Beatles For Sale
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Introduction
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Beatles : ma première fois
John, les sixties et moi
Parce qu'on connaît leur nom depuis que l'on est né, difficile de vivre sans jamais avoir entendu les Beatles. Ils sont partout, dans les pubs, les films, les reportages-télé, partout. Pourtant, ce n'est pas pour autant qu'on les connaît vraiment. Faire partir de l'inconscient collectif est à double tranchant.
J'ai toujours connu les Beatles, j'ai toujours su que c'était quatre mecs des années 60 qui faisaient du rock. Pour moi, ils avaient même inventé le rock (connaissais pas encore Elvis). Pour autant, on m'aurait demandé de citer d'autres titres que "Yellow Submarine", "All you need is love" et "Let it be", j'aurais été un peu embêtée. Parce qu'un monument de la musique, quand on est ado, c'est un peu effrayant. Et puis, c'est aussi la musique de ses parents. Berk, vieux, nul.
Quand on a la chance d'avoir une adolescence rebelle qui ne fait pas sombrer dans les plus sombres bassesses de la musique (j'en entends qui rient, non, j'avoue, je ne mets pas Indochine dans le lot), on trouve malgré tout que la musique qu'écoute son père peut être cool. Parce que les groupes qu'on aime s'en inspire, parce que c'était le rock'n roll.
A 15 ans, je suis partie dans une exploration du grenier familial. Je ne me souviens plus de ce que je cherchais, mais je me souviens de ce que j'ai trouvé. C'est toujours comme ça les expéditions dans les antres poussérieuses, on en ressort avec bien plus que ce qu'on pensait. Cette après-midi de fouilles archéologiques s'est soldée par la découverte d'un carton de vinyles. Là, on se dit qu'on voit bien où je veux en venir. Eh ben non ! Non, il n'y avait pas la collection complète des Beatles dans ce carton ! C'était les vinyles de mon oncle, pleins de Bruce Springsteen, de Bob Marley et de Genesis. Mon père n'aurait pas décemment pu mettre ses vinyles des Beatles au grenier ! Mais la manipulation de ses objet musicaux d'une autre époque a excité l'intérêt de l'ado curieuse. Je partais alors à la recherche de ceux de mes parents, planqués en sureté dans leur chambre. Là, au milieu des AC/DC, des Jethro Tull et des Jean Ferrat (tiens, ça doit être ceux de ma mère), c'est l'excitante découverte, le petit frisson devant l'image de quatre mecs qui traversent une rue, avec un petit air de déjà-vu. Et toutes les pochettes suivantes réveillent un petit coin de ma mémoire. Je les tiens, la collection des vinyles des Beatles de mon père !
Si dans un premier temps, le paternel est un peu flippé de voir son ado manipuler sans grand égard ses précieuses reliques, il cède vite à la fierté de pouvoir expliquer que "celui-ci c'est le live at the Star-club in Hambourg 1962, complètement inaudible", à quel point le double blanc a marqué son époque, et comment il avait obtenu un best-of importé d'Allemagne. Pour autant, je ne me suis pas précipitée sur la vieille platine vinyle de mes parents pour les faire tourner en boucle. Non, je les ai regardé, manipulé, mis en évidence pour me la pèter devant mes potes. Mais pas écoutés, non. Jusqu'à ce que j'achète ma propre platine vinyle, quelques années plus tard. Pas de grande qualité, mais suffisante pour faire tourner enfin Please Please Me, Help, Abbey Road et les autres.
Entre temps, un petit CD rouge avec un gros "1" jaune est arrivé. Le "one" a été mon véritable premier contact avec les Beatles. Sauf que je n'avais pas de platine cd à l'époque, juste un poste K7 (aaah les années 90). Ces singles me rappelleront donc toujours deux choses. Des dimanche après-midi où mon père se faisait plaisir en mettant les enceintes du salon à fond (tiens, ça me rappelle aussi quelques fou-rires, voir mon père danser est toujours un grand moment), et les voyages en voiture, où la cassette tournait en boucle dans l'auto-radio. Parce qu'il me paraissait trop difficile d'aborder les Beatles autrement, ce best-of m'a convenu pendant un moment. Quand j'ai eu ma première voiture (avec autoradio CD please!), "One" tournait à fond, les fenêtres grandes ouvertes, parce que faire la jackie sur les Beatles était un plaisir sans nom.
Avec les années, quand on est un peu curieux, la culture musicale grandit. D'autant plus quand on côtoie des gens qui semblent avoir grandi dans une encyclopédie. Ce genre de personnes qui parviennent à vous sortir des anecdotes sur chaque chanson, chaque artiste et chaque mélodie qui passent dans une conversation. Si ce genre d'amis vous font vous sentir tout petit, ils ont aussi le talent de vous pousser à la découverte, et de vous guider sans s'en rendre compte. Le jour où vous voulez les épater, vous mettez donc Revolver sur la petite platine vinyle récemment achetée, avec un détachement feint, genre "je l'écoute tous les jours voyez-vous". Bon, évidemment, ça ne trompe personne, mais cela a un intérêt le lendemain, quand vous vous repassez alors le disque pour vous même. Parce que l'appréhension, la peur d'être déçu, la montagne que vous vous faisiez s'est écroulée sans s'en rendre compte, et qu'il est temps d'accueillir l'histoire dans son salon.
Pour autant, je ne me suis pas alors lancée dans une écoute chronologique, dans des après-midis complètes d'immersion ou de voyage temporel dans les sixties. Non, j'ai choisi un album après l'autre presque au hasard, guidée par les titres que je connaissais déjà. Je mettais le disque sur la platine et vaquait à mes occupations, avec un fond musical terriblement rétro, et très motivant. Ainsi, sans m'en rendre compte, tous ces vinyles ont défilé l'un après l'autre. J'ai commencé à connaître des morceaux, sans pour autant mémoriser leur titre. Une sorte d'apprentissage tranquille, poussé par la seule envie, par le seul plaisir d'entendre le vinyle crissé sur la platine. Parce que c'était finalement ça l'important.
Aujourd'hui, j'ai la discographie des Beatles sur mon Itunes depuis pas mal de temps. Pourtant, je ne l'ai pratiquement jamais écoutée. Parce qu'écouter les Fab Four sur mon ordinateur n'est pas un plaisir. J'ai l'impression que quelque chose s'est perdu en chemin. Ce que j'aime en écoutant mes vinyles sur ma petite platine merdique, c'est qu'il tourne parfois trop vite, que le son craque, que le frottement se répercute dans les petites enceintes, ou que j'oublie parfois de remettre le réglage sur 33. Mais surtout, lorsque je les écoute ainsi, quand "A little help for my friends" ou "I Want to Tell You" sortent des enceintes, j'imagine mon père à mon âge, à côté de sa propre platine. Je vois un jeune mec qui découvre le rock tel que j'aurais rêvé de le faire, un mec qui n'est pas encore mon père, un gamin qui n'a pas envie de faire son service militaire et qui conduit une vieille mobilette en tentant de faire rentrer sa tignasse dans le casque.
Lorsque j'écoute les Beatles, je vis ma version idéalisée des sixties. J'envie la chance d'avoir eu une adolescence bercée par cette musique, j'envie le sentiment de libération, l'explosion d'un genre aujourd'hui installé, l'impression d'être au commencement d'une grande histoire. Au-delà du plaisir musical d'écouter des titres qui ont vraiment l'art de me mettre de bonne humeur ou de me faire planer, il y a ce plaisir de voyager, de quitter une époque pour une autre. J'adore la musique de mon époque, mais je l'apprécie sur le support qui l'a vue naître. Ecouter de l'électro-rock sur mon ordi ne me dérangera jamais, mais malgré tout les défauts de ma platine, elle seule me permet d'apprécier vraiment d'écouter les Beatles, ou les Who, ou même plus récemment The Last Shadow Puppets. Parce que tout celà est lié, parce que tout cela symbolise une époque. Et si nostalgie il y a, autant la vivre complètement.
Elise
les Beatles sur albumrock
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