
Mott the Hoople
All the Young Dudes
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1- All the Young Dudes / 2- One of the Boys


Qui pour honorer la mémoire du Glam-rock au XXIème siècle ? Qui pour résister à afficher un sourire moqueur face aux accoutrements de ces musiciens d’opérettes et pour trouver un intérêt à leurs riffs simplistes et à peine saturés ? Certes, David Bowie continue de rayonner, mais c’est avant tout parce que l’artiste en question a su se déployer dans de nombreux univers artistiques, qu’il parvint à forger son héritage et à maintenir un intérêt pour sa période Glam – c’est donc par procuration que cette dernière lui survit. De même, T. Rex est toujours ancré dans la légende du rock, mais il le doit surtout au charisme de Marc Bolan, et la postérité aura principalement retenu l’album Electric Warrior et sa pochette culte – les plus sévères limiteraient cette postérité au seul "Get It On".
Mais qui, en dehors d’un public vétéran un peu nostalgique, rendrait hommage à Slade, Sweet ou encore à Mott the Hoople (on évitera d’y ajouter le pédocriminel Gary Glitter) ? Pourtant, le genre a profondément marqué la scène musicale britannique durant les années 1970, au point d’influencer le Heavy Metal naissant au début des années 1980, comme se plaît à le répéter Biff Byford de Saxon, grand amateur de Sweet. Et il est vrai que les deux opus sortis par ce groupe en 1974 surprennent encore par leurs velléités Heavy.
Tentons modestement d’apporter notre pierre à l’édifice en effectuant un retour sur un des albums cultes du genre, All the Young Dudes de Mott the Hoople (1972).
Ce dernier n’est pas originellement un groupe de Glam-rock, puisque formé et discographiquement actif depuis 1969, il est devenu une formation très populaire en Angleterre dans le courant de la vague de la fin des 60s, suscitant l’admiration de nombreux musiciens dont David Bowie lui-même. Encore à l’aube de sa carrière, celui-ci obtient le privilège de proposer au groupe des compositions pour faire aboutir un cinquième opus, alors que la formation connaît des remous – il s’agit de la sauver d’une séparation imminente. Il y aura d’abord "Suffragette City", rejeté puis recyclé sur Ziggy Stardust and the Spiders from Mars la même année, puis "All the Young Dudes", immédiatement validé et tellement apprécié qu’il offre un titre de l’album. Marqué par l’esprit du temps, cette chanson devient immédiatement l’hymne du Glam-rock (et dans la postérité, un hymne homosexuel), d’une intensité telle que Bowie finit par l’intégrer aux setlists de ses propres concerts.
Cependant, All the Young Dudes est loin de se limiter à ce seul morceau pour s’affirmer comme un bijou de Glam-rock saturé capable d’atteindre des sommets sur "Sucker", à la ligne acoustique façon mandoline assez splendide, ou sur "Ready for Love/After Lights" que Mick Ralphs recyclera merveilleusement pour Bad Company deux ans plus tard. C’est à ce groupe que renvoie également "One of the Boys", qui évoque un peu "Can’t Get Enough". S’y ajoutent le cuivré "Momma's Little Jewel", au rythme cadencé de loubard, le stonien "Jerkin' Crocus" et même la reprise "Sweet Jane" du Velvet Underground, composée par Lou Reed (un ami de Bowie), à la fois fidèle et parfaitement intégrée au registre de l’album. L’album est suffisamment varié pour dépasser la seule catégorie du Glam-rock : "Soft Ground" intègre une dimension Heavy à orgues du genre de Deep Purple ou Uriah Heep, tandis que le final "Sea Diver" est centré sur le piano voix (avec orchestrations), à la manière de Lou Reed.
C’est pourquoi même ceux qui ne sont pas amateurs de Glam-Rock pourront trouver leur compte à l’écoute d’All the Young Dudes, une qualité qui est la marque des grands albums.
À écouter : "Sucker", "All the Young Dudes", "One of the Boys"