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Compte-rendu de concert

Kiss


Date : 13/06/2023
Salle : Palais 12 (Bruxelles - BELGIQUE)
Première partie :

Bons bisous de Bruxelles !

 
Daniel, le 19/06/2023
( mots)

Quand on prie la bonne étoile…


Vous connaissez forcément la suite (en musique) : … la Fée Bleue secoue son voile et vient t’accorder ce que tu as demandé (1).


Le pire, c’est que c’est vrai.


Je collectionne compulsivement les confettis rectangulaires que Kiss expédie dans les airs en clôture de ses concerts. Pendant "Rock and Roll All Night". Or, comme j’étais perché sur un balcon au bout du Palais 12, j’ai longtemps cru qu’aucun précieux trophée ne viendrait jusqu’à moi. Désespoir. Et c’est là qu’est intervenue la Fée Bleue (ou la magie du rock). Mon regard a été attiré par un confetti solitaire qui tourbillonnait en altitude à la verticale de la table de mixage, une quinzaine de mètres devant moi. Et un souffle divin a lentement porté l’objet précieux dans ma direction. Le vol a été chaotique et stressant, alternant les montées en altitude et les descentes en vrille.


En bout de course, le confetti est passé sous le nez de mon opulente voisine de rangée. Enfin, après une petite boucle élégante, il s’est posé paisiblement contre mon pied gauche. Je suis resté tétanisé. Après une éternité, je me suis baissé très lentement, histoire de ne pas créer une turbulence fatale. Et je l’ai ramassé. Ça devrait être le dernier. Il sera encadré avec les autres. Ceux d’Anvers, d’Amsterdam, de Paris, de Copenhague …

Avec tout ça, je n’ai pas entendu le dernier titre du concert.


Troisième dernier baiser


La tradition des bisous varie selon les époques et les régions : le nombre varie d’un seul bisou (en Belgique) à quatre bisous dans certaines régions hexagonales, en passant par trois là où il faut louer la Sainte Trinité.


Ce soir, c’est déjà le troisième bisou d’adieu définitif que j’adresse au groupe de mon cœur. Ce qui me permet de compter dans ma collection trois t-shirts "End Of The Road" identiques (seules les dates et les villes ont évolué au dos).


Skid Row, un vaisseau fantôme du New-Jersey égaré dans la fameuse tempête "hair-metal" qui a endeuillé la fin des années ’80, assure une première partie dispensable. La salle est encore loin d’être remplie, le son est clairement bridé, les compositions sont datées (même les plus "récentes") et les gesticulations un peu vaines des acteurs évoquent souvent un Spinal Tap qui tournerait à vide.


C’est que le public attend ses héros. L’un rectifie le col de son t-shirt. L’autre ajuste son Perfecto. Le troisième vérifie s’il reste un peu de bière light dans son gobelet.


Pour paraphraser la merveilleuse formule d’un journaliste zurichois (je cite de mémoire), il arrive un temps (un âge) où ce ne sont plus les artistes qui portent leur œuvre sur scène ; ce sont l’œuvre et le public qui portent les artistes. Ce temps est venu. L’expression va démontrer ici toute sa pertinence.


Parce que le spectacle confine au rituel. Il a été élaboré, plan après plan, comme un gigantesque film immersif en 3-D au sein duquel les quatre musiciens finissent par se fondre. On sait que le Diable se cache dans les détails. Et l’habilité technique du staff est remarquable. A chaque instant, un reflet de couleur (sur la cuirasse, sur la perruque, sur le masque, sur l’instrument) permet, comme si c’était encore nécessaire, d’identifier les musiciens : rouge pour The Demon, vert pour The Catman, violet pour The Starchild et bleu pour The Spaceman.


En quelques secondes, tous les sens humains sont débordés. Après deux minutes, les oreilles sont aveugles et les yeux deviennent sourds. J’adore.


La comparaison avec un film vaut d’autant plus qu’à l’exception de quelques petites erreurs humaines, il est difficile de trouver une différence notable entre les trois concerts de la tournée que je viens de voir.


Ah si, il y a une différence ! Gene Simmons commence à accuser le poids du temps et de son armure. Ses camarades de combat et la gigantesque machinerie qui régente le spectacle prennent soin de l’épargner, en lui réservant des petits moments où il peut récupérer dans l’ombre, à l’écart des feux de la rampe. (2). The Demon tire la langue, crache le feu, vomit du sang, s’envole dans les airs mais, entre ces "passages obligés", il semble lentement se désincarner, laissant à Paul Stanley le soin de diriger la manœuvre en monopolisant les regards et les attentions.


Et il y a de la tendresse entre ces deux hommes lorsque le guitariste réorchestre (avec la complicité instinctive de Tommy Thayer et d’Eric Singer) les chœurs de "Calling Dr Love" dont le bassiste aborde le refrain à contrepoil (alors qu’il le pratique au quotidien depuis 1976).


Réparti sur trois générations (et plus), le public, éternel cinquième membre du groupe, anticipe chaque détail du show comme un majordome britannique exigeant qui veillerait au bon "déroulé" d’une soirée mondaine. Vivre un concert de Kiss est une expérience totale et définitive. C’est comme regarder aujourd’hui le premier Back To The Future (1985) avec des fans hardcore qui étaient adolescents lors de la sortie du film. Les répliques fusent avec une scène d’avance et toutes les mimiques sont grimacées dans le divan avant leur passage à l’écran.

Alors, quitte à voyager dans le Temps aux commandes d’un spectacle, autant en choisir un qui ait de la gueule ! Et c’est vraiment le cas.


Malheureusement, le Temps en question s’égrène trop vite et, tandis que le confetti tant convoité atterrit à mes pieds, les dernières notes de mon dernier (3) concert de Kiss résonnent déjà dans le Palais 12.


Je me lève mécaniquement et, envahi par une nostalgie existentielle que j’ai rarement connue, je me remémore ces bribes d’un texte (partiellement crédité à Lou Reed) :


Un monde sans héros
Est comme un oiseau privé d’ailes
Ou une cloche sans battant
Une réalité aussi triste qu’inutile
Où tu ne sais même plus ce que tu cherches (4)


Non Madame, on ne fait pas n’importe quoi !

Parmi les gestes qui mériteraient une condamnation pénale, le maquillage « Paul Stanley inversé » reste une authentique calamité. Cela fait des décennies que je vais voir les concerts de Kiss et il se trouve toujours au moins un idiot pour se dessiner une étoile noire sur l’œil gauche. J’ai longtemps réfléchi à cette curiosité avant de comprendre que si l’on regarde une photo de Paul de face en se maquillant dans un miroir, on obtient cette irréparable hérésie.


Ce 13 juin 2023 n’a évidemment pas failli à la tradition. L’idiot était cette fois une petite idiote de 45 printemps grimée à l’envers. Elle m’a souri dans le métro quand elle a vu que je l’observais avec un air atterré. L’idée m’est venue de l’étrangler pour l’exemple. Mais elle était accompagnée par deux gros hardos costauds…

Je me suis dit : "Laisse béton !"


Set List

Detroit Rock City
Shout It Out Loud
Deuce
War Machine
Heaven’s On Fire
I Love It Loud
Say Yeah
Cold Gin
Lick It Up
Makin’ Love
Calling Dr. Love
Psycho Circus
100,000 Years
God Of Thunder
Love Gun
I Was Made For Lovin’ You
Black Diamond

Encore

Beth
Do You love Me
Rock and Roll All Nite


(1) Les amateurs de niaiseries auront identifié la chanson-phare de Pinocchio de Walt Disney (1940). Une reprise de cette chanson clôture l’album Kiss de Gene Simmons (1978).

(2) De façon très diplomatique, l’entourage du groupe évoque des difficultés d’adaptation de Gene Simmons à la chaleur ce qui semble paradoxal pour un ressortissant clandestin des Enfers qui évolue sur une scène où ce sont des lance-flammes qui marquent le tempo.

(3) Au risque de me répéter (puisque c’est déjà la troisième fois que je rédige les mêmes mots), je pense vraiment que c’est la fin de la route. Insister serait déplaire. Même si la demande (ou le besoin) est là. Est-ce que ce public multigénérationnel pourrait se satisfaire d’une franchise officielle qui verrait des musiciens plus jeunes poursuivre les représentations du grand Barnum ? Ca s’est déjà vu. Avec The Glenn Miller Orchestra, The Platters ou Genesis (période Gabriel). Mais, est-ce que ça aurait encore un sens, si ce n’est de panser les petites plaies de notre nostalgie ?

(4) Pour l’anecdote, en 1981, "A World Without Heroes" aurait été, selon certaines sources, le premier clip de Kiss diffusé en rotation sur MTV, ce qui n’a pas empêché l’album The Elder d’être un désastre commercial. 

 
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