Little Dragon

Pour l'arrivée de ce troisième opus dans nos contrées, on peut dire que Little Dragon avait fichtrement bien préparé le terrain. Deux featurings avec Gorillaz sur Plastic Beach, ainsi que les premières parties des concerts de la dernière tournée du collectif de Damon Albarn, avaient donné envie à de nombreux fans de jeter un oeil sur Machine Dreams, deuxième album du groupe, récemment réédité en France. La tempête Little Dragon avait rapidement fait des émules, et, lors des concerts organisés dans l'hexagone afin de présenter Ritual Union, chacun avait pu observer qu'il n'était pas le seul fan venu acclamer une Yukimi pleine de paillettes et d'énergie, en suant et en hurlant avec zèle devant la formation.

Dans cet album, Little Dragon a mis tout ce qui nous avait plu dans les deux premiers albums, et plus encore : il a affuté son style avec précision, et Ritual Union semble ainsi auréolé d'une originalité et d'une singularité plaisantes. Cependant, ce style Little Dragon ainsi affirmé peut faire peur au premier abord, et l'album semble plus difficile d'accès que le précédent. En cause, peut-être, des morceaux plus électro, un peu moins pop et soul, et des rythmes flirtant parfois avec le simple, le dépouillé, dont il sera parfois difficile de s'imprégner et de comprendre la subtilité. En outre, Yukimi confiait à Albumrock, en novembre dernier, que ce troisième album aurait des influences sud-africaines. Et en effet, cela se sent sur des morceaux comme "Summertearz". La batterie et les arrangements électroniques variés de Håkan mènent la danse, et c'est la magnifique voix soul de la chanteuse Yukimi qui vient humaniser le tout. Des titres légèrement difficiles d'accès, donc ? "Please turn", à titre d'exemple, pourra effrayer, manquant de profondeur à première vue, mais recelant d'arrangements intelligents au fil des écoutes. Parfois, cependant, on pourra regretter que certains titres ne soient pas plus évidents, plus immédiatement efficaces ("Summertearz"). Certains morceaux cependant sont plus facile d'accès, et leur efficacité et leur qualité sautent vivement aux yeux, comme "Ritual Union" ou "Little man", dont le rythme est tellement prenant que le titre était déjà acclamé par le public avant même que le CD ne soit disponible.

L'album est nimbé d'une ambiance urbaine nocturne, comme une balade sous les lampadaires avec Yukimi ("Crystalfilm") ou une virée dans un taxi dans la solitude de la ville sous les étoiles ("When I go out"). Voilà le genre de paysages, pas vraiment bucoliques, que pourra inspirer cet album, parfois sombre, souvent dansant, et très moderne.

Ritual Union se singularise par des mélodies plus brutes et plus dures d'accès, mais réalisées à la perfection. L'album file du début à la fin avec tant de fluidité qu'on est tout étonné quand il se termine. La voix de Yukimi reste un régal. Il faut aussi noter que sur scène, cet album (et tous les autres titres de la formation) gagne une profondeur incroyable, et la présence et l'énergie de Yukimi sont à trembler de plaisir. Dans son genre, Little Dragon semble être, avec cet album, un véritable orfèvre de la musique électronique.