Paskinel
Maraude Automnale
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1- La danse des feux follets / 2- Tartempion / 3- Bille en tête / 4- Maraude automnale / 5- One o'clock / 6- Cristal qui songe / 7- L'écho noir / 8- Au forum des commérages
"Maraude automnale", "La danse des feux follets", "Au forum des commérages" … Autant de titres qui évoquent l’imaginaire poétique et décalé forgé par la plus belle tradition du rock progressif français, plutôt dans son versant théâtral et symphonique – on citera pour mémoire Ange, Mona Lisa ou Atoll. Mais si Paskinel est bien un projet progressif français, soutenu par le label Vallis Lupi qui creuse son sillon dans ce genre esthétique depuis plusieurs années (Grandval, Enneade, Half a Band), ce n’est pas dans ce courant dit symphonique qu’il s’inscrit.
La poésie des titres cache en effet une musique instrumentale assez éloignée du symphonisme puisqu’il s’agit de l'œuvre soliste de Patrick Dufour sous pseudonyme (Paskinel donc), accompagné par Frédéric Chaput, tous deux membres d’Alco Frisbass, une formation héritière d’une branche plus expérimentale de la scène hexagonale, qui n’hésitait pas à se revendiquer d’inspirations Zeuhl, RIO ou jazz-rock, sans finalement entrer dans une de ces cases. Sur cet album, les deux compères se sont associés à plusieurs musiciens afin d’enrichir leur palette (on aura le droit à de la flûte, du saxophone et du violon, entre autres), dont Fabrice Chouette, également membre d’Alco Frisbass qui intervient à l’orgue sur le premier titre.
On évoquera volontiers l’École de Canterbury parmi les inspirations de Paskinel, notamment à l’écoute de "Cristal qui songe", le morceau où l’influence de cette scène est peut-être la plus sensible, mais aussi de "Tartempion", en raison de certains choix dans les sons de claviers de ce titre jazz-rock dominé par une guitare aérienne et virtuose.
Le jazz-rock justement, est la couleur musicale dominante de l’album, en témoigne le morceau-titre "Maraude automnale" qui associe remarquablement cette démarche aux aspérités progressives. "La danse des feux follets", bien nommée si l’on se réfère à l’énergie déployée, s’inscrit dans cette même esthétique tout en jouant sur les métissages : ici une guitare lapsteel bluesy (version Delta), là des variations très maitrisées sur les sons analogiques des claviers.
Globalement accessible, Maraude automnale nous emporte vers des chemins parfois plus escarpés. Angoissant et répétitif, "L’écho noir" emprunte des sonorités crimsoniennes et jazz-rock, fait grogner ses claviers saturés canterburyens, dispense de très beaux dialogues entre les instruments qui ne boudent pas le contrepoint. Le répétitif "Bille en tête" déploie une esthétique de prime abord minimaliste mais celle-ci cache bien des mystères et des surprises (quelles percussions !), de même que "One O’Clock", un morceau dans le même esprit quoiqu’un peu plus électrique. A l’inverse, le lumineux "Au forum des commérages" évoque Camel période Moonmadness, même si certains passages demeurent abrupts, et rappelle qu’entre les épisodes pluvieux, l’automne connaît des phases ensoleillées.
Au sein d’une belle année pour le rock progressif français, Paskinel se démarque par sa musique entreprenante, très riche, qui parvient à maintenir une formule accueillante malgré son exigence formelle, et offre quelques notes à glaner à l'ouverture des vendanges.
À écouter : "Au forum des commérages", "L’écho noir"