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Critique d'album

Deftones


Adrenaline


(03/10/1995 - Maverick - Metal alternatif - Genre : Hard / Métal)
Produit par Terry Date

1- Bored / 2- Minus Blindfold / 3- One Weak / 4- Nose Bleed / 5- Lifter / 6- Roots / 7- 7 Words / 8- Birthmark / 9- Engine No.9 / 10- Fireal
Note de 5/5
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Note de 4.0/5 pour cet album
"A la fois aboutissement, ouverture et rupture : Adrenaline est un prisme ébouriffant"
Hugo, le 06/12/2019
( mots)

Le nu metal est né à la fois de tout, et de rien. Au milieu des décombres, ce style si particulier voit le jour au même instant qu'une humanité régénérée. Du moins supposément. La fin des années 1990 signale la chute de la logique des blocs, les barrières cèdent progressivement et toutes les consciences convergent vers un horizon promu comme la finalité civilisationnelle, pétrie de liberté et d'insouciance paisible. La « fin de l'Histoire », ardemment défendue par l'historien Francis Fukuyama, est vérifiée pour une partie de la société américaine, grisée par l'émotion d'une victoire éclatante des valeurs libérales et démocratiques. Qu'à cela ne tienne, des bandes de jeunes en manque de repères sonnent le glas. Apeurés par un avenir qu'on promotionne telle une stabilité éternelle écœurante, ils choisissent d'abolir les règles. L'heure est ainsi à la réinvention, au métissage et à la révolte.


Deftones entre ici en piste. Abreuvé par tous les styles populaires, le gang originaire de Sacramento ouvre le bal du metal dit alternatif, celui qui accueille au milieu de ses riffs, flows, rebonds rythmiques et férocités soniques. Preuve de l'impulsivité libertaire des temps, Chino Moreno (chant), Stephen Carpenter (guitare), Abe Cunningham (batterie) et Chi Cheng (basse) tournent pendant cinq ans sans aucune démo ou ambition de signature quelconque. Ils laissent leurs sonorités évoluer à feu doux, leurs inventions prendre de l'assurance, leur hargne se structurer non sans croiser la route d'un autre fondateur du genre, Korn. Vaille que vaille, une étendue se dessine progressivement : « Def », mutilation du nom du mythique label hip-hop Def Jam Recordings, « tones », déchirure des intitulés des groupes de rock'n'roll des années 1950, Deftones architecte d'un cocktail détonnant et fulminant trempé de métal et de rap.
La réunification des deux styles semblent somme toute logique. Expression populaire sous sa forme enragée et engagée, le nu metal scelle la conjonction inévitable de deux profonds courants qui ont témoigné chacun de leur côté pendant quelques décennies d'une angoisse, d'un étouffement à plusieurs degrés. Et ce rapprochement sonne comme un aboutissement, des esquisses d'une réponse toute en juxtaposition : sous les riffs incendiaires se dissimulent des rimes caustiques prêtes à tout remettre en cause, derrière l'explosion de flows rôdent des guitares criardes prêtes à renverser le mur du son. Cette sainte union est arrivée à point nommé, parfaite réplique contre une invariabilité de l'avenir humain promise et contre une immobilité promue. En définitive, avançons, cherchons l'Adrenaline et vivons !


On aura appréhendé les enjeux du premier album des Deftones, qui se vérifient jusqu'au contexte de son enregistrement. Signe des temps, c'est une Madonna à son époque dite « porno-soft », magistralement effrontée, qui met la main sur la bande de Sacramento et les fait signer sur son label, Maverick Records. La Reine de la pop a eu l'oreille attentive à l'écoute de la petite démo de 4 morceaux, et a bien senti que quelque chose se tramait dans les profondeurs américaines. Une créature qui allait bientôt sortir de sa cachette. C'est à Seattle, ville du grunge de Soudgarden et de Nirvana, que Deftones enregistre Adrenaline entre 1994 et 1995. Le moment est au bouillonnement, et les Californiens vont impitoyablement mêler les sangs métal, rap et grunge dans une symphonie monstrueuse.


La créature difforme montre une énergie à revendre, à la fois étouffante et alarmante. L'ouverture de « Bored », sciemment décousue entre guitare tranchante et soupirs mélodiques, introduit rapidement le thème de l'ennui à en crever, l'aspiration à une renaissance colérique et torturée. L'atmosphère est irrespirable face aux assauts auditifs alternant entre le flot chaloupé des complaintes de Chino Moreno et la soudaineté de ses screams. Portée par la force de frappe de l'armature rythmique Cheng-Cunningham, la 6-cordes de Carpenter découpe de violentes phrases hypersoniques, à l'exemple de « Nosebleed », où l'on décèle d'ailleurs des anicroches évidentes avec Korn. Deftones met magistralement au monde un nu metal dénué de scrupules en plein milieu de nos tympans meurtris. L'exemple le plus probant se trouve être « 7 Words », certainement le meilleur morceau de l'album : introduction à la croisée des chemins entre post-rock et new wave, explosion auditive entrecoupée en contre-temps de rebondissants et hip-hopesques « Suck bitch », screams épais et aiguisés, interprétation délurée et psychotique qui saurait rappelé un excellent Primus et Les Claypool hachés et rappés. En parallèle, « Birthmark » et « One Weak » déploient le savoureux désespoir du grunge, légèrement plus épicé à la sauce nu metal, tandis que « Lifter » fait écho au groove metal de Pantera. Devrait-on voir une corrélation dans le fait que le producteur d'Adrenaline, un certain Terry Date, fut l'assistant technique principal de toute la vague du metal alternatif des années 1990 ? L'exergue était significative, Deftones naît de rien, mais aussi de tout. Terry Date est une clé de compréhension : en outre d'être l'initiateur d'un mouvement nouveau, ralliant les diverses influences de ses prédécesseurs, la bande est aussi le continuateur logique de la fougue et des techniques développées par les générations antérieures. La grande spécificité de Deftones demeure dans son habilité à entremêler des éléments du hip-hop avec des sonorités toujours plus protéiformes. Pour en avoir le cœur net, une simple écoute de « Minus Blindfold » ou d' « Engine no. 9 » secoue musicalement, bouscule et désoriente. Exécutés d'une main de maître, ces morceaux mutants foudroient les genres et marquent furieusement un cap.
A la fois aboutissement, rupture et ouverture, Adrenaline est ainsi un prisme ébouriffant.

Note de 4.0/5 pour cet album
"Le premier album du quintet californien qu'on ne présente plus."
Matt, le 23/11/2009

On ne présente plus Deftones, groupe américain souvent imité mais rarement égalé  fondé en 1988 et toujours actif à ce jour, qui partage avec Korn la paternité du néo métal, style qui fit parler de lui dans les années 90. En 1995, le groupe sort Adrenaline,  premier opus, qu’il défendra d’arrache pied sur scène en première partie, entre autres de Korn, Ozzy Osbourne, Pantera et Sepultura. Soutenus par leur pairs (on pense à la chanson "Chi" dédiée à Chi Cheng sur l’album Life Is Peachy de Korn) mais boudés par les médias, il faudra attendre la sortie d’Around The Fur pour que la machine s’emballe.

A l'image de la pochette (une poire à lavement nacrée), l’écoute de l’album procure deux effets. Tout d’abord une esthétique sonore irréprochable, avec des compos travaillées, une bonne qualité sonore, des rythmiques efficaces, un chant impeccable… Ensuite, une fois que le cerveau a digéré cette rafale de sons, l'esprit de l'album se révèle, laissant apparaître toute l’énergie et la rage du groupe. Dès le premier titre, "Bored", on peut découvrir la formule gagnante qui fera le succès de Deftones. Une intro calme, où Chino Moreno pose une voix aérienne,puis une explosion de riffs lourds  et une envolée vocale pour nous emmener bien plus loin qu’on ne l’imaginerait, un pont plus doux qui laisse retomber la tension, puis la déflagration sonore, tant vocale qu’instrumentale, où tous les musiciens se démènent, pour un finish énervé.

Pas besoin de chercher plus loin, tous les titres suivent le même schéma à peu de choses près. Répétitif ? Pour quelqu’un qui n’accroche pas sur ce type de son, certainement. Mais tout en gardant les mêmes structures, Deftones se renouvelle dans les rythmiques, les textes, les arrangements, afin que chaque titre de l’album soit un grand moment, comme en témoignent le riff  de "Nosebleed", le perfectionnisme de "Lifter" ou encore le très efficace "Engine n°9". La machine de guerre connait son point culminant avec "7 words". Dès l'intro on sait qu’il se trame quelque chose de très lourd. La basse tourne, la batterie se fait discrète pour le moment, les guitares n'ont pas vraiment un son de guitare, et la voix arrive, presque chuchotante…  On est dans l’expectative jusqu'au refrain, un pur concentré de rage, un exutoire à la fois pour le groupe et pour l’auditeur. "Fireal" et la ghost track "First" viennent conclure le tout, non sans une certaine grâce, donnant aperçu du tournant que prendra petit à petit le groupe  avec un son qui va vraiment le distinguer et le mettre sur le haut du panier.... Le décor est posé. Le néo-métal est prêt à connaître quelques années de gloire.

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Commentaires
Kefran, le 09/12/2019 à 19:15
Ça faisait un moment que je ne l’avais pas écouté celui-là ! Merci pour la chronique ! ????