
Fires In The Distance
Echoes From Deep November
Produit par
1- The Climb / 2- Elusive Light / 3- The Lock and the Key / 4- Reflections in the Ice / 5- Chained to the Earth / 6- Sundial


Il est un sanctuaire où le soleil refuse de se lever. Ses rayons d'or éludés comme une vérité inexistante, laissent se forger une réalité propre. Un monde figé, dominé par des sommets et autres pics imposant une sévérité virile. À l'intérieur flotte une brume légère et pourtant si épaisse. Un drap de soie pour recouvrir un secret que l'on se plaît à murmurer. Celui du trésor renfermé ici, couleurs ocres et rouges mêlées, qui poussent sur les branches des arbres dressés par les ficelles du chagrin pour les figer dans une immuabilité aux formes ténébreuses.
Ce paysage dessiné devant moi, comme la promesse d'une nouvelle traversée épique.
C'est en toute logique que "The Climb" marque le début de notre ascension. Dans la densité intrinsèque des riffs, on se surprend à trouver dans leur construction autant de prises évidentes, rendant notre progression limpide. Ainsi, en peu de temps, nous atteignons déjà le sommet de Echoes From Deep November avec le pont instrumental du morceau. Un point culminant offrant une vue à couper le souffle sur le paysage musical de Fires In The Distance.
Le quatuor américain évolue sous un ciel où la mélodicité de ses guitares est comparable à des centaines d'étoiles scintillant dans l'obscurité. Ces dernières éclairent les émulations stylistiques du groupe, entre influences death mélodique scandinave et doom aux échos gothiques.
Une entrée en matière grandiose, fascinante, et suffisamment rassurante pour que l'on ferme les yeux et se laisse tomber dans le vide vertigineux du départ tourbillonnant de "Elusive Light". Un chaos mesuré, savamment construit, qui donne à la chute un sens, une direction. On se relève alors au cœur de la forêt, capturé par une brume épaisse et pénétrante. Une toile de fond grisâtre, teintée par un sol recouvert de feuilles dont les couleurs apportent de caressantes nuances d'or et de sang. Un peu comme un feu qui aurait été éteint par l'abondance du clavier, omniprésent sur ce premier opus du quatuor américain. Ce dernier déverse continuellement ses notes, pareilles à des gouttes de pluie s'écrasant au sol telles des âmes kamikazes, désireuses d'éteindre toute velléité incendiaire.
Devant ce spectacle, on se dit que le paysage, fait de cette lutte élémentaire entre feu et glace, se serait suffi à lui-même. On n’est donc pas réellement surpris d’apprendre que Fires In The Distance était originellement prévu comme une formation instrumentale. La piste de clôture, "Sundial", atteste de cette orientation originelle avec une élégance rare, capable de parler le langage de la densité perçue sous le poids des guitares, tout en laissant s'exprimer des motifs d’une patience mélancolique.
Pourtant, Echoes From Deep November est préservé par un gardien, en la personne du chanteur Kristian Grimaldi. Son growl rugueux hante magnifiquement l’album, lui conférant une immersion accrue. Sa pertinence réside dans son imbrication au sein de l’environnement sonore. Il en est l’incarnation discrète, celle qui laisse se diffuser l’obscurité lorsque les morceaux appellent à ce que cette dernière soit exprimée au travers de la rythmique ou des guitares. Une voix à l'aura suffisante pour extirper "The Lock and the Key" d'une indifférence suggérée, avec ses assauts vocaux d'une caverneuse violence. "Reflections In the Ice" sera le miroir de ce splendide opus, la forêt s'embrasant sous une pluie : lente agonie, beauté fatale. Les claviers ruisselant comme les larmes d’orage, et les guitares sont les branches hurlantes que l’automne refuse d’abandonner.
On referme Echoes From Deep November comme on s’éloigne à regret d’un paysage hanté.
Si l’on retient l’entièreté de la traversée, le point de vue offert par "The Climb" sur la musique de Fires In The Distance persiste comme un écho infini. Véritable colonne vertébrale de l’album, ce titre pose d’emblée les bases d’un équilibre subtil entre puissance et émotion, densité et lisibilité.
Mais ce premier sommet n’était qu’un début.
Déjà, l’horizon se soulève à nouveau.
Un souffle plus froid, plus haut, attend au seuil du disque suivant.
Air Not Meant For Us.
Et l’ascension continue.
A écouter : "The Climb" ; "Elusive Light" ; "Sundial" ; "Reflections In The Ice"