplaçant, lui aussi c’est du lourd. Pas étonnant que Cobain ait eu des complexes vis-à-vis de ses batteurs après avoir enregistré avec lui les démos de Fecal Matter (courant 1987), car on a vraiment affaire à un cogneur redoutable, pesant, bestial mais non moins rapide. Une sorte de John Bonham du Washington… et la comparaison n’est vraiment pas vaine. Seul Dave Grohl arrivera à lui tenir la dragée haute dans le milieu. Curieux également que l’on ne ressente pas sa patte sur les quatre titres de Deep Six… mais passons.


Troisième plus value : les compositions. Plus lentes voire bien plus lentes que celles entendues jusqu’ici, plus pesantes, pas encore obèses mais en très nette surcharge pondérale. Il y a de la hargne, de la rage, même, dans le chant agressif de Buzz Osborne qui éclate bien souvent en râles. Le style des Melvins trouve ici sa feuille de route, fusion folle de la loudeur de Black Sabbath (en encore plus adipeux) et de la fureur de Black Flag (“Easy As It Was”, prophétique). On va même lorgner vers Master Of Reality, en Drop D s’il vous plaît, sur l’abyssal “Grinding Process”. Si aujourd’hui prendre en référence ce disque de Sabbath peut paraître banal, c’était très inhabituel à l’époque. La vélocité et la musculature de Crover font des merveilles sur l’entame surpuissante de “At A Crawl”, avec un son qui défouraille. On reste davantage dans le metal que dans le punk sur tout le disque, en particulier sur “Disinvite”, gavé de demi-tons très malaisants. Mais comme on ne saurait réduire les Melvins à un cliché, “Snake Appeal” vient conclure les hostilités au pas de course, lancé par la basse tonique de Matt Lurkin. Grosse sensation.


Cela reste court. Cela reste basique - le songwriting se limite peu ou prou à un empilement de riffs. Cela reste brut de chez brut. Mais ça décoiffe sévère. Bien sûr, Melvins! passera à la trappe dès que Gluey Porch Treatments sera arrivé dans les bacs, car la plus-value s’avérera irrésistible. Mais il y a là du bien beau matériel. Songez que nous sommes en 1986. Qui, de nos jours, est capable de sonner comme ça ? Vous pouvez commencer à chercher…

Commentaires
Soyez le premier à réagir à cette publication !