Saxon
Killing Ground
Produit par Saxon
1- Intro / 2- Killing Ground / 3- Court of the Crimson King / 4- Coming Home / 5- Hell Freezes Over / 6- Dragons Lair / 7- You Don't Know What You've Got / 8- Deeds of Glory / 9- Running for the Border / 10- Shadows on the Wall / 11- Rock Is Our Life
Que le rock progressif des années 1970 ait inspiré la New Wave of British Heavy Metal des années 1980, c’est une chose peu soulignée mais un constat partagé. Il suffit d’écouter Iron Maiden, et ce dès les premiers albums ("Phantom of the Opera", entre autres), ou encore Saracen pour s’en convaincre. Que ce soit dans la composition de morceaux d’une belle longueur, du goût pour les variations internes, pour la virtuosité et la mélodicité, de nombreux traits esthétiques en témoignent. De là à dire que toute cette scène, par ailleurs très hétérogène, soit sous cette influence, il n’y a qu’un pas qu’on se gardera bien de franchir. Un cas emblématique comme Saxon l’illustre bien assez, même si l’auditeur attentif de leur discographie repérerait une inclinaison progressive au sein de leur premier opus (1979) ou de Power & the Glory (1983), bien qu’assez limitée.
Ainsi, quelle surprise d’entendre une reprise de "In the Court of the Crimson King" de King Crimson au sein de leur quinzième album, Killing Ground (2001) ! Celle-ci est rehaussée de passages heavy qui donnent son pesant d’originalité à une première partie assez fidèle, et elle éclaire une influence insoupçonnée pour ces musiciens adeptes d’un heavy assez rugueux. Après tout, Biff et sa bande chinaient dans les disquaires au cours des années 1970 et sont donc les enfants de la musique de cette époque. De plus, leur album précédent s’était permis un long titre épique, "Sea of Life" : "Shadows of the Wall" et ses six minutes semblent ici lui répondre, entre une introduction fantomatique, des synthés, des chœurs en refrain, une ambiance plus tamisée.
Alors Killing Ground, un album progressif ? Loin s’en faut, même si l’on retrouve le goût pour la mise en récit avec une introduction et les références historiques avec le casque de Sutton Hoo en couverture renvoyant au nom du groupe (il s’agit d’un casque typique des anglo-saxons). Mais il s’agit bien là d’un album de Heavy-Metal britannique qui louvoie entre tradition et modernité.
Niveau tradition, on aura un "Coming Home" sous forme de Hard-rock classique, un "Hell Freezes Over" taillé pour la scène qui ne renie pas une inspiration australienne, et parfois des compositions un peu plus convenues ("You Don’t Know What You’ve Got", "Rock Is Our Life" - au titre on ne peut plus caricatural mais au riff efficace – et le tout de même attachant "Running for the Border"). Ce registre plus traditionnel est souvent remis au goût du jour par la production ou peut épouser un entre-deux avec un registre metallique plus moderne : "Deeds of Glory" et son refrain accrocheur en sont l’exemple parfais, mais on trouve des touches de la sorte sur bien d’autres titres ("Rock Is Our Life").
Côté modernité donc, on trouve un groupe qui adopte des touches plus speed ou power qui lui évitent de s’enfermer dans sa zone de confort (le pas avait été franchi sur les deux derniers albums). On peut noter de vraies réussites comme "Dragon’s Lair", ou encore "Killing Ground". Ce dernier titre, intransigeant et épique, est essentiel puisqu’il permet d’entendre la ligne directrice de Saxon pour le XXIème siècle : un Metal beaucoup plus incisif et moderne, avec des fioritures qui enrichissent un morceau assez carré (les interventions à la guitare, le pont à la basse).
Saxon ouvre donc le XXIème siècle en grande pompe, le groupe est en forme, inspiré, et relève toujours un peu plus sa discographie. Tout en restant intègre, il essaye d’évoluer dans les sillons de Metal et propose un véritable bon album préfigurant en partie ses succès futurs.
A écouter : "Killing Ground", "Dragon’s Lair", "Deeds of Glory"