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Critique d'album

MGMT


MGMT


(17/09/2013 - Columbia - Pop Psychédélique - Genre : Pop Rock)
Produit par

1- Alien Days / 2- Cool Song No. 2 / 3- Mystery Disease / 4- Introspection / 5- Your Life Is a Lie / 6- A Good Sadness / 7- Astro-Mancy / 8- I Love You Too, Death / 9- Plenty of Girls in the Sea / 10- An Orphan of Fortune
Note de 3/5
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Note de 1.0/5 pour cet album
"La drogue, c'est moche."
Nicolas, le 09/10/2013
( mots)

« Non mais attendez, les gars, vous êtes conscients que votre album est mauvais ? »

Affalés sur une chaise longue, Ben et Andy doraient au soleil leur carcasse malingre en sirotant sans nécessité une vodka tonic approximativement frappée. La température devait avoisiner les 35° Celsius, une vraie fournaise azurée que reflétait la piscine privée mise à disposition des deux artistes new yorkais. Pas un seul souffle de vent ne venait atténuer le supplice qu’endurait Phil, l’agent de com dépêché par la Columbia, engoncé dans son inconfortable costume trois pièces. Cependant, il n’aurait su dire ce qui, du ruissellement ininterrompu et nauséabond de ses aisselles ou du dédain ostensible de ses deux interlocuteurs, l’incommodait le plus. Sa gêne se trouvait encore amplifiée par le vague relent de majiruana qui alourdissait l’atmosphère déjà saturée de chlore et de sueur.

Phil avala bruyamment sa salive. « Non parce que, quand-même, à la base, vous avez un sacré potentiel. Oracular Spectacular, ça avait de la gueule. "Time To Pretend", "Kids", c’était de l’or en barre... »

Andy souleva mollement les épaules en émettant un grognement sourd, mais son visage, masqué derrière d’épaisses lunettes de soleil, ne quitta pas l’immensité bleue du ciel qu’il contemplait avec passivité. A côté de lui, Ben attrapa avec des gestes gourds l’une des pilules qui traînaient sur la petite table en bois située entre les deux transats, et il l’ingurgita d’un hochement de tête sec. Cause toujours, mon pauvre Phil, ils se foutent complètement de toi…

L’homme de bureaux reprit la parole. « Donc après un premier album prometteur, vous nous avez fait le coup des morceaux sans refrain avec Congratulations. Et maintenant, vous poussez le vice encore plus loin avec des morceaux... sans mélodie. »

Ben tourna légèrement la tête dans sa direction, même si son regard restait perdu dans un espace situé loin derrière le businessman, quelque part entre la villa et les taillis raz qui clôturaient la propriété. « Oui, anonna-t-il d’une voix lourde, c’est le concept.

― Le concept ? Vous ne poussez pas le bouchon un peu loin ? "Mystery Disease", vous appelez ça une chanson, vous ? Deux notes de chant, une boucle de boîte à rythme, une pauvre de nappe de synthé. Mon propre fils serait capable de faire mieux ! Et "Introspection", c’est à peine moins risible. Vous avez pondu l’un des couplets les plus nases de tous les temps !

― Mmhh…

― Et "Your Life Is A Lie", franchement ? Un jingle pub abrutissant égrené en boucle pendant trois minutes, c’est minable ! »

Andy émit un ricanement aigre suivi d’une toux stertoreuse.

Phil ne parvenait plus à se contenir, et la chaleur accablante lui était de plus en plus insupportable. « Quand vous pondez un titre correct, genre "A Good Sadness", il faut que vous fichiez tout en l’air avec une intro et une outro ridiculement inintéressantes. Ou tenez, prenez "I Love You Too, Death" : on n’entend rien à votre chant, et là-dessus vous bricolez des arrangements hyper glauques. Ce n’est pas du torpillage intentionnel, ça ?

― Heu, non, répondit Andy avec une moue indéchiffrable. Enfin si, si tu préfères. C’est le concept.

― Le concept, quoi, enchérit Ben. Tu sais, l’osmose hallucinatoire. Tout ça, quoi. »

Phil fulminait désormais véritablement. « Hallu... ? Non mais faut arrêter, les mecs ! J’ai sous les yeux vos factures de dope. Les trois quarts du budget de l’album sont passés en LSD, en ecsta et en cannabis. Vous savez que Syd Barrett était déjà complètement à l’ouest rien qu’en consommant la moitié de ce que vous prenez !

― Ouaaiiss, S-s-syd ! siffla Andy entre deux spasmes hilares. Lui, il assurait grave. Tu vois, "Alien Days", on l’a composé à sa mémoire.

― Sans rire ? Mais c’est du sous-Barrett, votre machin. Lui au moins, il savait pondre des mélodies, pas cet espèce de gloubi-boulga informe et très, très moche. Et "Astro-Mancy", ce serait pas un hommage à "Astro Domine", tant qu’on y est ? Il n’y a rien là-dedans, à part la même série de percussions répétées jusqu’à la lie. Mais j’ai gardé le meilleur pour la fin, parce qu’avec "Plenty Of Girls In The Sea", vous avez turbiné grave, les cocos. C’est quoi votre délire ? Des sirènes à poil ou bien les restes immergés d’un serial killer ?

― C’est ça, déclara Ben d’un ton morne en allumant nochalamment un énorme joint.

― Ça quoi ?

― Ben ça, quoi. C’est le concept. » Il aspira une énorme bouffée de ganja, puis émit un long râle de satisfaction.

C’en était trop. D’un revers de manche, Phil s’épongea le front avant d’exploser. « Bon écoutez, les mecs, je vous aime bien. Non, sans déconner. C’est vrai que j’ai toujours trouvé que vous aviez un petit côté irritant - la candeur du dopé, peut-être - et que vous aviez le don de prendre de haut un peu tout le monde, mais jusque là ça passait. Déjà, le nom de votre groupe, hein, entre nous, cette pauvre blague à deux balles, fallait quand même oser. Mais vous faisiez de belles chansons et vous méritiez votre statut. Sauf que là, désolé de vous le dire, c’est n’importe quoi. Vous partez complètement en vrille ! Personne n’achètera votre disque ! Vous allez vous faire torpiller par la critique…

― ...désolé de t’interrompre, fit Ben d’une voix étonnamment éveillée après avoir exhalé une longue volute de fumée herbeuse, mais tu te goures sur toute la ligne. Personne ne va rien comprendre à ce disque, et c’est normal puisqu’on a fait tout pour ça - d’ailleurs, tu nous l’a bien fait remarquer. Sauf que les gens adorent ne rien piger et ils vont rester en extase devant cet album. Certains lâcheront l’affaire, mais tu verras : ils se feront montrer du doigt. Quant aux autres, ils vont aimer, et certains vont même kiffer grave. On va vendre des disques, des tas, et on aura même droit à quelques lauriers dans la presse. Comme ça, juste en faisant de la merde. Elle est pas belle, la vie ? » Il leva un sourcil indolent à l’attention de Phil sans se départir de son agaçante neutralité.

L’agent était vaincu. Que répondre à cela ? Instinctivement, même si son subconscient lui hurlait de réagir et de mettre fin à cette mascarade, il savait que les MGMT avaient raison. Alors il repartit, la mine sombre et la queue entre les jambes, et tout en cheminant vers la Pontiac qu’il avait garrée un peu plus en contrebas, il cherchait déjà quelle explication bidon il allait pouvoir servir à ses employeurs pour justifier une telle gabegie. « L’incompréhension, se murmura-t-il tout bas. Pourquoi pas ? C’est incroyablement nul, comme excuse, mais avec suffisamment d’enthousiasme pour entretenir les apparences, ça devrait pouvoir marcher. En tout cas, ça ne coute rien d’essayer... » Il sortit son mobile de la poche de son pantalon et, d’une main moite et fébrile, pianota le numéro de son supérieur hiérarchique. « Allo, Tom ? Ouais, c’est Phil… Non, ça va, c’est juste que je crève de chaud... Ouais…. Dis voir, je ressors juste des sessions de travail de Andy et Ben. Mais c’est vraiment dingue, ce qu’ils font ! J’ai pas tout capté, mais franchement, ça déchire grave… »

 

Cette histoire est une fiction. Tout ressemblance avec des personnages réels... ne serait pas si fortuite que cela.

 

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