Lucifer
Lucifer V
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1- Fallen Angel / 2- At The Mortuary / 3- Riding Reaper / 4- Slow Dance In A Crypt / 5- Maculate Heart / 6- A Coffin Has No Silver Lining / 7- The Dead Don't Speak / 8- Strange Sister / 9- Nothing Left To Lose But My Life / 10- At The Mortuary (Halloween Edit) / 11- Maculate Heart (Radio Edit)
Le renforcement (salutaire) du sentiment écologique s’accompagne hélas de dérives mystiques voire sectaires fondées sur le culte d’une nature fantasmée, qu’elles répondent à une eschatologie collapsologique ou qu’elles portent une condamnation du progrès qui confine à l’antiscience. Cela s’incarne parfois dans des dérives spirituelles faisant référence à la sorcellerie, au féminin sacré, au chamanisme sous toutes ses formes – du charlatanisme mystique maquillé en développement personnel lucratif (ou inversement, selon le public cible). À côté de cela, toute une esthétique ésotérique se déploie au sein des productions culturelles et les musiques saturées sont particulièrement atteintes : depuis ses débuts, Lucifer s’en est emparé et ce malgré ses évolutions stylistiques. Et c’est loin d’être un cas à part : il suffit de se rapporter aux groupes qui l’accompagnent cette année en tournée, qu’il s’agisse des vétérans de Coven ou d’Angel Witch (deux points pour les sorcières – ou pour Gryffondor ?) ou des jeunes pousses de The Night Eternal et d’Attic.
En bref, tous obsédés d’occulte.
Et ce cinquième album alors ?
Référence directe au nom du groupe, "Fallen Angel" démarre sur un riff typé NWOBHM pour poursuivre dans une direction lourde et se parer d'un refrain catchy ; il est suivi du luciférien "At the Mortuary", serti de cloches gothiques et d'aspérités doom en introduction, avant de retourner derechef vers leur rock aux mélodies quasi-pop (avec, comme toujours, des refrains irrésistibles) et d'installer un pont horrifique. En témoignent également plus loin le chaloupé "The Dead Don’t Speak" ou le gothique "Nothing Left to Lose but My Life", il n’y aucun doute possible quant au fait que Lucifer V s’inscrive dans la suite logique des trois volumes précédents – le premier demeurant un peu à part dans leur discographie.
Pourquoi ? À cause (ou grâce à) de l’influence de Nicke Andersson, frontman des Hellacopters et ici batteur, qui est telle que certains titres auraient pu intégrer le répertoire du futur album du combo d’action-rock – "Maculate Heart" (même si l’introduction acoustique est étonnante de leur part) voire même le slow "Slow Danse in a Crypt" (aux faux airs de Portishead). Et puisque The Hellacopters ont les faveurs d’une grande partie de la rédaction d’Albumrock, cette influence est clairement bienvenue d'autant plus qu'elle se ressent souvent au détour d'un riff ou d'un solo.
Sinon, il faut bien dire que le hard-rock occulte du groupe est bien inspiré cette année, qu’on pense au très efficace "Riding Reaper" dont les mélodies de guitare sont imparables, au tube ayant servi de single "A Coffin Has No Silver Lining" (dont le riff semble être issu du Thrash mais joué au ralenti), ou encore au straight-to-the-point "Strange Sister".
Sans bousculer les habitudes, Lucifer V est une réussite de bout en bout, là où l’honorable Lucifer IV avait dilué ses tubes ("Bring Me His Head", "Mausoleum" ou "Cold as a Tombstone") dans un ensemble plus classique. N’attendez rien de bien surprenant sur le plan esthétique, mais il n’est pas certain que ce soit l’objectif poursuivi par le groupe – ni même par les amateurs.
À écouter : "Riding Reaper", "A Coffin Has No Silver Lining", "Nothing Left to Lose but My Life"