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Critique d'album

Led Zeppelin


IV


(08/11/1971 - Atlantic / Warner - Blues, Folk and Heavy Rock - Genre : Rock)
Produit par

1- Black Dog / 2- Rock And Roll / 3- The Battle Of Evermore / 4- Stairway To Heaven / 5- Misty Mountain Hop / 6- Four Sticks / 7- Going To California / 8- When The Levee Breaks
Note de 5/5
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Note de 5.0/5 pour cet album
"Le Led Zep, l'un des plus grands chefs d'oeuvre du rock'n'roll"
Maxime, le 08/09/2007
( mots)

Quel intérêt de chroniquer, en 2007, le quatrième album de Led Zeppelin, alors qu’il est de notoriété publique qu’il constitue la bible du hard rock, son monolithe divin, sa pierre de Rosée sacrée, son horizon indépassable ? Franchement, autant pisser dans un violon. Est-il réellement indispensable de dérouler la sempiternelle et pénible litanie qui consiste à en vanter les mérites, à en expliciter la genèse, à en décortiquer la pochette, à se prosterner devant le génie de Jimmy Page et la frappe de John Bonham ? Des armées de rock-critics, tous plus chevronnés et documentés les uns que les autres, l’ont fait à longueur d’encyclopédie. Pourtant le Runes Album, le Four Symbols, le Zoso, tout ce qu’on voudra, reste un monument du rock. Un truc ultime, indépassable. Un disque parfait, de sa conception à sa postérité (presque 25 millions de copies écoulées depuis sa publication). La matrice géniale de ce que doit être un vrai, un grand, un pur disque de hard rock, tout comme le Machine Head de Deep Purple ou le Paranoid de Black Sabbath . Autant s’arrêter là et simplement dire : "écoutez. C’est juste grandiose." Ou bien prendre l’objet par l’autre bout de la lorgnette et de dire que le génie du Zep réside également dans les rondeurs chaleureuses de House Of The Holly ou dans les épiques moments de l’injustement sous-estimé Presence. De précieuses pépites qui restent cependant dans l’ombre de ce monument. Or, si l’on se reporte à la racine du mot, monument vient de monumentum en latin, autrement "dit qui fait signe". Comme un doigt pointant orgueilleusement vers l'avenir. Ce n’est pas peu dire si ce quatrième opus traumatisa les générations futures, Dave Grohl en tête, lequel se fit tatouer le symbole de John Bonham sur le poignet, à l’endroit même où d’autres préfèrent se taillader les veines. Sommet de la carrière du dirigeable, le Led Zep IV est tout simplement un disque de chevet, qui s’impose dès la première écoute, et qui enchantera encore les foules lorsque notre carcasse sera rongée par les vers. Ceci méritait bien une épaisse chronique. Alors pissons dans le violon, pissons chers amis, joignons nos jets afin de louer comme il se doit un tel disque.

Au début des années 70 Led Zeppelin est tout simplement un poids lourds du rock qui a rencontré un ample succès dès son premier opus et connaît une gloire identique à celle que vit (ou a vécu) un groupe tel que Metallica aujourd’hui. Problème, les rock-critics de l’époque jugent la chose trop commerciale, cachant par des compos suramplifiées un manque d’écriture flagrant et nullement comparable aux titres de Cream ou de Jimi Hendrix . Furieuse, la bande à Jimi Page s’enferme au Studio Island en décembre 1970, bien décidée à publier l’album définitif qui ferait taire une bonne fois toute glose de scribouillard frustré. Rapidement, le quatuor investit un manoir niché dans la campagne anglaise. Pendant le déménagement, on installe provisoirement dans le hall une nouvelle batterie que Bonham s’empresse d’essayer. Dès le premier coup de caisse, stupeur, l’acoustique est fantastique, le son monstrueux, pantagruélique. On dispose alors amplis et micros tout autour de l’instrument, qui ne bougera plus de son emplacement de fortune. L’ambiance est studieuse, les musiciens sont concernés, mais se laissent avant tout guider par leurs envies. Si un titre n’a pas trouvé forme satisfaisante au bout de deux heures, il est purement et simplement abandonné. Les séances s’avèrent rapidement productives, le Zep étant au pic de sa créativité et de sa puissance. Trop pour un simple album. Certains rebus figureront ainsi sur le futur double Physical Graffiti. De retour à Londres pour le mixage, Jimmy Page et l’ingé son Andy Johns constatent avec douleur que les bandes ont été altérées, l’audition tourne au désastre. Déterminé, Page retourne alors au Studio Island recommencer son travail homérique et y remixe tout l’album.

La maison de disque est rassurée. Oui, il y aura bien un nouvel album de Led Zeppelin pour Noël. Mais un communiqué du manager du groupe, le colosse Peter Grant, va mettre le feu aux poudres. Le quatuor exige qu’aucun nom, aucun logo, aucun titre ne figure sur la pochette. Chez Atalntic on crie au suicide commercial. Page rétorque qu’il en sera ainsi afin de "laisser parler la musique", et accessoirement que les critiques ne se focalisent pas sur le nom du groupe pour descendre d’emblée son nouvel opus. Le 22 novembre 1971 atterrit donc dans les bacs un bien étrange objet. Un disque à la pochette singulière, se dépliant au recto et au verso sur une vue d’une cité HLM en destruction dans la ville de Dudley. Au premier plan, sur un mur décrépi, la photo d’un vieillard accoudé sur sa canne, ployant sous le poids du fagot qu’il porte. Un personnage, qui selon Page, "est en harmonie avec la nature". Ce visuel n’en finit pas d’interloquer, tout comme la pochette intérieure qui représente un dessin d’un Hermite, neuvième arcane du livre de Thot, métaphorisant la solitude nécessaire du sage cherchant en lui-même. De même, les symboles signant l’album (un par musicien) achèvent de conférer à l’album son aura mystique. Plant choisit la plume, John Paul Jones une figure provenant du Livre des signes de Rudolf Koch évoquant confiance et compétence, John Bonham un sigle tiré du même ouvrage, trois cercles enchaînés censés suggérer la trilogie homme-femme-enfant, mais le bourru cogneur préfère y voir le logo d’une marque de bière (!). Le symbole de Page, alors en pleine période occulte, reste le plus sibyllin et même aujourd’hui, personne ne sait s’il est une composition personnelle ou s’il désigne, comme certains l’affirment, Lucifer. Le très prosaïque public américain préfèrera le nommer Zoso.

Toute cette imagerie brumeuse participera à consacrer la dimension mythique dont jouit l’album. Mais dès que le vinyle se pose sur la platine, les atours un peu précieux et surannés de ce décorum de bazar volent en éclats. Car le Led Zep IV est avant tout un disque mastodonte, un claque rock’n’roll, et débute en trombe sur "Black Dog", qui emprunte sa structure à un titre de Fleetwood Mac. Le riff emplit l’espace, tonitruant. Au moment du mixage, Page le triplera en en jouant un à gauche, un au centre, un à droite. C’est cela qui donne à cette ouverture son allure de charge de bulldozer. On a l’impression d’être collé à l’arrière du réacteur d’un Boeing en plein décollage. "Black Dog" est un chef d’œuvre de concision, de violence et de science sonique. Un Roller Coaster dantesque, diaboliquement assis sur une ossature rythmique irréprochable que tisse John Paul Jones. Abasourdies, les critiques se taisent. Il n’y a plus qu’à écouter et subir. Le dirigeable renchérit sur "Rock’n’roll" qui lui est inextricablement lié, tout comme l’enchaînement fatal "Heartbreaker"/"Leaving, Loving Maid" sur le Zep II. Le titre est né par hasard, alors que Jimmy Page se dégourdissait sur du Little Richard, Bonham durcit le débat et impose une intro nucléaire. Scotché, le guitariste façonne alors un riff aussi cahotant que tonitruant, dynamitant de vieux plans rock’n’roll des années 50, les faisant atteindre une énergie démesurée. Derrière ses fûts, Bonham évoque une figure inhumaine, mi-homme mi-bête sauvage. Une espèce d’Hephaïstos barbu et mauvais, martyrisant sa forge, brisant ses baguettes comme autant de brindilles. "The Battle Of Evermore" calme le débat et rappelle ces longues ballades inspirées des textes de Tolkien dont était truffé le Led Zep III, reposant sur un entremêlement de voix accompagnant la mandoline de Jones et Page et formant un idéal contrepoint à la furie qui lui a précédé.

Vient le cas "Stairway To Heaven". Un cas difficile pouvant, tout comme le "Imagine" de John Lennon , être considéré comme une merveille de construction ou un titre mièvre, chiant et prétentieux. Rattrapé d’une courte tête par le "Free Bird" de Lynyrd Skynyrd, c’est le titre le plus joué sur les radios classic rock américaines depuis son apparition. Esquissée en toute simplicité à Bron-Yr-Aur par Jimmy Page, on a tout dit sur la conception de cette chanson, inspirée du "Taurus" du groupe psychédélique Spirit. Elle s’articule sur plusieurs mouvements qui montent en crescendo avant d’aboutir à une section centrale plus électrique et animée, s’achevant sur un final pyrotechnique dans le plus pur style hard rock. Pour l’interpréter, Page a recours à sa fameuse Gibson Heritage Cherry EDS 1275 à double manche, l’une pour l’introduction et le solo, l’autre (à 12 cordes !) pour le reste. Quand au texte, on hésite entre l’évocation des légendes d’Arthur (que renforce l’utilisation du pipeau) et référence à l’échelle de Jacob décrite dans un épisode de la Genèse de la Bible, laquelle reliait la terre au ciel et qu’empruntaient les anges pour se rendre chez les hommes. Alors, "Stairway" est-il le chef d’œuvre de l’album, sa pièce ultime ? Pour Page et Plant, certainement pas, le premier lui préférant le final "When The Levee Breaks", le chanteur considérant le titre comme "une foutue chanson de mariage". Ce qui n’est pas totalement faux. Surtout que le disque, ici à mi-parcours, est loin d’avoir épuisé ses charmes.

La réussite de l’album provient également de sa redoutable construction. Sur chacune des deux faces, deux titres puissants laissent place à deux ballades plus enlevées, alternant virulence et accalmie, et conférant à l’ensemble une armature quasi-prototypique. Sur la face B, les réjouissances sont ainsi relancées par "Misty Mountain Hop" qui chevauche à nouveau en plaines tolkiennes. John Paul Jones lance le signal au piano électrique, Robert Plant secoue alors sa crinière, et se lance avec ses sbires vers de sommets liant parfum hippie et robustesse rock’n’roll. "Four Sticks" est un boogie lourd et rustre que malmène Bonham à l’aide de quatre baguettes (deux dans chaque main), d’où le titre du morceau. Derniers soubresauts d’un monstre repus de chair fraîche. L’apaisé "Going To California" jette un pont entre l’Angleterre (le charme du doux foyer) et l’Amérique (les frasques des tournées), où les groupies attendent le groupe de cuisse ferme. Bien plus qu’un appel à la lubricité déjà vantée à longueur de disques, Plant considère le titre comme un hommage à Joni Mitchell, auteur-compisteur folk à laquelle il voue une grande admiration. La séduction est totale, dans le dépouillement et les modulations de l’organe du chanteur. Bien plus que "Stairway To Heaven" c’est "When The Levee Breaks" qui s’impose comme l’ultime pièce épique du disque, liant les scansions plombées de Bonham, les langueurs de Jones, les éclats de Plant et le blues étiré tricoté par Page qui vire rapidement au psychédélisme transi. Le soleil de la Californie rejoint les brumes anglaises pour fermer la route d’une pièce d’anthologie.

A sa sortie, le disque est un carton complet, numéro un en Grande Bretagne comme aux Etats-Unis. Depuis, il est régulièrement cité comme étant l’un des meilleurs disques de tous les temps et le volet central de l’œuvre du dirigeable. Hard-rockers, métalleux, garage-rockers, stoners, tous ceux qui voulurent depuis ériger un blues électrique trapu ou pilonner des riffs définitifs furent obligés à un moment ou à un autre de se mesurer à cet album colossal. On n’est bien sûr pas obligé de croire ce pénible catalogue de superlatifs et d’anecdotes. Mais écouter ce disque confortablement calé sur son fauteuil, face à ses enceintes, reste l’une des façons les plus pures et jouissives de savoir ce que c’est que d’entendre quatre hommes jouant du rock’n’roll. Le vrai. Celui qui restera.

Commentaires
SpiritOfSummerAkaNoixDeCajou, le 13/05/2023 à 15:49
@Safran33 (décidément l’univers culinaire est omniprésent sur Albumrock) Je pense que le chroniqueur voulait parler de l’interprétation scénique de Stairway quand il a mentionné l’EDS 1275, puisqu‘il fait mention de passages joués à l’électrique uniquement en live (l’intro notamment). Quoi qu’il en soit, un des meilleurs, si ce n’est le meilleur solo de tous les temps a effectivement été enregistré sur Telecaster et non pas sur Gibson Les Paul contrairement à ce que pense beaucoup de gens. C’est comme pour les solos de ‘Another Brick In The Wall’ et ‘Comfortably Numb’ que Gilmour a immortalisés sur Les Paul et pas sur sa Strat habituelle (bien que le solo de Another Brick ait subit une « fenderisation » du son après enregistrement, ce que le solo de Comfortably Numb a dû subir aussi). Certes pour un néophyte ça peut paraître étrange mais pour qqun de plus expérimenté on reconnaît quand même facilement le grain caractéristique de la guitare qui a enregistré le solo.
Safran33, le 12/05/2023 à 21:02
Tout est dit et bravo pour cette très belle chronique qui justement émerge parmi les autres. Une petite rectification, le chorus de Stairway to Heaven, est joué sur sa Telecaster fétiche et non avec la Gibson EDS 1275.....
Arbitre, le 25/09/2020 à 05:37
"The battle of evermore" a presque des accents Genesis, dans la construction. Jolies parties vocales à partir du milieu du morceau. "Going to California" sonne comme une ballade folk un peu tourmentée. Ce sont deux bons morceaux, bien que peu représentatifs du groupe. "Stairway to heaven" est mythique, il ne faut pas en douter. C'est le premier morceau compliqué que j'ai appris à la guitare, d'abord d'oreille, puis en peaufinant à l'aide de tablatures. J'ai toujours captivé mon public avec ce morceau-là, en plus à ma grande surprise à chaque fois, les gens le reconnaissent immédiatement. "Misty mountain hop" est accrocheur, avec son riff joué au clavier et aux guitares. Mais je comprends parfaitement qu'on puisse hésiter entre "Stairway" et "When the levee breaks", tant ce dernier est une réussite. Une sorte de blues psychédélique avec un chant particulièrement suave de Plant. Pour moi aussi c'est le meilleur album de Zep que je connaisse.
Spartacus, le 27/07/2016 à 10:40
Rien à jouter, sommet. Tirez l'echelle
electricgypsyexperience, le 27/05/2016 à 11:00
excellente chronique pour moi contrairement à ce que vous dites Stairway To Heaven est le chef d'oeuvre de l'album.