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Critique d'album

Green On Red


Here Come the Snakes


(07/07/1989 - Empire Music Ltd - Country - Genre : Rock)
Produit par

1- Keith Can't Read / 2- Rock N' Roll Disease / 3- Morning Blue / 4- Zombie For Love / 5- Broken Radio / 6- Change / 7- Tenderloin / 8- Way Back Home / 9- D.T. Blues / 10- We Had It All
Note de 4/5
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Note de 4.0/5 pour cet album
"Quand les égouts américains régurgitent un album grandiose oublié de tous."
Pierre D, le 11/12/2010
( mots)

Je sais ce que ça va brailler : "Encore un groupe oublié des années 80. Cette décennie maudite, ces années troubles auraient vu naître plus d’albums majeurs que les années 2000 et leur retour du rock bande-mou. Z’en avez pas marre de jouer les détrousseurs de cadavres ?". Certes, certes. Cela dit avec Green On Red on se trouve face à une injustice sans commune mesure. Alors oui, ce groupe fait bien partie des "groupes oubliés des eighties". Alors oui, tandis que MTV ressassait Madonna, Prince, INXS ou Michael Jackson, la résistance rock'n'roll (ardemment défendue en son temps par Laurent Chalumeau ou Philippe Garnier dans les pages de Rock & Folk) s’organisait, notamment aux Etats-Unis où les Fleshtones, les Plimsouls ou le Gun Club défendaient le fort du rock déserté par le grand public. Mais si aujourd’hui chaque réédition d’inédits déjà publiés du Gun Club fait la une des canards et la joie des plumitifs, il est semble-t-il impossible de trouver la moindre trace de Green On Red dans la presse ou sur la toile. Quelques chroniques sur xsilence.net, quelques références sous la plume de Nicolas Ungemuth, un seul album correctement réédité (celui-là même dont il est question dans cette chronique) et… nada. Que dalle. Tablatures inexistantes, paroles de chansons inscrites aux abonnés absents. Même les disques sont à peu près introuvables, à l’exception de quelques vinyles d’occasion souvent bien trop chers. Téléchargez illégalement les enfants, il n’y a que comme cela que vous pourrez vous faire une idée du talent de cette 58ème merveille du monde (après la main droite de Keith Richard, ma future copine, etc).

Ironiquement, cet unique album de Green On Red disponible dans le commerce (dans une édition décente, s’entend) ne compte que deux membres de sa formation originale. En effet, le groupe naît au début des années 80 et se trouve affilié à la scène Paisley Underground (en gros un revival psychédélique tendance Byrds/Doors/Love) qui se forme à Los Angeles avec des fers de lance tels que The Dream Syndicate (dont le leader Steve Wynn produit le premier EP de Green On Red Two Bibles). Après deux albums finalement assez inintéressants (mais qui peut, passé l’âge de 18 ans, encore supporter les Doors et leur orgue carnavalesque ? Alors imaginez cet orgue envahissant joué par un émule de Ray Manzarek), l’arrivée du guitariste Chuck Prophet propulse le groupe vers les proverbiaux sommets et il torche un Gas Food Lodging foutrement roboratif, rétro comme il faut (une reprise de l’hymne contestataire "We Shall Overcome" en guise de conclusion, ça se passe de commentaires). Après plusieurs albums moins flamboyants, le groupe se sépare puis se reforme. Mais peut-on parler de reformation quand seuls le chanteur (Dan Stuart) et le guitariste (Chuck Prophet) montent à bord ? Bof, après tout, The Who tourne encore sous ce nom avec pour seuls vestiges un chanteur aveugle et un guitariste sourd. Toujours est-il que les deux junkies en question partent pour Memphis et les studios Ardent (où Big Star, autre grand groupe oublié mais des années 70 cette fois, a accouché de quelques chefs-d’œuvre) retrouver le producteur Jim Dickinson. Dickinson, encore un qui mériterait plus de reconnaissance. L’architecte du chaos. Le sauveur des groupes en perdition. Son travail de producteur offre au groupe (Stuart, Prophet et plusieurs musiciens de studio) un son parfait qui évite tous les clichés eighties (batterie sonnant comme une boîte à rythmes, synthés malvenus) et un passeport pour l’éternité. De même qu’il a su magnifier le Saint Bordel du 3e album de Big Star et du 1er album solo de son leader Alex Chilton, Dickinson pousse Stuart et Prophet dans leurs derniers retranchements, leur permettant de sortir quelques-unes de leurs meilleures compositions.

Ces morceaux en descendance directe des Stones période Exile On Main Street donnent à Chuck Prophet l’occasion de faire une démonstration de guitare à l’usage des générations futures. Certains, dont Ungemuth, n’hésitent pas à le qualifier de "plus grand guitariste de sa génération", ce qui n’est sans doute pas faux. Pour vérifier cela, écoutez le solo de "Change", merveille de simplicité débarrassée des techniques masturbatoires des excités de la six-cordes qui sévissaient alors (vous les écoutez encore vous, les hard rockeux façon Iron Maiden ou Van Halen ?). Simplicité aussi quand il s’agit des textes de Stuart, sans doute un des paroliers les plus sous-estimés. En même temps, difficile d’accorder la moindre valeur aux paroles d’un groupe aux disques introuvables. Le chanteur retourne à la source folk/blues/country, lançant des vers cinglants d’une justesse qu’on ne retrouve que dans les meilleures pages de Bukowski. Un exemple ? “In the middle of nowhere/A woman waits alone/She thought she found the answer/But her man ain’t comin’ home”. Dan Stuart interprète ces morceaux de sa voix enfantine et méprisante, croisement entre celles de Tom Verlaine et de Neil Young (dont l’influence est plus qu’évidente sur des titres tels que "D.T. Blues"). Mais les pairs de cet album ne se limitent pas au monde du rock n’ roll proprement dit puisque la seule reprise incluse sur le disque est celle du phénoménal "We Had It All" du musicien de country Waylon Jennings, reprise déjà mise en boîte par Keith Richard lui-même. "We Had It All", précieuses 2’56’’ où la tendresse la plus pure s’échappe de la voix de Stuart tandis que Prophet achève le cœur déjà endolori de l’auditeur avec quelques notes de slide guitar sorties du fin fond de l’âme. La meilleure chanson pour chialer tout seul dans sa piaule au beau milieu de la nuit parce que l’amour s’est fait la malle en emportant tout sur son passage ? Oui, sans aucun doute.

Attention, dit comme ça on pourrait croire avoir affaire à un disque de maniaco-dépressif tendance suicide en avalant une bouteille d’encre. Il n’en est rien, Green On Red ayant l’intelligence de renverser cette tendance. Comme chacun sait, le rock'n'roll est affaire de tensions. Entre les membres du groupe (ôtez le fiel du tandem Jagger/Richard et vous obtenez…quoi, au juste ?), entre le groupe et le monde extérieur, etc. Here Come the Snakes s’articule quant à lui autour d’une tension entre les chansons rock n’ roll géniales et volontairement stupides ("Keith Can’t Read") voire les faux hymnes ("Change") d’une part, et ces morceaux rock country perpétuant l’héritage de Hank Williams d’autre part ("Broken Radio"). Résultat, on se retrouve embringué sur des montagnes russes émotionnelles, dans un équilibre perpétuellement rompu et rétabli et dont on ressort épuisé, essoré, sans trop comprendre ce qui vient de se passer.

Alors est-ce faire œuvre de salut public que de parler de Green On Red ? A l’heure où tout est disponible en un clic, pourquoi ce groupe n’est-il pas correctement réédité ? Reste le téléchargement, car la discographie complète numérisée de Green On Red peut être dénichée sans problème sur Internet. Après ça, comment voulez-vous continuer à acheter des disques ? L’absence de Green On Red, responsable de l’effondrement du marché de la musique ?

Commentaires
Lateigne, le 26/05/2020 à 11:03
Il y a longtemps que je n ai plus 18 ans ( puisque jeune retraité) pourtant j écoute toujours très régulièrement les Doors et les claviers de Manczarek : ce qui m intéresse dans Green on Red c'est justement ce son de claviers orgue Farfisa ou Vox : sinon j ai trouvé cet article intéressant : hasta la vista