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Critique d'album

Katatonia


Nightmares As Extensions Of The Waking State


(06/06/2025 - Napalm Records - Doom-detah, puis metal prog - Genre : Hard / Métal)
Produit par

1- Thrice / 2- The Liquid Eye / 3- Wind of No Change / 4- Lilac / 5- Temporal / 6- Departure Trails / 7- Warden / 8- The Light Which I Bleed / 9- Efter Solen / 10- In the Event of
Note de /5
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Note de 3.5/5 pour cet album
"Une mélancolie hors saison"
Julien, le 22/06/2025
( mots)

La sortie d’un album de Katatonia en plein mois de juin, à l’aube de la saison estivale, c’est comme une chandelle allumée en plein midi : une mélancolie hors saison. Loin de moi l'idée de prétendre que l'été et le metal seraient totalement incompatibles ; l’édition actuelle du Hellfest suffirait à elle seule à démonter pareille intuition. Non. En revanche, dans le cas de la formation suédoise, il y a une véritable dissonance, un frein à l'immersion dans leur musique, surtout lorsqu’elle est écoutée sous un soleil harassant et par 35 °C au thermomètre. L'obscurité si persistante dans l'ADN sonore de Katatonia, conférant à sa musique cette inaccessibilité latente, n’aurait-elle pas trouvé un écho plus juste si Nightmares As Extensions Of The Waking State avait été dévoilé au cœur de l'automne ? Un détail, certes, mais qui aurait facilité une immersion plus profonde dans ce nouvel album.
Un disque exigeant et résolument sombre, qui se distingue de son prédécesseur Sky Void Of Stars, en s’éloignant de l'immédiateté et de l'aspect organique portés par ses intentions, pour renouer avec des ambiances plus pesantes, un tempo résolument ralenti et une orientation plus progressive.


Nightmares As Extensions Of The Waking State est inévitablement marqué par les évolutions dans le line-up de Katatonia et par l’absence du guitariste cofondateur du groupe, Anders Nyström. Aucune des parties ne s’est épanchée en détail sur les raisons de ce départ. Il apparaît néanmoins évident que la prise en main quasi absolue de Jonas Renkse dans l’orientation créatrice de sa formation, revendiquée sur leurs trois dernières publications, constitue probablement la raison première du désengagement du guitariste. Le leader du quintette suédois ne s’est jamais caché de son emprise totale sur la direction qu’il impose à son groupe. Une autorité telle que, pour l’album City Burials publié en 2020, des rumeurs laissaient entendre qu’il s’agissait à l’origine d’un projet solo de Jonas Renkse.
Si le départ d’Anders Nyström est le plus emblématique de par sa contribution historique, il ne faut pas négliger celui de l’autre guitariste, Roger Öjersson. Cette quatorzième production marque ainsi l’avènement d’une nouvelle incarnation du jeu des six-cordes au sein des Suédois, avec les arrivées de Nico Elgstrand et Sebastian Svalland. Un changement majeur, certes, mais qui n’altère en rien la qualité intrinsèque de la performance instrumentale. On en prendra pour preuve l’aplomb et la pertinence mélodique du solo entendu sur "The Liquid Eye", et surtout la dimension majestueuse de celui de "Temporal", qui constitue l’un des temps forts de Nightmares As Extensions Of The Waking State.
Ce nouvel album prolonge une constante à l’œuvre depuis The Great Cold Distance (2007) : celle de lancer l’écoute de manière triomphale. "Thrice" perpétue cette tradition avec une composition immédiatement marquante, par sa pesanteur captivante et la puissance dégagée par ses riffs. Un titre qui rappelle combien Katatonia excelle lorsqu’il s’abandonne à la tension, comme en témoigne ce pont instrumental, véritable crescendo de suspense figé, qui nous maintient en apnée jusqu’à l’explosion tant attendue. À l’image de "Forsaker" (Night Is The New Day) ou de "The Parting" (Dead End Kings), "Thrice" condamne toute forme d’échappatoire, ne laissant d’autre choix que d’avancer sur le sentier des intentions enveloppantes dessiné par son créateur. L’air devient suffocant lorsque surgit une armée de fidèles récitant une incantation chamanique des plus inquiétantes sur "Wind of No Change". Une oppression irrésistible, marquée par une densité instrumentale dont nul ne se libère, malgré les "Hail Satan" répétés inlassablement. Autant de tentatives vaines pour satisfaire l’orgueil d’un démon à l’appétit insatiable.
"Lilac" vient prolonger cette brume familière dans laquelle Katatonia nous entraîne durant la première moitié du disque. Ce single concentre les caractéristiques bien connues du quintette suédois, porté par toute l’intensité mélancolique de la voix de Renkse, tandis que la partie instrumentale joue sur la déconstruction, distillant des instants de silence pour amorcer d’incessantes mutations mélodiques dans les lignes de guitare.


C’est dans la seconde moitié de l'opus que le souffle de l’innovation se fait plus intense. Cette originalité se manifeste notamment dans la piste "Efter Solen", chantée en suédois et construite autour d’une ligne de piano. Un morceau qui cristallise le paroxysme de l’identité de Katatonia, renvoyant implacablement à cette notion d’inaccessibilité qui habite leurs compositions. Il y a dans ce morceau une telle volonté perfectionniste, notamment dans le niveau de production avec ses arrangements électroniques, que l’ensemble en devient parfois hermétique. Rien ne semble pouvoir atteindre les Suédois. Leur contrôle est tel qu’ils paraissent intouchables. Il en résulte une absence de spontanéité qui tient l’auditeur à distance. On admire la performance technique, mais au détriment d’une implication émotionnelle qui demandera du temps, et une patience certaine, pour pleinement se révéler. L’autre constante chez le groupe originaire de Stockholm réside dans la linéarité d’une thématique exclusivement mélancolique. Tout le talent et toute la technicité de ses auteurs ne suffisent pas toujours à nous extraire de cette litanie stylistique, qui finit par engourdir un titre comme "Departure Trails".
On appréciera en revanche le contrepoids proposé par la doublette "Warden" ; "The Light Which I Bleed", qui insuffle un élément positif bienvenu, évoluant au gré de la lumière qui se dégage de la voix de Renkse sur le refrain de la première, et dans la légèreté rythmique partagée sur la seconde. Une respiration maîtrisée, presque inattendue, qui vient subtilement alléger l’ensemble sans jamais trahir l’identité du groupe.


Nightmares As Extensions Of The Waking State s’impose ainsi comme un disque d’une rigueur implacable, à la fois monolithique dans son propos et minutieusement façonné dans sa forme.
Katatonia y poursuit son cheminement introspectif, accentuant plus que jamais cette tension entre maîtrise absolue et émotion contenue. Tour à tour, l’album impressionne, approfondit, temporise, mais peut aussi exclure, ne prenant jamais par la main celui qui l’écoute. Il appartient alors à l’auditeur de décider s’il souhaite s’abandonner à cette traversée obscure, exigeante, parfois hermétique, et toujours indéniablement mélancolique. Une œuvre qui refuse le confort, mais ne trahit jamais l’essence du groupe : celle d’une tristesse assumée, qui ne cherche pas à séduire, seulement à être vécue ; même quand le soleil tape trop fort dehors.


 


A écouter : "Thrice" ; "Wind of No Change" ; "The Light Which I Bleed" 

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