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Mademoiselle K
Hungry Dirty Baby
Produit par
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"Ma maison de disques m'a dit : "Fais ton album en français, sinon on te vire". J'ai fait mon album en anglais..."
Sur les différents médias, cette info relayée donne le ton de ce que la dernière icône du rock français nous prépare.
Mademoiselle K, groupe qui a enchaîné les succès depuis quelques années, a décidé de claquer la porte au nez de sa maison de disque pour pouvoir mener à bien son projet musical. Cette initiative courageuse, mais également ses conséquences, nous montrent toute l'emprise que les maisons de disques exercent sur les groupes, ces derniers n'étant plus réellement libres de leurs choix.
Retour à la case départ, et sans toucher les 20 000, peut-être même en rendre quelques uns pour rupture de contrat. Tel est le sort à assumer pour jouer sa musique : " Pour la gloire, je préfère lécher des barreaux plutôt que des culs ". Pour faire connaître ses nouveaux morceaux, le groupe décide alors de faire le tour de France, laissant la petite reine pour un gros camion de déménageurs. Zéro roadie, effectif minimum, prêts de guitares, bref, on est loin de l'opulence des majors. Mademoiselle K a perdu beaucoup de plumes, mais a gagné en énergie et en rage. Des shows d'une intensité folle, malgré des setlists composées à 90% de titres inconnus en provenance de Hungry Dirty Baby pas encore enregistré !! Mademoiselle K est une bête de scène !
La sortie de l'album est l'occasion de réécouter ces titres et d'y porter une oreille attentive. Il faut avouer que les premiers mots ont une accroche difficile. C'est surtout le cas sur "I can ride a fucked up bull", et son style cyberpunk. Mais, connaissez-vous beaucoup de groupes qui convainquent dès la première écoute ? Queens Of the Stone Age, Led Zeppelin, Pixies, Radiohead, Nirvana, Black Sabbath, Sonic Youth, Bob Dylan... Tous ces groupes (la liste est non-exhaustive) ont ce point en commun qu'un petit quelque chose dérange dès les premières notes, mais rapidement cette gêne se transforme en atout. C'est le cas de Hungry Dirty Baby. L'anglais comme moyen d'expression, c'est pour mademoiselle Katerine une façon de dire des choses quand elle n'a rien à dire. "J’ai fait un album en anglais parce que j’ai rien à dire comme mes héros : David Bowie, The Cure, Radiohead." A la lecture des textes il semblerait qu'on se situe dans le subconscient : les évocations d'images, les lapsus, les métonymies... Bref, un album plutôt intimiste, avec des pensées personnelles en filigrane. C'est d'ailleurs assez amusant d'imaginer ceci sous cet angle, car notre subjectivité vient se confronter aux mots d'un(e) autre. Nous nous laissons alors envahir par notre vie, nos émotions, et les transposons sur celles de l'auteur. Celui-ci nous paraît alors plus humain, départi de son statut d'icône, et ça aussi c'est rock'n'roll ! L'anglais n'est donc pas une barrière, il est une alternative à l'expression.
Là où Mademoiselle K excelle, c'est dans la composition. Cet album est une déflagration rock, un "summer of love" paru en hiver. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle cette chronique sort aujourd'hui. Pour apprécier cet album, il faut une matinée d'été, une de celles qui suivent une longue soirée en bord de plage avec ce qu'il faut de sorties nocturnes. "Glory", le premier extrait de l'album à avoir été entendu, a un "je ne sais quoi" de Rock 80's, entre The Clash et les Rita Mitsouko. "R U swimming" est un vrai single, la mélodie est accrocheuse, le rythme est adapté, on se plaît à nager dans nos émois adolescents. Les titres sont à la fois d'une énergie rock et d'une puissance pop. L'album ne déçoit pas, il a un grain particulier qui en fait une pièce unique. On se retrouve avec "Someday", "Walk of shame", "Ur wow" et "Morning song" à verser dans des méloppées qui ramèneront l'auditeur vers son histoire. Une place toute particulière mérite d'être faite à "Watch me". Ce titre recèle un potentiel important et n'a pas encore été exploité en clip/single. Il est basique mais résolument rock, une bombe en concert, un titre fédérateur qui fait bouger par une invitation conjointe de la voix et de la basse.
L'accueil de cet album, par le public, n'a pas toujours été enthousiaste. Je suis conscient qu'il ne fera pas l'unanimité, mais si vous vous donnez la peine de le laisser tourner une deuxième fois, vous aurez compris le propos de cette chronique.
Remember me. It's 10 A.M. You wake up, night's been so long. Put on your mp3 reader. Just push "Play" ! Enjoy !