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Critique d'album

Periphery


Juggernaut : Alpha


(27/01/2015 - Sumerian Records, Century Media Records, Roadrunner - Djent - Genre : Hard / Métal)
Produit par Misha Mansoor, Adam Getgoos

1- A Black Minute / 2- MK Ultra / 3- Heavy Heart / 4- The Event / 5- The Scourge / 6- Alpha / 7- 22 Faces / 8- Rainbow Gravity / 9- Four Lights / 10- Psychosphere
Note de 3.5/5
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Note de 3.5/5 pour cet album
"Première salve compacte d'un diptyque conceptuel aérien, sérieux et puissant."
Etienne, le 15/12/2015
( mots)

S'il y a bien un groupe des plus prolifiques dans le metal moderne, c'est Periphery. Depuis 2010 et la sortie de leur premier effort éponyme, les gars de Washington ont sorti deux albums, dont un double dont il est question ici, et deux EP, soit un disque chaque année à l'exception de l'année 2013. Pour cause, face au succès de leur deuxième album, II: This Time It's Personal, et aux obligations promotionnelles incombantes au brio de ce deuxième effort, Misha Mansoor et sa bande ont retardé la sortie de son successeur prévu pour 2013 justement. Du coup, un EP à l'artwork transparent ultra classe a vu le jour, Clear EP, comportant 7 chansons propres à chaque membre de la formation américaine. Vous me direz, c'est sûr qu'avec 7 gus (et pas des manches qui plus est) c'est facile de sortir des albums à la pelle. Halte là, on vous arrête tout de suite. Sortir un peloton d'albums c'est une chose. Sortir chaque année un effort qui vaut particulièrement le détour, c'en est une autre. Et d'ailleurs, Slipknot a beau compter 9 membres, il n'a sorti que 5 albums en 15 ans. Et oui, on ne peut pas jouer au golf cigare à la bouche toute la journée et composer de la vraie bonne musique en deux temps trois mouvements, ce que les masqués de Des Moines ont sciamment arrêté de faire depuis Iowa. Mais ceci est un autre débat. Toujours est-il que Periphery est un groupe sérieux, des vrais bûcheurs qui proposent avec Juggernaut: Alpha & Omega un double album concept grandiloquent des plus réussis, réunissant à la fois la puissance viscérale des premiers efforts et la maîtrise sonore de ces EP intriguants.


Malgré ces albums réunis sous la houlette de l'appelation Juggernaut, Alpha et Omega sont bel et bien deux disques bien distincts, qu'il conviendra d'acheter de manière séparée chez le disquaire. Une continuité de l'artwork est à noter, fort heureusement, et le choix des couleurs (rouge-orangé pour Alpha et bleu-vert pour Omega) renforce la dualité et la complémentarité de ces deux volumes. On pourrait bien sûr évoquer l'incroyable palette sonore du groupe qui transparait limpidement à l'écoute du Juggernaut dans son intégralité, mais la claque reçue à l'écoute d'Alpha est telle qu'un décortiquage en règle s'impose pour le premier chapitre de cette épopée tourmentée qu'est l'écoute du double-album ambitieux de Periphery.


Le groupe de Washington est difficilement classable même si la plupart des critiques et spécialistes s'accorde à apparenter Periphery à du metal progressif en raison de la complexité des structures de ses morceaux. Au-delà de ce simple constat logistique, Misha Mansoor, Jake Bowen et Mark Holcomb, les trois guitaristes du groupe, s'emploient à ajouter des techniques empruntées au style "djent" plébiscité notamment par Meshuggah: armés de guitares à sept ou huit cordes faisant résonner des accords profonds et graves (souvent en La), les phrasés sont rapides et fluides, les rythmiques étouffées et syncopées, les solos virtuoses. En tous ces éléments, Periphery va chercher une signature unique appuyée par le chant binaire de Spencer Sotelo qui alterne les couplets chantées avec une hargne douce, presque sussurée, et des refrains hurlés sauvagement, transperçants de puissance. Sur Alpha, c'est dans "The Scourge", longue pièce sophistiquée qu'il faut voir toute la virtuosité du combo au cours d'un long crescendo mélodique s'achevant sur un phrasé de guitare épique et le "Survive" mémorable de Sotelo. On notera que Matt Halpern, batteur colossal du groupe, est absolument déchainé sur ce morceau, qu'il soutient avec un son écrasant de profondeur et un placement subtil, la quintessence même du jeu de batterie moderne. Voilà un groupe qui semble bien décidé à envoyer le bois coûte que coûte.


Quoi qu'à l'écoute du morceau d'ouverture de l'album, l'aérien et psychédélique "A Black Minute", on pourrait croire que Periphery a lâché du leste en comparaison de ces précédents efforts, déjà réputés pour être oppressants de rythmes et de distorsion. La douceur suave, presque infantile des arrangements et des mélodies de Sotelo emporte avec brio l'auditeur dans des limbes lumineuses qui s'obscurcissent à mesure que les couches musicales s'épaississent et s'agglomèrent. Assumant la direction artistique conceptuelle marquée de ce nouvel effort, le groupe revient l'espace de quelques couplets à ce morceau d'ouverture durant "Psychosphere", plus long et dernier morceau du disque: "Silence is bringing on the heart-attack" se calque mélodiquement sur son antithèse lyrique "Our voices echo on the quiet night". Une dualité de sens symbolique qui n'occulte aucunement les qualités d'auteur de Sotelo, qui voit dans ce double-album ses mots portés aux nu et clairement plus impactants que dans tous les précédents efforts du groupe. Periphery se frotte même à des expérimentations sonores ambiantes pesantes d'amplitude sonore dans l'intrumental "The Event", éventail quasi exhaustif des trouvailles musicales du groupe. En somme, de belles variations incrustées dans cet album incisif qui dévoile ses subtilités avec une certaine paresse.


Malgré ces qualités indéniables et ses intentions plus que louables, Periphery ne peut éviter quelques écueils des plus dommageables, notamment en terme de répétitivité et de violence exacerbée. Pour un non-initié, les constructions alambiquées et la signature sonore très marquée d'Alpha auront raison des moins patients qui verront dans Periphery des braillards un peu moins thrash qu'à l'accoutumée (en cause, un son de guitare aux multiples effets, très travaillé et donc moins brut de décoffrage). On ne pourra que leur donner raison à l'écoute d'un "Rainbow Gravity" poussif, épuisant de vitesse, où Sotelo frise la caricature grotesque d'un certain Chester Bennington. "MK Ultra", deuxième morceau du disque verse lui aussi dans cette ultra-violence avec des guitares abyssales et des phrasés à l'octaver disonnants à souhait, mais bénéficie d'une durée ajustée à ce type de morceaux (moins de 2 minutes) et d'un final jazzy improbable qui fera sourire autant qu'il démontre encore une fois la qualité des variations sonores du groupe. "Rainbow Gravity" est en plus suivi d'un instrumental sans saveur, " Four Lights", qui est bien loin de faire la part belle à toute le catalogue technique des musiciens de Periphery. Ce raté contrariant est indéniable mais est très loin d'être aidé par les titres qui le précédent, qui se voient être des purs moments de grâce alliant sans mal virtuosité et efficacité à des fins de hit en puissance. Oui, en puissance...


Là où Alpha est une grande réussite, c'est dans la directivité linéaire de ses mélodies impactantes qui doit énormément aux progrès faits par Sotelo au chant. "Heavy Heart" possède un refrain imparable là où "22 Faces" est pourvu d'un pont splendide, seul point nécessaire à une adhésion totale au morceau s'il en est. Mais là où Periphery outrepasse ses prérogatives et surpasse son processus habituel de composition, c'est sur le titre éponyme de ce disque, mélange impeccable de refrain endiablé et de textures sonores majestueuses. 


"Stop bleeding on the inside, we are alive
And it's more than enough to paint the walls that are white
Can we show the ones who are blind ?"


Voilà le refrain intrusif de Periphery, celui qui prend possession de tout l'espace cérébro-cérébelleux capable de distinguer un grand moment de musique. Au-delà de cette efficacité notoire, les guitares sont malicieuses même si des plus lourdes, la batterie est éléphantesque même si chirurgicale, les mots sont puissants même si éloquents, le morceau est magistral même si loin des codes du genre.


A l'image de son titre éponyme, Alpha est une oeuvre triomphante, l'aboutissement d'un groupe acharné, une collection de titres étonnants, puissants et détonnants au profit d'un disque bien construit et particulièrement réfléchi. La première salve compacte de Juggernaut est une réussite indéniable, entachée de quelques faussetés mais qui trouve dans son paradoxal doublet une complémentarité idéale, tant celui-ci est plus expérimental, plus progressif, plus étrange. S'il y a bien une qualité commune à ces deux disques (Alpha et Omega), c'est l'innovation qui transpire à chaque note, chaque arragement, chaque mélodie. Il y a fort à parier que Periphery soit bel et bien le futur du metal.


Chansons conseillées: "Alpha", "The Scourge" & "A Black Minute".

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