
Wolve
Sleepwalker
Produit par
1- The Tall Trees / 2- Cassiah / 3- Ocean / 4- Coutdown / 5- Colours Collapse / 6- Sleepwalker


Alors que le rock progressif reste encore bien marginal en France, on cherche désespérément qui pourra bien prendre la suite de Demians, seul réel projet français à avoir fait preuve d’une certaine crédibilité dans notre beau pays sur les dix dernières années. Et justement, peut-être que Wolve va pouvoir emboîter le pas de ce valeureux aîné. Wolve est à Julien Sournac ce que Demians est à Nicolas Chapel, soit un projet solo presque exclusif. Cinq années ont été nécessaires à l’homme à la barre pour accoucher de ce premier album qu’il a composé et enregistré quasiment tout seul, en jouant de tous les instruments (batterie exceptée) mêm si un bassiste et une violoncelliste l'ont épaulé en studio. Autre point commun entre Chapel et Sournac, la voix : les deux français ont des timbres et des inflexions sensiblement proches, et en l'occurrence, il ne s’agit nullement d’un reproche tellement le chant de Demians s’avère agréable. Ici, la tonalité va plus lorgner, lorsque l’ambiance s’y prête, vers les aigus d’un ténor à la Thom Yorke (cf "Sleepwalker", avec une sensibilité très typée Oxford). Pour le reste, Wolve n’évolue pas tout à fait dans le même registre, même si les canons imposés par Steven Wilson restent valables sur les deux projets : un chant pop, de la mélodie, des alternances de guitare lourde et de parties planantes plus contemplatives. Bref, du progressif made in 2000, bien maîtrisé à défaut de faire preuve d’une folle originalité. Trente cinq minutes et des poussières pour six morceaux, dont essentiellement trois copieuses pièces de choix aux ambiances variées et dissemblables. "Cassiah" est certainement le morceau le plus réussi de tous, éclectique, parfaitement construit, avec une excellente maîtrise des contrastes, des alternances guitare acoustique / électrique, des arpèges soft et des gros riffs glaçants (peut-être pas assez exposés), sans compter des lignes de basse très rondes et deux très bons intermèdes, l’un versant plus dans le psychédélisme d’El Paso (pour les fans de la Volta Martienne), l’autre titillant les samplers chers à Porcupine Tree première époque. Plus doux, "Ocean" sait se faire onirique avant d’explorer une crête plus métallique puis plus psychédélique. Là encore, on y trouve de jolies superpositions instrumentales, même si on regrettera que la guitare prenne nettement le pas sur les autres instruments. Sleepwalker est le fruit d’un guitariste, cela se sent, et si la maîtrise de la six cordes est indéniable (avec notamment une utilisation judicieuse des larsens, pas si fréquents en progressifs), on sent qu’une marge de progression peut se dessiner sur la section rythmique, en donnant plus de place et de volume à la basse et en essayant de varier un jeu de batterie un poil trop académique. Dommage également que "Color Collapse" fasse un peu trop penser à du Jolly dans son développement mélodique, même si la fin du morceau se rattrape en terme d’originalité et de mélange d’influences. Sleepwalker est une réussite, un album solide, consistant, varié, parfaitement exécuté et produit. Julien Sournac tient là un projet de poids qui risque, avec un peu de couverture médiatique, de marquer les esprits. Souhaitons à ce jeune groupe de pouvoir rapidement signer sur un label qui lui permettra d’accroître sa visibilité. Mais vous n’êtes pas obligé d’attendre jusque là : en l’état, et en attendant quelques ténors du post progressif dans les mois à venir (Gazpacho, The Pineapple Thief ou encore le projet solo de Mike Vennart), Wolve saura se faire une belle place dans votre discothèque.