Scarve
Irradiant
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1- Mirthless Perspectives / 2- An Emptier Void / 3- Irradiant / 4- Asphyxiate / 5- HyperConscience / 6- The Perfect Disaster / 7- Molten Scars / 8- FireProven / 9- Boiling Calm
A l'instar d'Opeth, Scarve fait partie de ces formations qui sont arrivés à redonner de la fraîcheur à un genre considéré comme extrêmement renfermé sur lui-même : le Death Metal. On a tous en tête les clichés inhérents à ce style : riffs mitraillettes de guitares sous accordées, blast-beats de batterie avec une bonne dose de double grosse-caisse pétaradante, un soupçon de textes pas très intelligents, et bien sûr la fameuse grosse-voix-d'outre-tombe-qui-fait-peur-à-ta-mère.
En gardant quelques canons du genre, tout en s'éloignant des clichés, Scarve enrichit son métal extrême de structures complexes et d'atmosphères envoûtantes, exécutées par des musiciens hors pairs qui mettent leur virtuosité au service de leur démence. Et ce qui n'est pas négligeable dans l'affaire, c'est que ces gars-là ne sont ni scandinaves, ni américains, mais français et originaires de Nancy.
Troisième galette du groupe, Irradiant est bien plus qu'une confirmation, c'est un chef d'oeuvre à tous les niveaux. Artwork hyper soigné, textes ciselés au scalpel, et surtout une production au millimètre de Daniel Bergstrand (Meshuggah, Soilwork...) qui sublime le talent et la maîtrise de tous les membres du groupe, à commencer par le batteur. Véritable phénomène de puissance et de technique, Dirk Verbeuren se démarque de la plupart des autres batteurs de Death ou de Black-métal, par les nuances de son jeu et la sonorité acoustique de son kit de batterie. Ainsi dès les premières secondes de "Mirthless Perspectives" ou de "Irradiant", on est pris à la gorge par ses breaks assourdissants, et dans les passages plus mid-tempo, le travail tout en subtilité effectué sur la double et les cymbales est encore plus surprenant. Les guitaristes ne sont pas en reste, bien au contraire : côté rythmique, les aficionados de "shred" seront servis. Ce qui ne va pas dire que les mélodies soient sacrifiées sur l'autel de la technique : les guitares se font tantôt menaçantes, tantôt envoûtantes et hypnotiques (cf. le début de "HyperConscience") ou versent carrément dans la furie ("An emptier Void"). Les soli sont superbement inspirés, d'autant que Sylvain Coudret les place avec une précision et une pertinence bluffantes, ce qui est plutôt rare dans le Death. En guest star pour le solo de "Asphyxiate" : Fredrik Thordendal de Meshuggah, qu'on sent d'ailleurs comme une influence majeure pour le groupe, avec Strapping Young Lad, Death et Cynic.
L'autre originalité de Scarve réside dans la présence de deux chanteurs-hurleurs, l'un spécialisé dans les hurlements Death "classiques", le deuxième chantant en voix claire ou en voix saturée. Cette complémentarité était beaucoup plus évidente dans les précédents albums, la voix claire de Guillaume Bideau se faisant plus rare dans Irradiant. En voix saturée, celui-ci fait des merveilles, et à l'écoute de "Perferct Disaster", on se surprend à penser au chanteur de Linkin Park, testostérone en sus et mièvreries non comprises. Bien plus qu'un simple groupe de Death-metal, Scarve parvient à transmettre des émotions (malsaines vous vous en doutez), qui cadrent bien avec les thèmes apocalyptiques et la sémantique de souffrance dont les textes sont truffés.
L'édition limitée d'Irradiant comprend deux titres supplémentaires live, dont la qualité sonore est plutôt moyenne, ainsi qu'une intéressante partie multimédia contenant entre autres les clips de "Mirthless Perspectives" et "Emulate the Soul".
En définitive, Scarve dépoussière sérieusement un sous genre bien souvent raillé, et illustre parfaitement le renouveau du métal extrême français. Oubliez donc les clichés satanistes et l'imagerie gothique à deux centimes, et tentez l'expérience Irradiant...