Josh Houseman

Erup'son : l'erup'sion de talents !

Quelque part en pays Arverne, au pied du plateau de Gergovie, une bande d'irréductibles bardes résiste encore et toujours au showbiz tendance sponsor et grosse monnaie. "Erup'son: tremplin musiques actuelles et collectif destinés à promouvoir et aider les artistes amateurs du Puy-de-Dôme dans leur développement et leur professionnalisation". Avec Erup'son, pas d'argent à la clé, mais mise à disposition de moyens par un accompagnement et un travail pédagogique avec des structures professionnelles. Le concept va naître en 2007 autour de 6 associations puydomoises qui décident de mutualiser leurs moyens. Il évolue en collectif en 2009 et propose alors dans son dispositif 4 dates de tournées, sur des lieux qui permettent  le maillage du département. Fort aujourd'hui  de 11 associations, le dispositif est porté par des bénévoles et des professionnels qui s'investissent pour accompagner les groupes lauréats : salles de concert, studio d'enregistrement, école de musique, label, techniciens vidéo, sons... Les barrières tombent entre amateurs et pros et ainsi se développe un réseau qui permet aux artistes de suivre le cheminement de la création à la production, en passant par la scène. Le collectif a maintenant un nouveau challenge : augmenter son rayonnement régional.

Trois groupes sont à l'affiche, issus d'une première étape de sélection : un choix des associations parmi les démos reçues, puis une mise en commun d'où sont ressortis les finalistes. Chaque soir de la tournée, le vote du public est recueilli et confronté à celui de 2 jurys : l'un d'artistes et l'autre de professionnels. C'est à Veyre-Monton, dans la petite salle du Club22 que se déroule la troisième date d'Erupson #4. Le Club 22 est une structure à l'organisation rodée, gérée par une sympathique équipe de bénévoles, tous mordus de musique. Parmi les 200 personnes présentes, on identifie  des "tribus" musicales par le code vestimentaire, mais ici, pas de sectarisme, on vient pour écouter toutes les musiques, et les encouragements seront largement partagés.

Païaka
Guitares, clavier, percussions, cuivres, batterie et chant, les huit artistes du combo Reggae Païaka nous invitent à un premier voyage lumineux et groovy. Proche de la culture rastafari sans en retenir le côté religieux (Païaka veut dire "païen" en jamaïcain), nous sommes conviés à un retour au roots d'origine. Une intro musicale pour nous mettre en jambe, et Martin au chant entame" Citizens", premier morceau d'un set qui va nous raconter une histoire. Au coeur de  l'actualité, Païaka nous interpelle sur nos actes et leurs conséquences. "Be conscious", dont le refrain/slogan est repris en coeur par le public, raconte la rencontre de membres de Païaka avec un marchand d'armes du sud de la France, et leur incrédulité face à son inconscience. Trois morceaux s'enchaînent pour nous mettre en garde contre la réaction des éléments : rythmique accélérée pour illustrer la Revanche, dub puissant pour le Chaos et tempo plus tranquille pour la Rédemption.

C'est Martin, le chanteur à la formation classique et jazz, qui compose les chansons du groupe, en collaboration avec François (guitare). Le line-up actuel joue ensemble depuis 8 mois seulement, mais c'est un groupe extrêmement mature, chaque instrument sur scène met les autres en valeur, le tout orchestré avec dynamisme par le chant dansant de Martin.

When We Were 21
Changement de tonalité avec les When We Were 21. Lord Gomez (Kunamaka), Morox et Tom (Galaktik Cowboys) au Vjing prennent possession (le mot est choisit) de la scène, pantalons noirs, cravates noires sur chemises blanches, façon Men in Black. Leurs influences revendiquées, Nine Inch Nails, Joy Division, Depeche Mode, Gorillaz et John Carpenter, entre autres, vont nous transporter du côté sombre de la cold-wave et de l'indus. Lord Gomez (chant et clavier) est à l'origine du projet, en invitant Morox à retravailler ses compos pour la batterie électronique. Tom a rejoint le duo, apportant la touche vidéo efficace et indispensable au voyage électronique dans lequel ils emmènent leur public. Un premier album est déjà sorti, mixé par l'ingénieur son Pascal Mondaz, ( Cocoon,  Bashung...).

Le trio va nous embarquer dans un trip pas si bad que ça et relativement bien maitrisé : on se retrouve projetés d'entrée de jeu dans des rythmes 80's avec "Repent your Sins", mais la batterie électronique de Morox va se charger de gérer les tempos en alternance, passant de "Au fond de l'eau" à "Breakdown". Tom enchaine les images, répétitives, comme ces fragments de paysages filmés de l'intérieur d'une voiture (?), qui reviennent et reviennent toujours, syncopés, dédoublés, superposés, et qui renforcent le côté obsédant des riffs du clavier. Mais la belle surprise de ce set est sans nul doute la voix de Lord Gomez : parfois  grave et inquiétante, elle remonte et s'atténue, se fait déformer, torturer, pour mieux s'élever dans un cri, sans jamais faillir. Les paroles sont en anglais, sauf pour "Les yeux Ouverts", qui nous fait partager un cauchemar éveillé tel qu'en faisait peut être Ian Curtis (chanteur de Joy Division). Comme quoi on peut exprimer avec force et poésie la tristesse, l'angoisse et la peur. WWW21 nous offre au final un remix de "Such a Shame" de Talk Talk, nous permettant de redescendre vers la lumière, au propre comme au figuré, puisque le combo a joué dans le noir, au grand dam des photographes présents (mais ils nous avaient prévenus !)

Josh Houseman
Pourquoi Josh Houseman a-t-il quitté sa Californie d'origine pour la France ? par amour bien sûr ! C'est pendant un séjour en Australie qu'il rencontre celle qu'il va suivre jusqu'en Auvergne, et qui va le mener jusqu'à Veyre-Monton ce soir. Il est encore peu connu dans l'Hexagone, mais s'appuie sur une expérience d'une bonne centaine de concerts au States et en Australie, et sur la curiosité des Frenchies pour ce jeune songwriter californien. Guitariste autodidacte, il a écrit et enregistré lui-même ses trois premiers albums. Souriant et tranquille, il s'installe d'abord seul sur scène, rejoint au deuxième morceau par Bruno Bonnet qui va l'accompagner à la basse pour un duo gagnant.

Il se dégage de Josh une sensation de sérénité, qu'il retranscrit dans ses chansons et exprime par son chant. Sa voix posée est légèrement nasillarde, un peu à la Dylan, et convient parfaitement à ses ballades folk. Avec "Tell me on my Way" il aborde un de ses sujets de prédilection : le voyage. Le vernis usé de sa guitare est comme un témoignage de ses pérégrinations. Son regard curieux porté sur le monde qui l'entoure, sur la nature et sur les gens, est son thème de prédilection, et il va nous inviter tranquillement à partager son chemin musical, en laissant le temps au temps : "Let the Time Be Time ". Le public est séduit et en redemande. Josh se plie de bonne grâce au rappel, et à la fin de la dernière chanson, la tête pleine d'images, on se prend à vouloir passer la guitare dans le dos et à se tourner vers un long ruban d'asphalte...for a long way...

Un bon cru 2011 pour Erup'son, avec un cocktail musical diversifié, et une  dernière date : le 2 avril, au Métro à Thiers. Le résultat des votes sera connu juste après. Mais les artistes ce soir nous confiaient que l'essentiel n'était pas là : musique et partage pour Païaka, apprentissage et évolution suite aux débriefs avec les pros, à chaque soirée, pour WWW21, création d'un réseau, rencontres pour Josh. La soirée Erup'son du 19 mars s'est certainement terminée à la façon "irréductibles bardes", autour d'un verre, dans la petite salle du Club 22.