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Sophie Hunger
Et c’est seule que Sophie Hunger avance dans la lumière pour présenter son univers tiré de ses deux albums en interprétant "Die Fahrende" à un parterre clairsemé de trentenaires, auditeurs types de France Inter. A capela et en allemand, la zurichoise capte l’attention dans une envolée lyrique presque solennelle et religieuse, rajoutant à la proximité avec le public que peut inspirer ce titre, une certaine musicalité et, finalement, une grande fluidité dans cette langue consonantique, surprenant une oreille peu habituée à cette racine germanique. Mais la magie opère, et voilà en quelques instants le public, certes conquis d’avance, conquis à nouveau …
Mais c’est en anglais, et à la guitare, que Sophie Hunger, plutôt réservée avec son public, continue à s’exprimer, avec "Shape", le titre d’ouverture de son dernier album Monday’s ghost. Accompagnée ici de ses musiciens, tous semblent prendre plaisir à jouer ensemble, augmentant de plusieurs degrés la température de l’Astrolabe, et celle du public par la même occasion, qu’ils accueillent dans leur jeu de regard, pour partager avec lui ce plaisir. Et Sophie Hunger distribue à tout va une pop fraiche et efficace, teintée de jazz, de blues, de folk ou encore de rock. Sur "Drainpipe", la jeune femme, accompagnée au piano et au trombone, montre ses talents de vocaliste, capable d’énervement dans la mesure, et dans la justesse, comme pour éviter de trop brusquer, de trop se détacher de cette ambiance assez sombre, à l’aise dans sa petite robe noire. Ainsi, pendant tout le début du set, la chanteuse communique peu. Toujours discrète entre chaque morceau, la suissesse daigne enfin parler au public plus longtemps, dans un français approximatif presque émouvant de fraîcheur et d’innocence, et raconte, avec cynisme, sa rencontre avec une indigente aperçue en Europe de l’est qui tenait deux révolvers. Une scène qui a inspiré le non-moins cynique "Mr Shades".
Cette discrétion, Sophie Hunger la porte tout au long de son set, pendant lequel elle va alterner entre chansons calmes et plus rythmées, en anglais ou en allemand, jusqu’à une fabuleuse reprise du titre "Le vent nous portera" de Noir Désir, en français, donc. L’adaptation d’un titre très célèbre qui capte toujours un public sous le charme de la magie noire opérée par l’orchestration mélancolique de Sophie Hunger et de ses musiciens. Après deux rappels, et deux titres successivement de l’ancien et du nouveau répertoire de la suissesse, c’est "Like a Rolling Stone" de Bob Dylan que le quintet réinterprète, dans le respect quasiment absolu de sa forme initiale, en gardant l’esprit rock et folk du titre quadragénaire.
Et lorsque sonne la fin du concert, le groupe s’avance pour chuchoter un morceau, en acoustique, chaque membre assis sur le rebord de la scène, avec ou sans instrument. Une immersion du groupe au cœur de son public, du public au cœur du groupe, une osmose parfaite, pour dire au revoir presque individuellement à chacune des personnes présentes pour applaudir avec ferveur une dernière fois Sophie Hunger, autant qu’elle l'a mérité ce soir là ...
Set-list :
Die Fahrende
Shape
Drainpipes
House of gods
Mr Shades
Boat is full
Walzer für niemand
Musician
Round and round
City lights
Le vent nous portera
Rise and fall
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Hotel Belfort
Monkeys
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Like a Rolling Stone