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Critique d'album

Rome


Hell Money


(20/10/2012 - Trisol - folk industrielle - Genre : Chanson / Folk)
Produit par

1- Tangier Fix / 2- Fester / 3- This Silver Coil / 4- Rough Magic / 5- Among the Wild Boys / 6- Amsterdam, the Clearing / 7- Silverstream / 8- Tightrope Walker (Wild Milk) / 9- Pornero / 10- Golden Boy / 11- Red-Bait / 12- The Demon Me (Come Clean)
Note de 3/5
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Note de 4.0/5 pour cet album
"Une oeuvre brûlante pour un enfer de nostalgie. "
Kevin, le 06/12/2012
( mots)

Rome a largement dominé de son emprise la scène néofolk de la fin des années 2000. Le projet luxembourgeois drivé par l'auteur-compositeur-interprète Jérôme Reuter larguait des bombes folk noires et martiales, aux confins à la fois de l'industriel et de l'expérimental. Avec sa voix de baryton pas content à la Nick Cave, il embaume de gravité ses funestes ambiances guerrières à la sauce Verdun. Mais le temps faisant son œuvre, petit-à-petit, Jérôme et ses potos s'adoucissent et enfouissent au fond d'eux leur violence pour libérer de petites merveilles folk, souvent acoustiques et toujours aussi tendues. Après Nos Chants Perdus à la gloire de la Résistance, doux et noir comme une nuit sans étoile ; puis le triple album Die Æsthetik der Herrschaftsfreiheit, littéraire et historique, les musiciens de notre Grand-Duché préféré ponctuent 2012 d'un Hell Money serein, personnel et bigrement beau. 

Passons sous silence tout le passé du groupe et focalisons-nous sur cette récente livraison. Car si la trajectoire de Rome s'entend ici, c'est surtout en négatif, surtout parce que cet album est comme une pause, l'opportunité offerte d'observer autre chose. Et ce que Rome observe ici, il l'observe à travers le prisme introspectif de son chanteur. Hell Money aurait pu être un album de plus dans la veine néofolk dépressif, mais son humanité bouleversante et le talent des bonhommes en font une pièce unique et glaçante. C'est un temple dédié à la mélancolie, presque même au regret. En tout cas, c'est un regard lancé en arrière dont, semble t-il, personne n'est sorti indemne. Il n'y a qu'à écouter le saisissant "This Silver Coil" qui s'achève par ces mots pleins de sens : "My hands are tied, the spirit is gone. And where is the fire, that once kept me going ?"

L'album n'offre quasiment aucune pause, tendu comme un fil barbelé du début à la fin, il s'enroule comme la fatigue et la lassitude s'attaquent pernicieusement aux âmes épuisées. Tantôt acoustiques, tantôt bardés d'arrangements expérimentaux, les douze titres servent sans réserve une entreprise de sape déstabilisante. Dès l'intro chamanique "Tanger Fix", puis surtout le single "Fester" présent dans un EP sorti quelques semaines plus tôt, la voix caverneuse de Reuter pèse de tout son poids sur nos fébriles cordes sensibles. Entrelacs de guitares, basse rondelette, échos malveillants, "Fester" se veut rentre-dedans et affiche la couleur d'un accueil avec les dents. Mais le muscle fond peu à peu, d'abord au fond du crève-cœur "This Silver Coil" et son refrain d'une puissance inouïe, enguirlandé de timides touches de piano. "Rough Magic" dénude les compositions mais conserve de la force dans la voix, avant que "Amsterdam, the Clearing" remette une bonne dose de chique et de sang dans un torrent ingérable de mélancolie brute. Puis, en fin de course, "Golden Boy" rameute une dernière fois ces effluves de violence à peine contenue dans un débordement maîtrisé de fougue et de colère.

Mais à cette unique exception près, la seconde moitié de Hell Money joue la carte de l'abandon et propose des compositions nettement plus épurées. Au rang desquels, un "Tightrope Walker" poignant où quelques arpèges de guitares se tamponnent sous l'égide de rares grondements de cordes qui colorent les refrains. Que dire de "Pornero", si ce n'est que la voix voilée de Reuter n'est accompagnée que des pincements d'un banjo isolé servant une ambiance étrange et inconfortable. Mais l'apogée intervient en toute fin, Reuter chante sa propre face cachée dans "The Demon Me (Come Clean)", sa peine et ses regrets autour d'une ritournelle et de samples qui se répètent à l'envi. Il se dévoile pour la première fois en neuf albums, évoque ses douleurs et se confesse sereinement. Bien que cette pénitence clôt l'album, elle est quelque part celle qui justifie tout le reste, comme le point de départ du processus de création. Reuter a accouché de Hell Money en une semaine, sans revendication ni (trop de) référence littéraire. Un album pour lui, par lui et quasiment à propos de lui, comme une échappée égocentrique au milieu de la carrière du projet Rome. 

Ce neuvième opus offre donc à la fois un pas en avant dans la continuité folk du groupe amorcée en 2009 et un pas de côté tant il est suspendu par d'autres mécanismes. Mélancolie, romantisme, confession et violence frustrée, voilà les éléments qui font de ce Hell Money un instant unique et rare, d'une sincérité bouleversante. Si le groupe s'éloigne encore peu à peu de ses publics originels (gothique, métal et indus), il produit ici une œuvre intemporelle qui peut toucher quiconque veut bien l'écouter.

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