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Critique d'album

Bruce Springsteen


Born to Run


(01/09/1975 - - Pop Rock, Heartland rock, Folk - Genre : Rock)
Produit par Springsteen, Landau & Appel

1- Thunder Road / 2- Tenth Avenue Freeze Out / 3- Tenth Avenue Freeze-Out / 4- Night / 5- Backstreets / 6- Born to Run / 7- She's the One / 8- Meeting Across the River / 9- Jungleland
Note de 5/5
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Note de 5.0/5 pour cet album
"On s’habitue aux endroits. Et c’est dur de s’en aller. On s’habitue à des façons de penser. Et c’est dur d’en changer."
Daniel, le 01/03/2025
( mots)

Stupeur...

Ceux qui ont lu la version originale du comic strip Flash Gordon d’Alex Raymond, savent que, dès la première page dominicale publiée le 27 janvier 1934 (case 24), le héros bodybuildé est agressé par un monstre préhistorique, gigantesque et verdâtre, à mi-chemin entre Godzilla et le bonhomme Cetelem.

Je me refuse à spoiler le chef-d’œuvre de Raymond, raison pour laquelle je ne dévoilerai pas la suite tumultueuse des événements. Je préfère me focaliser sur cette seule case horrifique. Parce que la perspective de chroniquer Born To Run a provoqué chez moi un effroi semblable à celui ressenti par Flash.

C’est que cet album est classé parmi les "intouchables". Parmi ces cinquante ou cent machins hyper-classieux que tous les rockers possèdent et disent adorer alors qu’ils sont légions à ne l’avoir jamais réellement écouté avec attention (1).

Les 39 minutes et quarante secondes de Born To Run sont conservées depuis 2003 au Registre National des Enregistrements de la très sérieuse  Bibliothèque du Congrès des USA, en raison de leur très haute importance culturelle, historique et esthétique.

En langage vernaculaire, ça signifie "Touche plus à ça, petit con !"

L’album est devenu une somme. Un monument. Une Mona Lisa. Un monstre verdâtre. Un Penny Black de 1840. Une relique. Le crâne de Mozart enfant.

Un truc que personne ne peut plus approcher. A la rigueur, on ne peut même plus le regarder.

Alors l’écouter...

… et tremblements

Born To Run n’est pas qu’une œuvre "musicale". Poursuivi par le fantôme de Tom Joad (qui le rattrapera plus tard dans sa discographie), Bruce Springsteen poursuit une ambition "littéraire". Il a envie de "conter". De prolonger l’immense œuvre sociale de John Steinbeck.

Avec le temps, le contexte a changé mais il n’a pas évolué. La famille Joad (2) de 1929 fuyait l’Oklahoma par la Route 66, à la recherche d’un avenir sous le soleil de Californie. Les gamins de 1975 fuient leur New-Jersey sans intérêt pour n’aller nulle part. Ou bien ailleurs. A la rigueur. Ils sont juste nés pour courir (3). Pour vagabonder. Et pour finalement se rendre compte que ce qui les attend au bout du chemin n’est pas vraiment mieux que le New-Jersey (4).

Dans cette optique, la Telecaster de Springsteen et le stylo de Steinbeck sont du même tonneau. Les livres de Steinbeck chantaient la misère post Grande Dépression des Okies. La guitare du Boss écrit la désillusion post Woodstock des petits rockers.

Il faudrait lire le disque de l’un en écoutant le livre de l’autre. Ou le contraire.

C’est triste et c’est sublime. Bouleversant.

Parce que, entre 1969 et 1974, il aura suffit d’un seul lustre (5), d’une  crise économique, d’une défaite humiliante au Vietnam et d’un quinquennat du républicain mal rasé Richard Nixon, pour que la jeunesse rock passe de "All You Need Is Love" à "Born To Run", du grand rassemblement à l’errance solitaire, de la fraternité amoureuse au chacun pour soi, de la veste à franges au Perfecto élimé, des sandales aux combat shoes, de Woodstock à Rollerball en passant par Altamont, de l’herbe de la prairie à l’asphalte de la route.

Une foutue désillusion.

Studio Sound 914

Vu comme ça, tout paraît aujourd’hui évident...

Bruce Springsteen a connu une épiphanie. C’est arrivé durant une nuit de l’hiver 1973 alors qu’il ruminait dans son lit, sous un poster de Peter Pan, chez lui à West Long Branch (New Jersey), un patelin de 7,5 km² comptant alors moins de 8.000 âmes.

La révélation tenait en un riff en Mi majeur et en seulement trois mots : "Born To Run".

Depuis cette fameuse nuit, ces trois mots faisaient résonner dans la tête du musicien des harmonies puissantes qui prenaient les accents d’un nouvel hymne américain.

Rien que ça...

En 1974, CBS commence à la trouver saumâtre. La firme attend un album et pas un single. Elle commence à s’exaspérer des caprices de ce gamin de 25 ans qui est déjà le seul responsable de deux naufrages commerciaux (6) et que l’on n’appelle pas encore The Boss.

Mais Bruce est d’une nature obstinée. Il refuse le confort des studios de Nashville qui lui sont proposés. Il ne veut pas s’éloigner de ses bases. Ce sera le Studio Sound 914 de New-York (7) ou rien. Ensuite, il entend imposer son E Street Band (8), rejetant a priori l’intervention de requins de studio.

Or, en comparaison avec les "formats rock" en vogue, le E Street Band est une absurdité. Pour un musicien sans le sou qui envisageait une carrière solo acoustique, emmener une clique pareille qu’il faut orchestrer, abreuver, loger, rassurer et nourrir, relève de l’irréflexion complète. D’autant plus que la clique en question se montre instable. Le batteur Vini Mad Dog Lopez vient d’être remercié parce qu’il ne s’impliquait pas en suffisance dans le groupe. Il est remplacé par l’incroyable Ernest Boom Carter qui n’enregistrera finalement que le titre "Born To Run" (9).

Il en faut de l’optimisme, de l’amour et de la fraternité pour garder la foi jour après jour dans un contexte à ce point incertain. Tandis que Bruce Springsteen se lance dans l’enregistrement interminable de sa plage titulaire, il doit également écrire de nouveaux titres et auditionner des musiciens.

De janvier à juin 1974, Springsteen va rendre son entourage totalement fou en passant six mois à bricoler "Born To Run" (10). Jimmy Iovine, l’ingénieur du son (assisté de six techniciens), y perdra sa patience, ses cheveux et son latin. Finalement, il admettra que ce semestre aura été son "université du son".

Après avoir joué au Bob Dylan un peu cheap, Bruce Springsteen rembobine la machine à souvenirs pour servir, sous une épaisse sauce Americana, un pot-au-feu fait de rock’n’roll, rhythm and blues, jazz et soul, fifties, sixties et seventies, Bo Diddley, Roy Orbison, Duane Eddy et Robbie Robertson, mur de son spectorien trop clinquant et révolte sociale.  

Il subsistera cinq versions de "Born To Run" dont aucune ne plaira vraiment au futur Boss...

Il est vrai qu’écouter aujourd’hui le titre au casque et à fort volume relève de la near death experience. Musicalement, c’est un foutu mille feuilles. Aucune oreille humaine ne peut objectivement analyser et synthétiser les 72 pistes (finalement remixées en "seulement" 16 pistes) qui composent le titre.

CBS choisit ce moment pour rappeler poliment au "Futur du Rock" qu’il lui reste un album à terminer (dans un délai "raisonnable"), faute de quoi la maison de disques abandonnera la partie. Et ajoute que, si cet album ne se vend pas, le "nouveau Dylan" et sa troupe de jeunes guignols du New-Jersey seront virés comme des malpropres. Ca fleure bon l’ultimatum.

A l’issue de cette première session d’enregistrement, Max Weinberg (batterie) et Roy Professor Bittan (grand piano, claviers, accordéon) sont recrutés pour remplacer Ernest Carter et David Sancious qui s’en vont créer Tone, un groupe de jazz fusion en compagnie de la rousse Patti Scialfa (que Bruce Springsteen épousera en 1991).

Le E Street Band se stabilise alors sous la forme du septuor "classique" composé du futur Boss, de Gary Tallent (basse), Clarence Big Man Clemons (saxophone), Danny Federici (claviers, accordéon), Roy Professor Bittan (grand piano, claviers, accordéon), Max Weinberg (batterie) puis Stevie Van Zandt (guitare) qui traînait par là.  

Occupé à gérer la carrière de Southside Johnny, Stevie Van Zandt est un prosélyte passionné de Rythm’n’Blues. C’est lui qui va orchestrer les parties de cuivres sur l’album et lui apporter cette coloratur assez intemporelle.

Entre réel et imaginaire

L’album va forcément souffrir de l’incohérence liée à l’obstination de son auteur d’enregistrer au préalable un single "idéal" puis de procéder tout autrement pour les autres titres. "Born To Run" est, en termes de production et de mixage, le seul de sa race sur l’album éponyme.

A la rigueur et rétrospectivement, on peut écrire "heureusement" parce que deux faces de vinyle enquillées à 140 miles à l’heure sur soixante-douze pistes parfois confuses auraient été définitivement indigestes.

Tous les musiciens de l’E Street Band méritent évidemment leurs lauriers. Mais, au-delà d’une rythmique implacable, ce sont les notes magistrales du Professor Bittan (11) et les fulgurances survitaminées de Big Man Clemons qui permettent d’identifier immédiatement le son du collectif.

Et, comme Bruce Springsteen a de la suite dans les idées, il y a unité dans l’inspiration. Une inspiration qui oscille entre deux univers : le rêve et la réalité.

Dans "Born To Run" en effet, la Wendy que l’auteur emmène sur la Route 9 (12) pour quitter le New-Jersey ne s’appelle pas Wendy par hasard. C’est Wendy Moira Angela Darling, le personnage central du Peter Pan de l’Écossais James Barrie. La demoiselle du poster qui tisse justement des liens entre le réel et le rêve. Si Bruce entend emmener Wendy dans son errance, c’est parce qu’il sait qu’elle est la seule qui puisse le conduire ailleurs. Au pire, chez les Garçons perdus. Quitte à croiser en chemin des pirates, des indiens ou des crocodiles.

En ces temps d’innocence, Springsteen croit encore à un monde potentiellement meilleur (13). Même s’il est lointain. Même si la route est rude. Même si Wendy n’est peut-être qu’une illusion. Ou une "compilation" de filles croisées au hasard dans l’E Street.

Dans le puissant "Thunder Road", l’élue s’appelle Mary. Et peu importe si c’est une vilaine qui collectionne les garçons. La monstrueuse plage introductive résume tout le propos de l’album. Les choses sont simples. Il faut partir. Il y a la voiture et la guitare. Le reste viendra. Ou pas.

L’hymne "Tenth Avenue Freeze-Out" évoque une avenue de Belmar, perpendiculaire à l’E Street. A l’origine, le groupe répétait dans un garage, chez la mère de David Sancious, au 1107 de l’E Street. L’E Street Band débutant, conduit par Bad Scooter (Bruce Springsteen) et The Big Man (Clarence Clemons), faisait parfois un peu trop de boucan aux oreilles des riverains. Et les petits rockers n’étaient certainement pas les bienvenus dans le quartier plus chic de la dixième avenue.

Malgré un refrain mélodiquement redoutable, le très speedé "Night" pourrait être le moins bon titre de Born to Run. Il y est question de l’abrutissement lié aux horaires de travail puis du plaisir de voir arriver la soirée pour aller s’éclater. C’est vaguement banal.

Bruce Springsteen n’a jamais précisé si Terry dans "Backstreets" était un garçon ou une fille. Il est difficile de savoir si ces errances dans les ruelles un peu paumées évoque une amitié virile ou une rupture sentimentale.

Archétype de la chanson d’amour où tout est dit dans le titre, "She’s The One" et sa rythmique empruntée au Bo Diddley Beat n’apporte pas grand-chose à la littérature générale mais la dramaturgie des amours adulescentes est exprimée avec tellement de sincérité que l’on sort ému de l’expérience. Parce que tous les petits rockers ont vécu la même aventure avec la même "femme fatale". Chienne de vie.

Puis l’album bascule vers son Grand Final. Le gamin du New-Jersey va quitter sa contrée pour gagner la mégalopole. Ce n’est pas un voyage d’agrément. De l’autre côté de la rivière, il y a ce type qui propose des poignées dollars en échange d’un casse ou d’un deal. La rivière, c’est l’Hudson. Et traverser la rivière, c’est emprunter le tunnel Lincoln qui conduit du New-Jersey à la Grosse Pomme.

"Meeting Across The River" restera probablement le titre le plus atypique jamais écrit par Bruce Springsteen. Et un de ses tout meilleurs. Il y a sa voix, le piano discret de Roy Bittan et la contrebasse jazzy de Richard Davis, l’accompagnateur de Dizzy Gillespie ou de Sarah Vaughn. Mais il y a – aussi et surtout – la trompette de Randy Brecker (Billy Cobham, Jaco Pastorius, Charles Mingus) qui se la joue à la Miles Davis dans Ascenseur pour l’échafaud.

Sous ses airs fascinants de partition jazzy de film noir à la française, "Meeting..." marque la rupture entre jeunesse et maturité, entre illusions et réalités cruelles. C’est un passage rituel...

Comme la bouche de métro pour Peter Gabriel (14).

Et, par une subtile transition musicale, le tunnel conduit à "Jungleland" pour un dernier acte terrifiant où la mort de toujours et l’amour d’un seul jour s’épousent dans l’agitation de la nuit. On quitte les amourettes sédentaires et les envies d’ailleurs pour plonger dans un monde vraiment interlope où il est question de guerres de gangs, de deals pourris, de rivalité entre rockers, de violence urbaine, de flingues et de crans d’arrêt, de gyrophares et de flics. Et aussi de sang versé. La nuit de "Jungleland" est illuminée par cette très belle et très longue intervention de Clarence Clemons qui a marqué les esprits au point d’être encore citée aujourd’hui comme une absolue référence (avec le solo de Raphael Ravenscroft sur "Baker Street").

Cette même ambiance urbaine, glauque et étouffante, sera décrite par Scorsese l’année suivante dans son Taxi Driver. Parce que la grande banlieue de New-York est une vieille camée en manque de misère humaine qui réclame, jour après jour, sa dose de plaies et de souffrances.

Même s’il décrit un voyage initiatique – ou le violent dépucelage des innocences d’un gosse (15) –, Born To Run n’est (par bonheur) pas un album concept.

Le trajet entre le New Jersey et New-York, via ce vieux tunnel, creusé en 1937 sous la Hudson River, sera sans retour pour le Boss et son Band. A partir de 1975, c’est le monde rock dans son ensemble qui plébiscitera les gamins du New-Jersey.

Un petit sourire ?

Connu pour ses "humeurs colorées" aux tons sursaturés et ses photos retravaillées à la manière de l’immense Steve McCurry, c’est en noir et blanc (au propre comme au figuré) et sur un fond immaculé qu’Eric Meola va capturer, parmi neuf cents clichés (16), un instant de complicité métissée entre Bruce Bad Scooter Sprinsgteen et Clarence Big Man Clemons.

Tel sera l’artwork de Born To Run.

Les pointillistes noteront que le Boss (jean, débardeur blanc déchiré et Perfecto), a accroché un badge du fan-club Elvis Presley sur la bride de sa Telecaster (cannibalisée, pour les puristes, avec un manche d’Esquire).

Lorsque la pochette est ouverte, cette image splendide se lit simplement de gauche à droite et réserve alors la part primordiale au saxophone et au saxophoniste, sur le dos duquel vient s’appuyer Bruce Springsteen pour engrener son processus créatif. Dans cette optique, le cliché illustre le fait que les fondations de la musique créative du E Street Band sont essentiellement "noires". La composante "blanche" vient s’adosser sur ces racines anciennes implantées tout au long de la route (ou de la voie ferrée) qui a conduit la musique du Diable depuis le Delta du blues jusqu’à Chicago.

Si l’on efface Bruce Springsteen, la pochette serait parfaite pour illustrer un album classique de la Stax ou de la Motown. Ce qui, d’une certaine manière, nous ramène aux fondamentaux musicaux de Born To Run. Il n’y a pas qu’en économie que s’applique le principe de la « circularité »...

Mythique.

Héritage

Cinquante années plus tard, il subsiste un nombre incalculable d’humains qui, pourchassés par la misère économique ou un climat hostile, cherchent leur route 9 ou 66 dans l’espoir d’arriver "ailleurs". Certains se perdent ou se noient. D’autres sont refoulés, expulsés ou enfermés dans des chiourmes d’exception.

C’est à croire que nous sommes tous nés pour errer, vagabonder ou fuir. En ce sens, Born To Run prend un caractère réellement messianique, ce qui rend son écoute – et son partage – toujours plus indispensable.

Parce que c’est l’album ultime des moches, des paumés, des dépités, des pas capables, des sans rien, des petits…

Mais qui continuent d’espérer...

 
(1) A l’exception notable du Docteur Futurity qui a corrigé et documenté ma chronique. Il écoute tous les albums de Bruce Springsteen tous les matins à l’exception des jours où il se rend à des concerts du Boss. Et (authentique) il est parvenu à dresser Mona, le Teckel d’une de ses connaissances, à sélectionner des titres du Boss sur la chaîne Hi-Fi de sa voiture. On a enfermé d’honnêtes gens pour moins que ça...

(2) Prix Pulitzer en 1940, Les raisins de la colère est un roman que tout être humaniste devrait lire ou avoir lu. Le XXIème siècle lui confère une pertinence aussi nouvelle qu’inattendue.

(3) Todd Rundgren n’a pas résisté au plaisir de pasticher Born To Run avec un humour dévastateur (et avec la complicité des meilleurs musiciens de l’E Street Band). Bat Out Of Hell de Meat Loaf  (1977) est, d’un bout à l’autre, un pastiche tordant et convaincant de l’album de Springsteen. Et le titre "All Revved up With No Place To Go" ("Tout excités sans savoir où aller") moque le propos du Boss au sujet de la terrible bougeotte dont souffrent ses personnages fétiches.

(4) Géographiquement, les Etats-Unis sont ainsi faits que ceux qui fuient l’Est et arrivent en une seule pièce aux confins de l’Ouest sans trouver leur bonheur n’ont plus que deux "possibles" : nager ou faire demi-tour. Quand on sait que la natation a été fatale à Dennis Wilson à la Marina Del Rey, il est peut-être préférable de faire demi-tour.

(5) On se souviendra de la prophétie de Ziggy Bowie dans "Five Years" : La nouvelle vient de tomber : il nous reste cinq ans pour pleurer. La terre est en train de mourir...

(6) Greetings From Asbury Park, N.J. (1973) et The Wild, The Innocent And The E Street Shuffle (1973).

(7) C’est que le Studio Sound 914 (914 étant l’indicatif téléphonique du lieu), situé dans le quartier de Blauvelt, est une station service abandonnée qui a été reconvertie en studio de fortune au début des seventies. Les locaux humides ressemblent plus à un atelier mécanique en désordre qu’à un lieu dédié à la créativité musicale.

(8) The E Street Band, pour ne pas le confondre avec The Band (de l'autre) tout court...

(9) Boom Carter avait déjà collaboré avec Bruce Springsteen. Ses patterns jazzy sur "Born To Run" sont tellement personnels que son successeur Max Weinberg ne parviendra jamais à les reproduire sur scène ce qui le contraindra à "réécrire" complètement le titre.

(10) A titre de comparaison, derrière le même piano qui avait servi à Paul McCartney pour enregistrer "Hey Jude", Freddie Mercury enregistrera la version définitive de "Bohemian Rhapsody" en trois semaines. Match Point.

(11) The Professor méritera son paradis parce que, durant tout l’enregistrement de l’album, son Yamaha se désaccordera sans cesse dans les locaux bordéliques du studio soumis à des variations incongrues de température et de taux d’humidité.

(12) L’équivalent de la Route 66 des Joad de Steinbeck.

(13) Après avoir été trahi par son premier manager, Mike Appel, le Boss développera une vision bien plus désillusionnée (encore) du monde qui est illustrée par l’album Darkness On The Edge Of Town (1978). En trois ans et moultes querelles juridiques, on passe de "C’est grave mais pas désespéré" à "C’est désespéré mais ce n’est pas grave".

(14) L’intrigue de The Lamb Lies Down On Broadway se déroule également à New-York.

(15) En France, autre lieu, autres tourments, "Dolanes mélodie" de Jean-Claude Borelli cartonne dans les charts. Ce sera le single hexagonal de l’année.

(16) On trouve sur YouTube un montage des meilleurs clichés de Meola ("Born to Run photo sessions 1975").


 

Commentaires
DanielAR, le 07/03/2025 à 18:37
Je suis touché par vos témoignages. Pour parodier un de mes "camarades de pensée(s)" : "Posez un geste moderne en réécoutant un vieux classique !" Ceci dit, comme tout ce qui se trouve dans les musées ne mérite pas de facto le respect, soyez également modernes en écoutant ce qui s'enregistre aujourd'hui ! Conseil de vieux gugusse...
Etienne, le 06/03/2025 à 13:45
Merci pour cette superbe chronique, je fonce réécouter ce chef d'oeuvre de ce pas ! Que j'ai écouté il n'y a pas si longtemps pour la dernière fois... Mais c'est certainement déjà trop !
Dim, le 05/03/2025 à 00:00
Une critique de disque qui mériterait sa place au "Registre national des chroniques d'albums musicaux"! Tiens, je m'enthousiasme ? Merci de nous faire réécouter ce monument à la lumière de cet éclairage et de ces considérations.
Jerry, le 21/03/2019 à 18:45
l contient huit chansons bouleversantes de réalisme et de lyrisme fort bien produites (dans la lignée des productions discographiques de Phil Spector ). Il suffit d’ouïr "Thunder Road" , l'émouvante "She's the one" et le final très étonnant que constitue la chanson "Jungleland" qui dit tout de la jungle néo-libérale et ses ravages de la fin des trente glorieuses. Un disque indispensable qui marque les débuts de Springsteen et également une galette un peu à part dans sa discographie. http://magicienox.blogspot.com/