↓ MENU
Accueil
Première écoute
Albums
Concerts
Cinéma
DVD
Livres
Dossiers
Interviews
Festivals
Actualités
Médias
Agenda concerts
Sorties d'albums
The Wall
Sélection
Photos
Webcasts
Chroniques § Dossiers § Infos § Bonus
X

Newsletter Albumrock


Restez informé des dernières publications, inscrivez-vous à notre newsletter bimensuelle.
Critique d'album

Delta Tea


The Chessboard


(29/02/2020 - - Rock progressif / Métal progre - Genre : Hard / Métal)
Produit par

1- Chessboard / 2- Delocalized / 3- Until Dust / 4- Share / 5- Outro
Note de 5/5
Vous aussi, notez cet album ! (1 vote)
Consultez le barème de la colonne de droite et donnez votre note à cet album
Note de 4.0/5 pour cet album
"Delta Tea livre un rock progressif aussi subtil qu'immersif et transforme son coup d'essai en coup de maître."
Olivier S, le 02/03/2021
( mots)

"On ne peut parler du temps comme d'une chose qu'on perd ou qu'on gagne. Le Temps ne veut plus rien faire de ce qu'on lui demande. Alors désormais, il est toujours l'heure du thé"
Cette citation de Lewis Carroll, éditée dans le livret du premier EP The Chessboard du groupe Delta Tea, quatuor francilien de son état, résume à elle seule  l'esprit de cette jeune formation. La volonté de rendre son univers cohérent jusque dans les associations d'idées véhiculées au sein même du nom de la formation.
La mise en relation d'un différentiel de temps "Delta T", avec l'évocation de l'heure du thé, dans la citation précitée d'Alice au Pays des Merveilles, donne clairement l'intention de départ. Proposer une expérience globale, tournant autour d'un monde parallèle, dont le différentiel de temps entre l'univers parallèle et l'univers de référence sera une problématique majeure. Et c'est exactement le pitch de ce premier EP, pensé comme un concept album dans un concept encore plus global; le groupe ayant prévu de dérouler sa narration sur plusieurs albums.

Le décor est planté, attachons-nous à décrire maintenant l'écrin sonore dans lequel va baigner ce space opéra.  
Univers métaphysique un brin dystopique (car oui, il sera question également d'un futur post-apocalyptique) organisé autour d'un concept album. Voilà qui devrait nous mettre sur la voix du style musical développé ici. Les dix premiers d’entre vous ayant répondu, "rock progressif" repartiront avec un exemplaire dédicacé de l'album The Astonishing de Dream Theater.
Et puis tant qu'on y est; en parlant de ce double concept album sur fond de dystopie, retirez le vocal (parfois mièvre), le pathos, les longueurs, les solos boursouflés, ajoutez quelques pincées d'arrangements jazzy, bluesy, funky, voire même à consonances latines et vous obtenez The Chessboard. Le comparatif est certes volontairement abusif et le trait est honteusement exagéré, mais sérieusement, Delta Tea, en seulement 33 minutes au compteur, réussit son pari de transporter l'auditeur à des millions de kilomètres dans le cosmos et surtout, surtout... sans le perdre en cours de route.

Par ailleurs, les premières minutes de "Chessboard" en ouverture (et pour pousser un peu plus loin le comparatif avec Dream Theater), donnent l'effet de retomber au beau milieu des 90 's, lorsque les sonorités de clavier d'Antoine Gehin évoquent sans équivoque la patte de John Ruddes. Ce ne sont d'ailleurs pas les solos de guitare haut perchés de Clovis Gehin lui donnant la réplique qui feront mentir ce constat. Une production somme toute très rock progressif (parfois métal), un brin old school, bien éloignée d'une scène plus moderne, (entendez par "plus moderne", plus Djent à la Haken par exemple) et qui a de quoi surprendre pour une formation de 2018. Mais ce que Delta Tea perd en modernité en s’éloignant de ses contemporains, il le gagne en se rapprochant des racines de son genre. En convoquant les nappes bluesy de Deep Purple (la respiration de mi-parcours sur "Delocalized" ), ou psyché du Pink Floyd du milieu des années 70 (les premières notes de "Chessbord", les nappes de synthé vintage sur "Share"), voire même en flirtant sur les terres lugubres de l'éponyme Sabbathien (les cloches sur l'inquiétant "Until Dust" ); il dote son space opéra rock d'un vernis patiné aussi rétro-nostalgique qu'un bon vieux 2001 L’Odyssée de l'espace de Kubrick : plutôt classe, isn't it ?

Oui, le qualificatif de "space opéra" n'est ici en rien usurpé. Comment ne pas évoquer l'un des éléments les plus surprenants sur un premier EP, auto-produit, d'une formation jeune de seulement deux ans ? La présence de chœurs typés opéra, omniprésents sur une bonne partie des titres. Non contents de renforcer la dramaturgie de certains passages épiques, ils dotent les compositions, en certaines occasions, d'un surplus émotionnel, évoquant certains des passages les plus émouvants du cinéma contemporain. Comment rester insensible sur le finish crépusculaire d' "Until Dust", digne des passages les plus poignants d'un Lord of The Rings ?

Côté technique, sans pour autant se la jouer totalement humble, le quatuor, très conscient de ses capacités assez élevées en la matière, possède la maturité de ne surtout pas confondre ses compositions avec des rampes de lancement pour poseurs frustrés en manque de reconnaissance. Non, le bagage technique de Delta Tea est toujours employé au service de la narration, car c'est elle qui sert de fil rouge aux cinq pistes de ce premier effort et c'est uniquement pour appuyer les moments les plus épiques que la débauche d'effets « spéciaux » sonores est déployée. Citons au hasard la fulgurance du solo de batterie de Kilian Beyly, avoisinant les trente secondes. Trente secondes illustrant un emballement narratif absolument jouissif et qui dans l'explosion finale sonne absolument nécessaire : du grand art. La lisibilité d'ensemble, qui s'avère cruciale pour le style défendu, est plus qu'acceptable ici. Même si la basse d'Oscar Decamps aurait mérité un léger gain au mastering pour s’aligner sur ses comparses, elle n'en reste pas moins parfaitement audible et ne rentre nullement en collision avec sa voisine à six cordes.

The Chessboard, bien que premier EP auto-produit d'une toute jeune formation, se révèle être le fruit d'un concept des plus aboutis doublé d'une maturité étonnante. Le quatuor livre un premier jet d'une incroyable richesse narrative et parvient à transporter l'auditeur dans les hautes sphères d'un imaginaire sans bornes. L'immersion dans les péripéties narratives est si totale, qu'elle parvient même à faire totalement oublier les attributs techniques de ses protagonistes.
Un cas d'école de ce que la musique devrait toujours être : une technicité au service d'une vision supérieure.

Commentaires
Alexx, le 17/03/2021 à 15:36
Très bonne découverte, merci !