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Critique d'album

Heartless Bastards


A Beautiful Life


(10/09/2021 - Sweet Unknown Records - Blues-Rock, Folk, Americana - Genre : Rock)
Produit par Danny Reisch, Kevin Ratterman, Erika Wennerstrom

1- Revolution / 2- How Low / 3- When I Was Younger / 4- You Never Know / 5- A Beautiful Life / 6- The River / 7- Photograph / 8- Dust / 9- Went Around the World / 10- Doesn't Matter Now / 11- The Thinker
Note de 4/5
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Note de 4.0/5 pour cet album
"Et si, pour sauver le monde, il suffisait de le faire danser ?"
Diego, le 27/09/2021
( mots)

Le monde va mal. Qu'on se le dise. A l'aube d'une hypothétique sortie de pandémie, les constats sur l'état de notre environnement, au sens large, sont alarmants. Le dernier rapport du GIEC (*) ferait passer les scientifiques pour des oiseaux de mauvais augure tout droit sortis d'un film catastrophe des années 1990, si nous n'avions pas tous en notre for intérieur, la conviction intime que c'est une réalité et non une fiction qui nous est présentée. La tension est palpable à tous les niveaux de la société : à peine de retour pour peupler des gradins désespérément vides depuis des mois, les supporters (toutes allégeances confondues, la connerie n'a pas de fanion) rivalisent d'inventivité dans la bêtise dans les stades de foot tous les week-ends. Jusqu'au plus haut sommet des Etats, tous les coups sont permis. Le gentil papy Biden, censé redoré le blason américain après 4 ans de Trump, se permet de faire la une en dégageant d'un revers le France d'un partenariat établi avec l'Australie autour d'une sombre histoire de boîtes de conserves géantes permettant de se déplacer sous l'eau. Pire, d'un point de vu strictement personnel, la dernière acquisition d'un relai 5G par injection (proposé par Moderna, certainement être un nouvel opérateur téléphonique disruptif, merci la start-up nation) n'a que marginalement amélioré la couverture réseau de mon domicile. En somme, l'addition est salée. 


Le monde va mal. C'est le constat établi également par le groupe Heartless Bastards sur sa dernière production, intitulé... A Beautiful Life. Car, pour leur part, Erika Wennerstrom et sa bande ne se contentent pas de dresser des constats alarmistes et défaitistes : ils proposent une vision alternative et des solutions ! La crooneuse, qui a songé à sortir ce projet en solo, est entourée ici de membres des diverses formations indie-rock américaines, de Okkervil River à My Morning Jacket en passant par Midlake, mais également de Jesse Ebaugh, fidèle membre des batards sans coeur depuis la première heure. 


Parmi les propositions des Heartless Bastards sur ce nouvel opus, retenons d'abord l'évolution musicale : d'habitude ancrés dans le blues voire l'americana sur leurs précédents disques, les natifs de l'Ohio proposent ici un rock plus coruscant, aux accents groovy et pop, faisant de A Beautiful Life leur album le plus accessible. Le titre "You Never Know" mêle ainsi une convaincante mise en valeur des qualités vocales de la frontwoman et une atmosphère retro-rock très sixties, désuète mais réussie. De son côté, le discutable "Went Around The World" fait le coup du récit de voyage sur fond musical arabisant. Et l'impact carbone dans tout ça ?


Au rayon des morceaux immédiatement satisfaisant, on compte l'excellent "How Low" qui, sur un rythme presque funky, questionne de la limite des bassesses morales que chacun est prêt à atteindre pour s'élever socialement. La formule "how low will you go, to get to the top"/"jusqu'où t'abaisseras-tu pour monter au sommet" est particulièrement efficace. Un appel à la sobriété en opposition direct au capitalisme sauvage. "The temperature is rising"/"la température monte" lâche même la chanteuse, qui a, a priori, a pris également note du rapport du GIEC. Sur la même base rythmique enlevée, "Doesn't Matter Now" fait également l'éloge du lâcher prise : les objectifs visés valent-ils vraiment la peine que nous mettions le monde (et nous-mêmes) dans tous ces états ?


Le piano saccadé introduisant "When I Was Younger" évoque le souvenir des premiers albums des excellents Walkmen, dont le titre "We've Been Had" constitue une référence du genre, une sorte de bande originale d'une scène de saloon teintée de sépia, parfumée de whisky tiède et de tabac. La suite du morceau fait la part belle aux prouesses de Wennerstrom, dont les envolées sont plus convaincantes que jamais. 


Autre réussite majeure sur A Beautiful Life : l'incorporation d'une bonne dose de psychédélisme sur les très réussis "The River" et "Photograph". Sur le premier, on nous somme à nouveau de nous détendre ("let go to break free, just go with the flow"/"lâche prise pour te libérer, laisse-toi porter par le courant") pour goûter aux plaisirs simples de la vie. La base mélodique emplit le cœur de sitar et révèle les influences Beatles, et plus particulièrement les productions solos d'Harrison. Le violon torturé accompagnant le morceau vers sa conclusion semble, lui, tout droit sorti de chez les Who période Who's Next. "Photograph", quant à lui, fait passer les Heartless Bastards au rang de maître de la rupture de cadence : l'introduction (excellente) blues-rock laisse place à une partie instrumentale flottante démentielle et planante. L'élégance et l'audace de la manœuvre sont tout bonnement remarquables. 


L'ambition ne manque pas non plus sur "Dust", lente ballade bluesy menée dans un premier temps par la voix rauque de Wennerstrom, mise en valeur comme jamais tout au long de l'album, et la guitare solo. Le titre bascule ensuite sur une explosion un peu trop convenue mais parvient à faire mouche sur le message collectiviste cher à Robin Pecknold sur Helplessness Blues : là où le leader de Fleet Foxes se voyait en rouage d'une machine accomplissant un but dépassant les objectifs individuels, la chanteuse des Heartless Bastards confesse son absence de pertinence en dehors d'un ensemble ("I'm just a tiny speck of dust amongst it all"/"Je suis juste un grain de poussière parmi tout cela").


Le blues, racine de la formation un temps protégée de Dan Auerbach, reste justement une force fondamentale du premier titre de l'album : le sémillant "Revolution". Sorti en éclaireur il y a quasiment un an, ce single était déjà très haut dans un classement très personnel des meilleurs morceaux de 2020. 6 minutes 20 de bonheur, de rock, de montée en puissance et de ruptures de rythme maitrisés. Le mantra "The revolution is in your mind"/"La révolution est dans ton esprit" fait état de résumé de l'état d'esprit du groupe sur tout l'album. C'est un des piliers de cette nouvelle production. Chaque vers est un quasi-aphorisme qui prouve toute la qualité d'écriture et la volonté ferme de faire passer un message. Particulièrement interloquant:


 


"Hypnotized by gilded lies to line the pockets of so few


While hungry politicians feed bullshit to the masses


To ensure their statuses and further divide the classes"


/


"Hypnotisés par des mensonges dorés destinés à remplir les poches de si peu de gens


Pendant que des politiciens affamés nourrissent le peuple de leur connerie


Pour assurer leurs statuts et continuer de diviser les classes"


Vous avez dit révolution ?


Le titre éponyme et la dernière piste, "The Thinker", fournissent la bande son habillant l'art work de l'album : des couleurs, un sourire un brin narquois. Le bilan est lourd, difficile à digérer, mais les efforts pour sauver le monde sont nécessaires. "See there's beauty in everything"/"Il y a de la beauté dans tout ce qui nous entoure", "It's a beautiful life"/"La vie est belle". 


Le monde va mal. Mais il est beau. Partout. Alors dansons, célébrons le. Lisons Les Racines du Ciel et tout Jim Harrison. Et réveillons nous. The revolution is in your mind. 


A écouter : "Revolution", "The River", "Photograph", "How Low".


 


(*) Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat

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