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Jonathan Wilson, a desert trip


Steven Jezo-Vannier, le 18/11/2014

Nouveau barde de Laurel Canyon, Jonathan Wilson est un passeur de monde. Ravivant les énergies de la Californie des sweet sixties, il ouvre une brèche entre les époques et modernise le son de ce cher rock californien, un style quelque peu délaissé – lorsqu'il n'est pas maltraité – depuis une trentaine d'années.

 


Jam bander émérite, Jonathan Wilson est un héritier du Grateful Dead, de CSNY et des folkeux de la Côte Ouest ; c'est aussi un grand amateur de la musique de Pink Floyd et de George Harrison, autant d'influences qui transcendent sa musique. Car Wilson n'est pas le genre de musicien à s'enfermer dans un tribute band. Artiste complet, il a un son, une identité propre, riche d'un héritage et d'une grande modernité. Auteur et compositeur précis et patient, musicien inspiré et producteur perfectionniste, il a mis quelques années à se lancer en solo, travaillant méticuleusement son répertoire pour livrer le meilleur. Deux albums sont déjà sortis sous son nom : Gentle Spirit (2011) et Fanfare (2013).


Jonathan Spencer Wilson voit le jour bien loin de la Californie, à Forest City, en Caroline du Nord, le 30 décembre 1974, à une date où l'effervescence californienne qui l'influencera est déjà retombée. Il y est toutefois amené par un père musicien, un guitariste qui a façonné son oreille et son doigté. Dès l'adolescence, Jonathan joue de la guitare, s'inspirant de ses premières idoles. Il joue seul, dans sa chambre, et dans un petit groupe, avec lequel il connaît les premiers frissons de la scène. Les années passant, le jeune homme s'ouvre à d'autres instruments et d'autres styles. Il se passionne pour l'improvisation et revient aux sources de cet art à l'écoute de John Coltrane, il s'ouvre également au vaste panel artistique des années soixante, de Bob Dylan au Dead, en passant par les Beatles et Pink Floyd. Il fuit l'école autant que possible, rencontrant des difficultés que son bégaiement n'arrange pas. Il se sent plus à l'aise sur le manche de sa guitare que dans une salle de classe.


En 1994, Wilson a vingt ans et la Côte Ouest a vu l'émergence et le déferlement d'un nouveau style, le grunge. Il s'y essaie nécessairement, mais sans s'éloigner des jam bands de sa discothèque. Pour donner forme à cet étonnant mélange, il s'associe en 1995 à Benji Hughes, autre musicien de Caroline du Nord, originaire de Charlotte. Ils fondent ensemble le groupe Muscadine ; Wilson assure les partitions de guitare et le chant. Les concerts se multiplient et trois disques voient bientôt le jour en partenariat avec Sire Records : The Ballad of Hope Nichols, LP2 et Live From Studio East. Entretemps, Hughes et Wilson gagnent l'Ouest. Ils s'installent à Los Angeles et s'implantent dans les mythiques canyons qui enserrent la ville des anges. Là, l'artiste, mince et élancé, portant vêtements vintage, barbe et cheveux longs, se fond dans le décor et le patrimoine artistique local. L'immersion ne s'arrête pas aux apparences. Wilson renoue entièrement avec l'ancienne tradition artistique de Laurel canyon, marchant dans les pas de Crosby, Stills, Nash and Young, Joni Mitchell, John Mayall, Canned Heat, Frank Zappa, Jackson Browne, Chris Hillman, etc. Jonathan Wilson participe au ravivement de la créativité et des coutumes locales. Il tente de s'attirer les faveurs des Muses endormies des canyons et y parvient avec brio. Avec les autres musiciens de la région, il organise chez lui des jam sessions où se croisent Jonathan Rice, The Jayhawks, Benmont Tench, Chris Robinson, les Black Crowes, et plein d'autres. Son talent ne passe pas inaperçu. Il est donc invité sur de nombreux albums, aux côtés de Bonnie « Prince » Billy, Jonathan Rice, The Shore, Vetiver, Dawes, Roy Harper, Erykah Badu, et même Barry Goldberg et Elvis Costello. Il intervient également en qualité de producteur pour nombre d'entre eux et attire très vite l'attention des vétérans de la scène californienne, qui admire son travail. Il sympathise notamment avec quelques-uns de ses modèles, dont David Crosby et Graham Nash de CSNY, ou encore Phil Lesh et Bob Weir du Grateful Dead, avec lesquels il se produit fréquemment (il intègre même le All Star Band du TRI studio de Weir).


Durant tout ce temps, il continue de tourner avec Muscadine et de perfectionner son jeu et son écriture, en solo, préparant longuement un répertoire de titres originaux. À la fin des années deux mille, l'aventure Muscadine prend fin. Et, tandis que Benji Hughes se lance en solo avec la préparation de l'album A Love Extreme (paru en 2008 chez New West Records), disque sur lequel intervient Wilson en qualité de musicien et co-producteur, ce dernier se sent prêt à dévoiler ses chansons. Dès 2007, il se lance officieusement et en indépendant, avec le label Pretty And Black Records, pour l'album Frankie Ray. Tout est déjà là, la poésie des textes, la modestie angélique du chant, mélange d'intensité et de légèreté, la sobriété de l'orchestration (« El Matador », « Waltz With Me », « Carousel », « Frankie Ray »). Wilson possède une écriture d'une étonnante richesse, fragile et sensible, elle est entièrement habitée, par son auteur et par les fantômes de ses influences, elle est surtout inspirée, débordant d'une émotion puissante et sincère. Après avoir affirmé ses talents de musiciens de studio, d'artiste live et de producteur, Jonathan Wilson met en lumière sa plume et ses compétences de multi-instrumentiste. En effet, l'essentiel de Frankie Ray a été réalisé et enregistré par Wilson lui-même, qui a joué de la plupart des instruments. Précisons à ce propos qu'il ne choisit par ses instruments et son matériel, privilégiant l'ancien pour cultiver une esthétique rétro mais surtout pour retrouver l’authenticité de leurs sonorités. Amplis à lampes, guitare Martin, orgue Hammond donnent à la musique de Wilson une saveur unique et renforcent inévitablement les clins d'œil de la composition au legs des sixties. Il y a là un savant mariage de vieux et de nouveau, de rock et de jazz, de psychédélisme et de folk, d'acoustique et d'électricité, qui fait la singularité de la production et définit entièrement l'identité artistique de son auteur.


Dans les années suivantes, poursuivant ses collaborations et travaillant de nouvelles chansons, Jonathan Wilson conçoit un nouvel album complet dans son propre studio de Laurel Canyon. Fidèle à son habitude, il prend son temps. Il faut donc attendre 2011 et la signature avec le label Bella Union, une maison indépendante créée par Simon Raymonde et Robin Guthrie, pour que paraisse le splendide Gentle Spirit, son premier opus officiel. Le disque voit le jour le 8 août en Europe et le 13 septembre aux États-Unis. Il s'inscrit incontestablement dans la continuité du premier. La chanson-titre, « Desert Raven », « Ballad Of The Pines », « The Way I Feel », « Rolling Universe », « Valley Of The Silver Moon » creusent le sillon de la sincérité et du dépouillement. Les crédits saluent le partenariat de Wilson avec plusieurs de ses amis musiciens, dont Jonathan Rice et Chris Robinson, qui assurent les chœurs sur plusieurs titres. La ligne artistique et la méthode restent les mêmes pour le EP Pity Trials and Tomorrow's Child (2012) contenant la brillante reprise de George Harrison « Isn't It A Pity », enregistrée avec Graham Nash. Idem pour son dernier LP, Fanfare, paru le 14 octobre 2013 après un long travail de neuf mois dans les studios personnels du chanteur, où sont de nouveau venus quelques amis, dont David Crosby, Graham Nash et Jackson Browne, qui assurent seul ou à plusieurs les chœurs de « Moses Pain », « Cecil Taylor » et « Desert Trip ».


À découvrir, à écouter et réécouter, Jonathan Wilson est un artiste encore peu connu en Europe, malgré l'enthousiasme unanime de la critique et du public, qui a notamment pu le voir sur la scène des Vieilles Charrues en 2013.



 

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