The Old Man and The Sea
The Old Man and The Sea
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En 1973, Lars Ulrich était loin de former Metallica, mais il eut, d’après la légende, une révélation musicale lors d’un concert de Deep Purple à Coppenhague au Danemark. Revenant sur ce séjour, il met en avant les goûts musicaux des Danois au début des 1970’s : « But when I was growing up in Denmark in the ‘70s it was all about Deep Purple and Black Sabbath and Uriah Heep; Led Zeppelin were not part of that conversation in Denmark so much. » (Martin Popoff, Wheels of Steel : The Explosive Early Years of the NWOBHM, Power Chord Press, page 13). On pourrait supposer un biais lié à l’échantillon qu’il a pu rencontrer sur place, mais le bon connaisseur de la scène rock danoise du début de la décennie ne sera pas vraiment étonné par ce tropisme pour les groupes Heavy à claviers ayant des tendances progressives. En effet, dans la première moitié des 1970’s, les groupes danois de Heavy-prog’ se multiplièrent : Culpeper’s Orchard, Blast Furnace, Pan ou encore The Old Man and the Sea.
Empruntant à Hemingway son nom et affichant un requin agressif en couverture, le combo, actif de 1972 à 1975, ne fit paraître qu’un seul album sur lequel les orgues sont déployées et les guitares affutées. Une musique énergique qui offrit une belle reconnaissance du public danois à l’époque, et quelques premières parties de choix (Led Zeppelin notamment).
L’influence de Deep Purple et d’Uriah Heep (pour la dimension plus progressive) se fait énormément ressentir : "Living Dead" possède une introduction typique du Pourpre, puis un développement plus proche d’Uriah Heep, avec une belle puissance, du groove, et un solo assez calibré pour le style. Plus loin, "Princess" affiche encore davantage son héritage, c’est de l’Uriah Heep pur-jus avec son introduction acoustique, puis l’arrivée des claviers en contraste, afin de renforcer le titre.
Mais The Old Man and the Sea pioche dans d’autres gisements. Après que "Prelude" nous a introduit dans "The Monk Song" à la manière d’un accompagnement de cantique, une première partie s’ouvre sur une ligne agressive à la guitare, en rupture immédiate avec la partie acoustique et ses chœurs yessiens ou le solo de flûte à la Jethro Tull. La seconde partie est un Heavy-prog’ au riff efficace comme Atomic Rooster en avait déjà composé (il y a également du Led Zeppelin dans les lignes de chant) : c’est une des meilleures compositions du groupe. La plus grande pièce, "Going Blind", dépasse les dix minutes et surprend dans son développement : la première mélodie de guitare s’avère un peu kitsch mais parvient à toujours demeurer sur le fil, puis le titre évoque un mélange entre Jethro Tull (pas seulement pour la flûte, les mélodies au chant sont aussi à mettre en parallèle) et Uriah Heep ; on soulignera la belle prestation au chant. Puis, le solo est en forme de semi-improvisation sur fond jazz-rock, qui glissera vers un final funky après un retour sur le couplet/refrain. On retrouve sur "Jingoism" ce détour vers le jazz dans sa partie centrale (à la limite du latin-jazz), même si le morceau au rythme plus rapide est également plus dansant, presque disco si l’on excepte les instruments utilisés.
A la frontière avec l’Allemagne et riche d’une histoire culturelle commune avec l’Angleterre sur le temps long, le Danemark avait tout pour subir les multiples influences des grands pôles de la musique rock en Europe dans les 1970’s, comme l’illustre à sa façon l’éphémère The Old Man and the Sea.
A écouter : "Linving Dead", "The Monk Song part 2", "Going Blind"