Grand Magus
Sunraven
Produit par
1- Skybound / 2- The Wheel of Pain / 3- Sunraven / 4- Winter Storms / 5- The Black Lake / 6- Hour of the Wolf / 7- Grendel / 8- To Heorot / 9- The End Belongs to You
Alors que l’humanité était plongée dans le silence, non à cause du Ragnarok mais par une épidémie mondiale, Grand Magus entrait également dans une longue phase mutique après avoir sobrement célébré le Dieu Loup en 2019. Pris dans l’hiver infernal de la Covid, le trio suédois commençait une hibernation dont nul n’était en capacité de dire quand celle-ci allait cesser pour que la bête se réveille. Peut-être était-elle-même endormie à jamais ?
Fort heureusement, 2024 sonne enfin le retour des Einherjars qui portent en étendard une pochette très similaire à celle de l’excellent Triumph and Power (hasard du calendrier, cet album est sorti il y a exactement dix ans), qui serait vue de face. En outre, tout laisse à penser que Sunraven s’apparentera à une épopée metallique épique puisqu’il s’agit d’un album-concept fondé sur le poème Beowulf, choix assez convenu mais cohérent avec l’univers du groupe.
Pour autant, l’album semble bien loin de mettre en place une fresque emphatique tant il est concis (35 minutes) et composé de titres relativement courts. Qui plus est, il n’y plus d’introduction ou d’interlude instrumentaux qui apportaient une touche cinématographique aux albums précédents. Sobriété et radicalité sont les maîtres mots de ce dixième opus.
Néanmoins, "Skybound" est doté d’un riff introductif épique et parvient à hybrider la vitesse du Power Metal et la lourdeur du Doom, aboutissant à un concentré du savoir-faire du combo dont on remarquera aussi le chant puissant et le solo prenant où la place de chaque note est calculée. L’envolée guerrière se poursuit avec "Sunraven", où la guitare chante la geste des héros mythiques, et l’appel au combat est lancé lors du chaloupé "To Heorot" qui déploie des lignes de guitare dansantes et celtisantes.
Mais le développement du poème demeure assez rudimentaire dans sa mise en musique, car seule l’introduction orageuse de "Hour Of The Wolf" confère un peu de grandiloquence au récit - un titre aux aspérités maideniennes qui en devient par là-même le point d’orgue de l’opus, assez démonstratif mais sans excès. Et là où "Grendel" aurait pu laisser espérer une épopée dantesque (en référence à Marillion), il se trouve être un des titres les plus standardisé de l’opus, même si toutes les qualités du combo restent bien présentes (le passage soliste est même mémorable).
On pourrait noter un retour au riffing pachydermique et aux sons fuzzy dans une sobriété d’ensemble qui laisse beaucoup de place à la guitare ("Wheel Of Pain"), mais Grand Magus ne renoue pas pour autant avec ses premières amours puisque les mélodies au chant demeurent d’inspiration viking et les chorus gardent un intensité martiale. Dans ce registre néanmoins, il faut ajouter la pesanteur de "The Black Lake", à l’introduction sudiste-stoner et à la voix d’une chaleur bluesy (il y a comme un petit air de Monster Magnet). En outre, si Grand Magus a souvent été comparé à Manowar, on entend davantage le Saxon moderne ("Winter Storms") avec une signature hard-rock musclé qui en devient presque classique sur "The End Belongs To You" (écoutez cette introduction et ces soli de batterie et de guitare presque kitsch).
Si le retour de Grand Magus aux affaires fait énormément plaisir, ce dixième effort est certes un très bon travail avec ses sommets mais il reste tout de même assez convenu – mais laissons du temps à la bête pour se réveiller.
À écouter : "Skybound", "Winter Storms", "Hour Of The Wolf"