↓ MENU
Accueil
Première écoute
Albums
Concerts
Cinéma
DVD
Livres
Dossiers
Interviews
Festivals
Actualités
Médias
Agenda concerts
Sorties d'albums
The Wall
Sélection
Photos
Webcasts
Chroniques § Dossiers § Infos § Bonus
X

Newsletter Albumrock


Restez informé des dernières publications, inscrivez-vous à notre newsletter bimensuelle.
Critique d'album

Shame


Songs of Praise


(12/01/2018 - - Post punk - Genre : Rock)
Produit par

Note de 4/5
Vous aussi, notez cet album ! (11 votes)
Consultez le barème de la colonne de droite et donnez votre note à cet album
Note de 3.5/5 pour cet album
"Un premier album réussi et maitrisé, auquel il manque peut-être un petit grain de folie..."
Raphaëlle, le 20/02/2018
( mots)

Début de l’année, vous avez pris vos bonnes résolutions : vous faire votre propre lait d’amande tous les matins, dénicher les prochains The XX, prendre illico vos billets pour We Love Green. Pendant ce temps, de l’autre côté de la Manche, on se lance dans le Dry January, initiative plutôt louable consistant à ne pas toucher une goutte d’alcool pendant tout le mois de Janvier. Autrement dit: ce n’est pas parti pour être une année très folichonne. 


Un quintette d’anglais pointe le bout de son nez avec son premier album : Songs of Praise. Ils sont jeunes et mignons, ils tiennent des brebis dans les bras dans une mise en scène qui évoque l’album culte des Beach Boys. En tout logique, vous vous attendez à de l’indie pop, quelque chose de délicat et d’enfantin. Selon une étude très sérieuse réalisée par Albumrock, voici ce qui va se passer : vous lancerez la première piste, vous chercherez un siège pour encaisser le choc, vous écouterez tout l’album d’une seule traite.  


Shame attaque le sujet par la face post-punk, c’est-à-dire que leur musique se caractérise par des couches de musique saturées et une certaine noirceur dans le propos et le son. Songs of Praise est tout aussi délicat que brutal, hésitant entre la volonté d’en découdre et la chronique post-adolescente pleine d'ironie. Sur le papier, il y a de quoi le sacrer illico album de l’année. Hélas, l’enthousiasme initial est vite douché par les écoutes successives. Cet album a un charme fou, pourtant, il n’offre aucune aspérité, aucune faille dans laquelle l’auditeur pourrait se perdre, écoute après écoute. Certes, chaque chanson est parfaitement bien exécutée, cohérente de la première à la dernière seconde. Mais Shame canalise trop l’écoute de son auditeur, le forçant à regarder dans la même direction que le groupe. C’est bien connu : plus le mouvement est forcé dans un sens, plus la résistance s’accroit. On cherche l’aspérité, l’hésitation, le doute dans cette musique qui ne laisse aucune place pour cela.  


Pourtant, Shame ne ménage pas sa peine pour balancer une énergie brute à la face de son public. C’est l’album d’un groupe qui a rôdé sa musique pendant trois ans sur les routes d’une tournée sans fin, à petit budget, c'est l’album d’un groupe qui jette toutes ses tripes dans la bagarre, comme si rien ne devait venir après. Dans la cadence élevée de "Concrete", dans les riffs de "Tasteless" ou ou le déchainement de "Lampoon", partout la même tension qui agrippe l’auditeur. La production, assurée par Dan Foat et Nathan Boddy, a su capter cette énergie brute et la restituer de façon intacte sur piste. L’osmose du groupe est alors éclatante, comme sur ces titres où les chanteurs mêlent leur voix en jouant sur la différence de tessiture.


La voix des chanteurs est d’ailleurs un instrument de Shame à part entière. Tantôt caressante ("I don’t want to be heard if you’re the only one listening", malicieuse, sur "The Lick"), tantôt en pleine crise d’angoisse ("I would rather fall, go!", s’époumone Charlie Steen sur "Donk"), elle se démarque par une tonalité grave et puissante, pleine de charisme. Shame fait preuve d’ironie ("I like you better when you’re not around" sur "Tasteless"), ou d’une profonde désillusion (sur "One Rizla": "I’m not much to look at/And I ain’t much to hear/But if you think I love you/You’ve got the wrong idea", avant de conclure: "You’re clinging to conflict, just let go"). En termes de désillusion post-adolescente, les Cure, ces papes du post-punk, n’auraient pas dit mieux.


Certains morceaux sont une jouissive démonstration de force, comme "Dust on Trial", "Concrete", "Tasteless". Leur cadence soutenue, la guitare ne nous laissant pas le moindre répit, donne irrésistiblement envie d’être en concert pour se perdre dans la fosse. Shame coche tous les cases du rock efficace mais bas de plafond : du riff, de la sueur, des cris. Pourtant, là encore, subsiste cette drôle de sensation, où on admire la maîtrise des codes sans pour autant arriver à totalement lâcher prise. Parfois, c’est un peu trop, comme "Donk" et "Lampoon", pour qu’on ne voie pas la grosse ficelle.


Le groupe ose nuancer son propos et c’est là qu’est la véritable bonne surprise. Ces respirations sont d’autant plus bienvenues qu’elles permettent de replonger la tête baissée dans les titres les plus crasseux. Ainsi, "One Rizla" est un clin d’oeil appuyé à la pop, étant le titre le plus mélodique de l’album. "The Lick" mêle un spoken word, à la limite du rap, avec des chants de pleine voix. La position de la piste dans l’album n’est pas anodine, car elle brise un début de monotonie et prend par surprise après "One Rizla". "Friction" adopte une structure refrain-couplet plutôt classique, avec des respirations qu’apportent les aigus des guitares. Sur "Gold Hole", bien caché après près de deux minutes trente de "Shake Me Up" beuglés par un chanteur déchainé, un joli solo dans la plus pure tradition shoegaze fait son apparition et enveloppe la chanson, canalise son énergie vers le chant. L’album contient aussi une jolie montée en puissance élégamment maîtrisée, sur une piste au nom évocateur, "Angie".

Reste surtout la curieuse sensation d’être passé à côté du sujet à la fin de l’album. La production est un peu trop léchée, les voix se détachent bien des instruments, le son manque de rugosité. Les paroles désabusées tranchent avec la rage des guitares. Quelque chose nous échappe, alors on réécoute, encore et encore, mais chaque tentative rend leur musique de plus en plus insaisissable. Il faudra probablement aller se frotter à leur musique en concert pour en mesurer toute la charge émotionnelle mais en attendant cet album a un goût d'insatisfaction. Et c'est bien dommage, tant il est par ailleurs réussi.

Commentaires
Jean-jean, le 10/03/2018 à 10:41
Elles ressemblent vachement à des cochons leurs brebis.