Semiramis
Dedicato a Frazz
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1- La bottega del rigattiere / 2- Luna Park / 3- Uno zoo di vetro / 4- Per una strada affollata / 5- Dietro una porta di carta / 6- Frazz / 7- Clown
Pour les non-initiés, le rock progressif italien des années 1970 a tout du jardin secret dont la luxuriance n’a d’égale que sa nature mystérieuse. Cela est d’autant plus vrai qu’en son sein, il y a des plantes cachées, des arbustes exotiques magistraux mais peu connus, comme l’est Dedicato a Frazz, unique album de Semiramis. Avec cette œuvre étrange, on s’aventure dans les recoins les plus reculés de la jungle progressive, quoique désormais, elle ait obtenu une petite connaissance parmi les initiés.
Tout commence avec son ramage, le visage sempervirent d’un géant qui se confond dans le paysage, la crinière automnale flamboyant dans des cieux assombris. Un vent de mystère souffle sur cette pochette, mais ce n’est rien à côté des méandres musicaux qui attendent l’auditeur curieux.
Le savant mélange de rock progressif symphonique et de registre plus expérimental s’affiche dès les premières secondes de "La Bottega Del Rigattiere" quand le vibraphone véloce s’accorde aux claviers analogiques, pour mener à des thèmes répétitifs, à une succession de plans de guitare électrique ou acoustique, à la stricte frontière entre les étrangetés musicales et les canons progressifs plus mélodiques (notamment le final). Plus difficile d’approche, "Clown" est volontairement très abrupt, plein de ruptures et d’accélérations, de pauses aérées brusquement rompues par des lignes répétitives et agressives le rendant tantôt hypnotiques, tantôt épileptique. À l’inverse, "Dietro Una Porta Di Carta" arbore un symphonisme plus assumé, grandiloquent et mais parfois apaisé, où les claviers disposent de toutes latitudes pour développer une musique aux contours yessiens, jusqu’au final plus heurté et crimsonien – et franchement virtuose.
Le déluge de notes qu’est "Luna Park", qui semble imiter un roller-coaster vertigineux, reprend cette ambition symphonique en l’agrémentant d’une touche italienne baroque et traditionnelle grâce à une guitare subtile. On retrouve cette réinterprétation de l’esthétique progressive italienne sur l’introduction de l’exigeant "Frazz", avant que le titre ne déroule une chanson acoustique aux claviers langoureux qui dérive vers des sentiers plus Heavy. L’impressionnant "Uno Zoo Di Vetro" paraît se servir de cette douceur italienne, ici dirigée vers une esthétique Renaissance et par des orgues baroques, pour nous rassurer avant d’installer un contraste quand il bascule dans une ambiance inquiétante et horrifique où les claviers et guitares s’avèrent agressives et multiplient les sonorités angoissantes.
Amateurs d’étrangetés progressives, de trésors perdus et d’œuvres inclassables, vous trouverez là une bonne raison de vous perdre dans les arcanes sonores des 1970’s en général, et de la scène prog’ italienne en particulier.
À écouter : "Luna Park", "Uno Zoo Di Vetro"