Hoelderlin
Hölderlins Traum
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On fait grand cas de la scène expérimentale allemande du début des années 1970, le fameux Krautrock au sein duquel sont rassemblés des groupes assez divers, qu’ils s’inspirent du jazz, de la musique électronique, du psychédélisme ou de la musique concrète. Néanmoins, l’espace musical germanique de la période ne se résume pas à ce courant foisonnant : on trouve, pour ce qui est du monde progressif, de belles formations Heavy-prog’, des groupes symphoniques et tout un microcosme folk dans lequel se meut Hölderlin aux côtés de Parzival et Ougenweide. Après tout, même le Krautrock ne fut pas fermé à la musique folk, en témoigne Amon Düül II dans ses albums parus en 1972 (Carnival in Babylon notamment).
Commençons par prévenir le lecteur curieux qui voudrait risquer une oreille sur Hölderlins Traum : puisqu’il s’agit de folk-rock, la formation met en avant ses racines en utilisant sa propre langue. Il est possible que dans un premier temps, ce soit plus difficile de s’y acclimater que pour l’italien par exemple, mais le jeu en vaut la chandelle et le dépaysement qui nous est ainsi offert ne se refuse pas.
Surtout, il ne faudrait pas s’arrêter aux premiers morceaux qui sont moins pertinents, que ce soit "Peter" un peu trop sautillant, qui transpire le folklore ringard, tandis que la première partie de "Waren Wir" possède des travers kitsch à cause de ses orchestrations envahissantes, mais l’utilisation importante du clavier lui donne une dimension clairement progressive dans un second temps, avec des ambitions légèrement jazzy (notamment l’exécution du solo de flûte et les percussions tropicales).
Tout se révèle avec "Requiem für einen Wicht", fugace et classicisant, laissant une belle place au violon dans ses contorsions, tandis que les promenades pastorales d’"Erwachen" nous guident dans de sentiers médiévaux. On revisite le romantisme allemand, cher au poète Hölderlin, plutôt du côté des amoureux de récits Moyenâgeux et de ruines que du côté des héritiers de la Grèce.
Une douceur féérique s’installe, portée par le chant féminin typiquement folk sur "Wetterbericht" où s’alignent les arpèges et plans de guitare soutenus, ainsi qu’une ambiance brumeuse propre aux forêts légendaires. "Traum" exacerbe cet univers : le jeu de flûte, très andersonien y est saisissant, en écho avec le violon qui domine la seconde partie du titre, tandis que le final où communient la basse et les violons derrière une percussion tribale, pourrait être un écho à Amon Düül II. Ceux qui célèbrent le folk ne sont évidemment pas étrangers à la communauté hippie, ce qui explique l’énergie hindoustani de "Strohhalm" qui tranche avec l’accent germanique.
Dans sa première version, Hölderlin offre une belle image de la scène folk germanique … Le groupe renaîtra plus tard en changeant son orthographe pour Hoelderlin, prenant une nouvelle direction plus typiquement progressive dans la seconde moitié des années 1970.
A écouter : "Traum", "Wetterbericht"