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Critique d'album

Cabbage


Young, Dumb and Full Off...


(06/01/2017 - Skeleton Key - Rock alternatif - Genre : Rock)
Produit par James Skelly

1- Uber Capitalist Death Trade / 2- Fickle / 3- Tell Me Lies About Manchester / 4- Free Steven Avery (Wrong America) / 5- Necroflat in the Palace / 6- Indispensable Pencil / 7- Grim Up North Korea / 8- Dissonance / 9- Terrorist Synthesizer / 10- The Road to Wigan Pier / 11- These Boots Are Made for Walkin' / 12- Because You're Worth It
Note de 4.5/5
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Note de 4.0/5 pour cet album
"A l'échelle de Manchester : épicentre enflammé d'une protestation délurée"
Hugo, le 18/12/2019
( mots)

Peut-on faire plus anglais que ça ? Une bande de joyeux délurés hurlant la fin du monde dans une tempête alphabétisée de soupe à la tomate. Un Sid Vicious en plein trip façon Trainspotting à la sauce no future. Richter chute face aux tremblements des successeurs détraqués du Madchester : le temps est désormais à l'échelle de Manchester, épicentre enflammé de la protestation outre-Manche.


Joe Martin s'imaginait d'abord en poète. Arpentant inlassablement les sentiers du comté du Greater Manchester, il soufflait des strophes sur les braises d'une folie colérique et moderne. A l'instar de Jim Morrisson et de Zach de la Rocha, la plume ardente et les performances de Martin ne tombèrent pas dans l'oreille de sourds. Ces derniers étaient même musiciens et, dans les trois cas, une énergie fiévreusement émancipatrice est née de cette alchimie artistique et revendicative.


Sciemment à côte de la plaque, le gang mancunien cultive une image de mods cabossés, cheveux mi-longs et moues déconfites. Mais leur regard hagard ne saurait faire croire à une quelconque apathie. Pour s'en assurer, il suffit de voir la pochette de l'EP, sorti en 2016, qui a principalement influencé cette compilation, Uber Capitalist Death Trade : des cadavres cravatés sur un fond blanc cramé. Constat angoissant, ou appel inquiétant ? Force est de constater que le groupe semble avoir basculé dans une obsession nihiliste ayant pour seule expression un fantasque furieux et homérique. Comme se tartiner le torse d'un symbole de l'Angleterre populaire, l'épaisse tomato soup, ou appeler la foudre à s'abattre sur une célèbre entreprise.


Arme de dérision massive, "Uber Capitalist Death Trade" propose une exaltation surexcitée en guise d'entrée. Les guitares sont instables, le rythme insoutenable alors que les cris paranoïaques font croire que le duo Joe Martin-Lee Broadbent s'en rapporte à un démon à crête et à clous. L'ennemi est clairement pointé du majeur : un monde automatisé et standardisé. Le même que celui de "Fickle" où les loosers bagarreurs, gouailleurs et fatalistes lèvent aussi le voile sur le mystère du nom de la bande, « chou ». Effectivement, le légume, vous avez bien compris. Philosophie de l'absurde de cette entité au teint verdâtre qu'est Cabbage, qui s'efforce également, sous ce nom, de garder une simplicité franche et à contre-courant. Loin de vouloir pérorer sur les causes et conséquences de la gouvernance américaine actuelle, les Mancuniens y vont d'un franco :"Death to Donald Trump, there's something about politics in America". L'Oncle Sam rougit de cette concision confondante et des harangues à la libération de Steven Avery, mais ne peut s'empêcher de taper du talon sous les airs simulés de country classique. L'intemporelle monarchie britannique n'est pas en reste, écorchée dans le vociférant "Necroflat In Palace". La basse ronde de Stephen Evans s'emboîte ici impeccablement avec les fûts d'Asa Morley, le duo rythmique livrant des prestations épurées et efficaces pouvant se fondre aisément dans le tourbillon exubérant des guitares et voix. Un exemple éclairant est celui de "Dissonance", morceau reflet d'un rock alternatif dont le mot d'ordre demeure la spontanéité. Sans ambages, donc, mais légèrement groovy aussi, tel les Arctic Monkeys encore adolescents, avec "The Road to Wigan Pier", ou fanatique criard avec ses vagues de riffs hard rock dans "These Boots Are Made for Walkin'". Face à toutes ces déclinaisons, l'écoute du Cabbage est ainsi l'occasion d'un chemin auditif déroutant mais définitivement halluciné.


Aussi, Serge Gainsbourg n'avait-il pas prophétisé que l'homme pouvait avoir une tête de chou ? L'aliénation de Cabbage s'en trouve rassérénée car la bande a, de même, un cœur, et leur musique une caisse de résonance toute trouvée.« Tell Me Lies About Manchester », émouvant et remarquable morceau, parachève l'amour que le quintet porte à sa ville et apporte une nouvelle pierre à l'édifice musical mancunien magnifiquement décrit dans les paroles. Plus pondéré, "Terrorist Synthetiser" est une ballade paisiblement pugnace, drôle de mélange entre une mélodie à la Nirvana et un phrasé à la Oasis saupoudré de légers effets synthétiques de bon aloi. Les guitares sortent du giron du riff pur pour s'aventurer à des mélodies théâtrales. Cabbage explore ainsi un registre plus large : "Grim Up North Korea" réserve une route tortueuse et torturée, dans laquelle Eoghan Clifford et sa guitare mordante prennent la tête du déluge paroxystique des mugissements et sanglots. Chassez le naturel, il revient au galop, comme dirait l'adage. Sa nature agitée et fébrile, voilà la boussole de la musique de Cabbage. "Because Your're Worth It" en est une expression cinglante. Achevant la compilation, il faudra attendre ce morceau pour qu'une rage d'espoir ne se lève, comme si le temps de la douloureuse compréhension était incarnée par la basse rêveuse, les chœurs harassés et les guitares lancinantes. L'instabilité ambiante des 12 morceaux s'en trouve parfaitement conclue.


Composante d'une dernière génération britannique affligée et remuante, Cabbage a sorti Young, Dumb and Full Off... en janvier 2017, au lendemain du Brexit. Paru sur le label indépendant Skeleton Key Records, tenu par le leader des Corals, James Skelly, cette compilation magistrale de ses premières performances musicales place le quintet aux côtés des Slaves, Sleaford Mods et des Fontaines D.C., dans ce qui est une nouvelle vague échauffée et des plus passionnantes. Peut-on faire plus anglais que ça ?

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