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Ty Segall Band
Slaughterhouse
Produit par
1- Death / 2- I Bought My Eyes / 3- Slaughterhouse / 4- The Tongue / 5- Tell Me What's Inside Your Heart / 6- Wave Goodbye / 7- Muscle Man / 8- The Bag I'm In / 9- Diddy Wah Diddy / 10- Oh Mary / 11- Fuzz War
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Une fantaisie hyperactive, un look d'étudiant en vacances de scolarité avec une attitude punk complètement décalée, Ty Segall a vraiment l'air de savoir tout faire sans se prendre au sérieux. Pour preuve, les ballades lo-fi de son dernier album solo et son ultime méfait avec White Fence ne sont déjà plus d'actualité puisque c'est avec son band de tournées qu'il s'est aventuré à marier les Stooges avec Hawkwind et Black Sabbath ! Le trublion de San Francisco avait son idée sur le sujet : "j'ai voulu faire un album très heavy, une sorte de... evil space rock". Le pari est effectivement tenu, Slaughterhouse sonne bien plus "harder and louder" que ses précédents opus.
Ty Segall saisit ici toutes les opportunités pour nous flinguer de réverbérations, de larsens et de distorsions en s'éclatant à pulvériser quelques murs du son à travers des morceaux condensés. La menace est tout de suite mise à exécution avec "Death" où seul un refrain plus mélodique soulage une avalanche grungy-psyché-punk. Avec ses cris meurtriers et son allure souterrainement animale, la bien nommée chanson-titre fait encore moins de quartiers et il faut attendre "Tell Me What's Inside Your Heart" pour que le calme s'installe un peu avec des effluves plus rock'n'roll qui rappellent les débuts des Beatles. A l'image des Thee Oh Seees, ses potes de Frisco, Ty Segall a la particularité de combiner un rock sale et poisseux avec de charmantes mélodies vocales. Ce n'est pourtant pas le cas dans la lancinante "Wave Goodbye" où une lourdeur proche du Sabbath est accompagnée par une rythmique martelante.
Plus loin, le rock'n'roll devient définitivement crasseux avec la claustrophobe "The Bag I'm In". Ty Segall se condamne à y faire un maximum de bruit pour tenter de s'en extirper. Comme lors de la très sauvage et libre interprétation de "Diddy Wah Diddy" (Bo Diddley et Captain Beefheart) qui donne lieu à deux phrases libératrices innocemment lâchées par Segall : "Fuck this fucking song" et "I don't know what we are doing". Cela paraît pourtant on ne peut plus clair avec "Fuzz War". Pendant plus de 10 minutes, un carnage de fuzz et de larsens enchevêtrés, ponctué par quelques roulements de tambours, vient renforcer l'idée que Ty Segall a conceptualisé cet album jusqu'à l'extrême.
Avec la seule envie de s'amuser en ravivant la démesure de quelques idoles d'antan, Ty Segall et son band jouent avec l'urgence et la spontanéité. S'ils s'échappent d'un garage punk plus calibré c'est pour pour mieux atteindre leur but : s'éclater en martyrisant nos tympans avec des riffs d'un autre temps. Par certains côtés, surtout dans l'esprit, Ty Segall peut faire penser à Kurt Cobain mais heureusement pour lui Slaughterhouse n'aura pas le succès commercial de Nevermind. Rien qu'avec la pochette de cet album il a pris un malin plaisir à faire en sorte que ça n'arrive pas.