Metric
Formentera II
Produit par Liam O'Neil, Jimmy Shaw, Gus van Go
1- Detour Up / 2- Just The Once / 3- Stone Window / 4- Days of Oblivion / 5- Who Would You Be for Me / 6- Suckers / 7- Nothing Is Perfect / 8- Descendants / 9- Go Ahead and Cry
Si un groupe comme Rival Sons s’attire les éloges depuis quelques mois suite à son excellent dytique d’albums (Darkfighter et Lightbringer) sorti à quelques mois d’intervalle, une formation comme Metric serait - dans une certaine mesure - tout aussi méritante au vu de son récent retour en grâce. Il faut dire que nous ne pensions pas revoir si vite le combo canadien, surtout après un album aussi remarquable que Formentera (2022). Un évènement loin d’être anodin pour un groupe qui nous avait plutôt habitué à une sortie studio tous les 3-4 ans… La comparaison avec les frères rivaux n’aurait bien sûr pas lieu d’être si ce nouvel opus (présenté comme une suite) ne s’avérait pas au niveau. Sans pour autant égaler son prédécesseur (nous n’en demandions pas tant), Formentera II renvoie néanmoins l’image d’une formation dans la fleur de l’âge et en pleine maitrise de sa pop électronique. Ne vous fiez donc pas à l’insipide illustration (une pochette encore plus moche que la précédente), ni à la qualité du support physique (la version CD - ultra cheap - est franchement honteuse), mais laissez-vous simplement embarquer par la pop scintillante et aventureuse concoctée par Emily Haines et James Shaw.
Il sera normal, à la première approche, de voir en ce neuvième album une sorte de face B, prolongation opportuniste permettant à quelques chutes studio d’exister. Un sentiment renforcé par un début d’album sympathique (à défaut d’être réellement marquant) qui s’apprécie surtout pour son côté immédiat et dansant, contrastant d’autant plus avec l’ambiance crépusculaire du premier volume. Et pour cause, l’introductif "Detour Up" se voit vite rattrapé par son manque de consistance, quand le single "Just the Once" pourra finir par agacer avec ses élans funky maintes fois entendus.
Il serait pourtant dommage de s’arrêter à cette première impression. Prémédité ou pas par ses géniteurs, Formentera II est une œuvre qui monte en puissance au fur et à mesure de sa progression, se bonifiant à chaque nouvelle piste (et à chaque nouvelle écoute), jusqu’à retrouver les Canadiens à leur plus haut niveau. Résolument plus grave et atmosphérique, un morceau comme "Stone Window" semble d’ailleurs marquer un tournant salvateur en se révélant plus rock qu’il n’y parait avec son break inattendu et son solo de guitare. On retrouve alors peu à peu les chœurs en harmonies vaporeuses si caractéristiques du quatuor et cette capacité à toucher directement la fibre émotionnelle par le biais de mélodies aux infinies réminiscences. La musique de Metric atteint finalement sa pleine mesure quand elle s’extirpe des structures binaires pour s’orienter vers une approche plus progressive. Tout le savoir-faire des Canadiens se retrouve ainsi résumé sur "Days of Oblivion" à l’occasion d’une section enivrante aux sonorités cristallines (qui évoquera les premières heures de Coldplay), dissimulant sous sa douceur apparente des sursauts nettement plus virulants, avant de conclure sur un final tout en finesse et majestuosité.
Alors que l’album se révèle de plus en plus convaincant au fil de son déroulement, le groupe nous dévoile enfin sa pépite : se distinguant avec ses nappes de synthés chatoyantes, "Who Would You Be for Me" s’élève instantanément au rang des plus belles créations du combo, profitant d’un refrain d’une évidence et d’une beauté renversante. Actrice indissociable de cette réussite, Emily Haines capte à elle seule l’attention grâce à une prestation vocale toujours aussi juste et nuancée. Au rang des belles réussites, citons également "Nothing is Perfect", un morceau particulièrement intense et touchant dans son interprétation.
Si Formentera premier du nom s’était illustré avec son colosse d’ouverture "Doomscroller" (un titre aussi déstabilisant que fascinant), Formentera II réservera également son lot de surprises à l’image de l’étonnant "Descendants", une composition à l’intro légère et organique qui bifurque contre toute attente vers une section rythmique en mode technoïde.
Moins marquant et moins abouti que son prédécesseur, Formentera II n’en reste pas moins un opus de très belle facture, contenant son lot de pépites et de mélodies instantanées. Un album qui sera en mesure de se faire une place au sein d’une discographie qui n’a plus grand chose à envier aux plus fiers représentants de la scène pop. Le groupe canadien n’aura peut-être jamais la reconnaissance qu’il mérite. Peu importe, pour nous, Metric fait déjà partie des grands !
A écouter : "Who Would You Be for Me", "Days of Oblivion", "Nothing is Perfect"