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Critique d'album

Gone Is Gone


Echolocation


(06/01/2017 - Rise Records - Supergroupe - Genre : Hard / Métal)
Produit par Gone Is Gone / Dave Greenberg / Ken Andrews

1- Sentient / 2- Gift / 3- Resurge / 4- Dublin / 5- Ornament / 6- Pawns / 7- Colourfade / 8- Roads / 9- Slow Awakening / 10- Fast Awakening / 11- Resolve / 12- Echolocation
Note de 4/5
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Note de 2.5/5 pour cet album
"Guerre de Troy"
Etienne, le 22/01/2017
( mots)

L'écholocation est un mode de repérage et de visualisation utilisé par certains animaux (dont les chauves-souris et les dauphins) lors de leurs déplacements pour localiser leurs proies et les obstacles dans leur environnement. Pour cela, les animaux émettent des ondes sonores, perceptibles ou non par l'oreille humaine. Celles-ci sont renvoyées lorsqu'elles se heurtent à un obstacle ou une proie puis sont enregistrées et visualisées par le cerveau de l'animal, lui fournissant ainsi une image en trois dimensions de son environnement. La voilà la bonne affaire: Gone Is Gone sonde son environnement à grands coups de décibels comme le mammifère apeuré face à ses prédateurs prêts à n'en faire qu'une bouchée. Alors quoi ? Quatre zikos rodés, chevronnés, galvanisés par le succès de leurs groupes respectifs - Mastodon, QOTSA et At The Drive-In, faut-il le rappeler - et plutôt rassurés par l'accueil critique raisonnablement tempéré d'un premier EP convaincant, n'en mèneraient pas large au moment de publier leur premier "vrai" album ? Etonnant mais pas impossible. Car le défi est tout autre. En huit titres et trente minutes, le GIG pouvait se permettre de décliner la même formule "riff qui bastonne - refrain ciselé à voix éructée" à foison sans risquer d'alourdir son propos et de vexer trop vite l'auditeur exigeant que le CV fourni du combo laisse pantois. Avec douze titres et une durée proche du tour de cadran complet, Echolocation doit affirmer le GIG dans le paysage musical actuel bien au-delà de ses filiations dominantes, et doit se poser en aîné fort et prolongateur face à son maigrelet et intéressant cadet. Une tâche ingrate et ardue que le combo hybride relève sans entrain, chacun jetant à la casserole son ingrédient personnel dans l'espoir de voir s'évaporer d'une marmite crépitante un fumet aguicheur né de la bonne grâce du divin.


Habitué aux phases promos à rallonge, Gone Is Gone jette en pâture aux hordes de fans encore avinés des célébrations de fin d'année un trio de singles éclectique ("Sentient", "Dublin", "Gift") et se pourfend en longues interviews sur fond de mysticisme intello dans les colonnes des canards spécialisés à large spectre (Rolling Stone, NME) par la voix de son chanteur, Troy Sanders, les trois autres retournant fissa à leurs affaires respectives une fois acquittés du labeur du studio. Leader peu serein au sein de Mastodon, Sanders embrasse pourtant avec sérénité le rôle de porte-parole prophétique du GIG, à l'aise à l'idée d'évoquer la conception hybride d'un groupe "dont personne n'avait besoin mais que tous les quatre voulaient voir naître", et encore plus enclin à marteler que "personne n'attend quoi que ce soit de Gone Is Gone; la musique doit parler d'elle-même". L'art de prêcher - sincèrement sans aucun doute - la modestie tout en se posant en dilettante comme un groupuscule d'artistes bohèmes délivrant son oeuvre sans s'embarrasser de la perception de son auditoire. Le GIG ne compte d'ailleurs traîner ses guêtres sur scène qu'à deux reprises, à chaque fois pour fêter la sortie de son album, et basta. Il faut donc prendre Gone Is Gone pour ce qu'il est: un groupe éphémère, un instant de musique qu'il faut savoir capter dans l'immédiat au risque de regarder passer le train la mine déconfite, planté sur ses cannes penaud au milieu du quai. Encore faut-il être sûr de sa destination…


Si l'autre Troy - Van Leeuwen - s'est largement illustré en tant qu'artilleur de riffs et bombardier d'harmoniques sur demande - au sein des QOTSA, désormais objets du seul despote Homme - et du récent backing-band de luxe de l'Iguane - encore avec Josh Homme décidément... - il profite du GIG pour y dévoiler ses qualités personnelles, aspiration bien naturelle après plusieurs années d'un conformisme pas toujours juste à l'égard de son talent. Le voilà badinant, fier de lui en train de distiller quelques notes stridentes, crispantes de distorsion alors que la chape de plomb sonore se fait de plus en plus proche ("Resurge"), des arpèges minimalistes ("Resolve", "Colourfade") ou ses quelques phrasés sanguinaires que n'auraient pas renié les reines de l'âge de pierre ("Gift"). Associé à la basse gonflée de Sanders, à la frappe perçante d'Hajjar et aux ambiances électroniques hypertrophiées de Zarin, on aurait pu croire le bougre suffisamment cocooné pour délecter de quelques passes d'armes mémorables. Il n'en est pourtant rien, tout ce petit monde ayant fermé les oeillères depuis longtemps et évoluant sans trop se préoccuper de ce qui peut bien se passer autour de son récital de gammes personnel. Hajjar, totalement hors-jeu, ne pèse en aucune mesure sur un ensemble balbutiant qui tente en vain de se raccrocher aux quelques fulgurances vocales de Sanders ("Dublin") et au travail atmosphérique expansif d’un Zarin plutôt inspiré ("Roads", belle reprise de Portishead) pour rééquilibrer in-extremis une balance qui déconne.  A la masse, le GIG passe du pur contemplatif ("Dublin") au délire anarchique ("Ornament") avec une inconstance irritante, parfois avec le même thème - "Slow/Fast Awakening", pourquoi s’embêter ? - sans jamais songer à lier son ensemble, à unifier son discours, à clarifier sa pensée. Gone Is Gone fait tout et n’importe quoi dans Echolocation. Et comme à chaque fois dans ce cas-là, c’est surtout le n’importe quoi qu’on retient.


Car quand Troy part en vrille, c’est Troy qui déboule à la rescousse. Van Leeuwen peu impliqué, Sanders s’émancipe et apporte du coeur dans un disque où les têtes semblent être la principale - et unique - source de création. Sensible et souvent méconnaissable ("Roads"), le braillard de Géorgie glisse ses murmures dans des soupirs terrifiants de candeur ("Sentient") et accroche des mélodies de haute-volée ("Gift") quand il n’est pas constamment rabaissé par un Van Leeuwen grossier, griffant ses cordes jusqu’à implosion d’un Sanders trop court vocalement pour concurrencer telle surcharge sonore. Etonnement et à l’inverse - totalement - de son EP, le GIG s’atrophie à chaque accélération de rythme ou détonation de distorsion, ramollissant la matière même de ses chansons pour n’en laisser que de piètres interprétations achevées dans une douleur difficilement appréciable ("Resurge", "Colourfade"). On pense parfois à du mauvais Deftones face cette volonté insatiable de faire se côtoyer l’électricité d’un rock lourd, très porté sur la guitare, à l’onirisme des aspirations électroniques, presque shoegaze, de Zarin, qui sont elles particulièrement pointues et efficaces une fois audibles. D’une obsession pour la musique, l’anonyme du combo lui préfère la sculpture de silences pesants, le tissage scrupuleux de voiles d’ombre, l'enclenchement de lents cycles mécaniques, évolutifs, psychotiques ("Roads", "Dublin"). Un liant parfait pour concentrer les volontés des trois sbires dans une seule et même veine, de remettre son monde sur le bon rail, histoire de l’envoyer à la même gare. Et dans le même wagon… Mais Zarin est relégué en seconde classe, trop absent, trop atténué, mixé au rabais, et débarque en dernier, sans pouvoir décemment démontrer son talent, exception faite du spectral "Dublin" et du crépusculaire "Sentient" qui sont, comme par hasard, les deux seuls titres remarquables d’Echolocation. Navrant et frustrant.


A la problématique aïgue de la comparaison avec le tout récent EP de la bande, Echolocation répond sans équivoque: il est très simplement beaucoup moins bon. Sans axe de lecture distinctif, sans même une once de rhétorique perceptible, Echolocation est insondable et n'engage aucune réflexion, aucune jeu d'esprit, aucune mécanique analytique et pire, aucune palpitation fiévreuse. La guerre de Troy fait rage tout le long d'Echolocation, laissant le premier - Van Leeuwen - capituler sans état d’âme et le second - Sanders - s’incliner en dépit d’efforts considérables pour espérer un épilogue de meilleure tenue. Et c'est bien là le problème: en fin de compte, tout le monde y perd.


Chansons conseillées: "Sentient", "Dublin" et "Resolve".

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