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Critique d'album

Geese


3D Country


(23/06/2023 - Partisan - - Genre : Rock)
Produit par James Ford

1- 2122 / 2- 3D Country / 3- Cowboy Nudes / 4- I See Myself / 5- Undoer / 6- Crusades / 7- Gravity Blues / 8- Mysterious Love / 9- Domoto / 10- Tomorrow's Crusades / 11- St. Elmo
Note de 4.5/5
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Note de 3.5/5 pour cet album
"L'insolence de la jeunesse au service de la diversité"
Mathieu, le 16/09/2023
( mots)

En 2020 et à l’aube de leurs 18 printemps, Dominic, Cameron, Max, Gus et Foster, empochent comme tout bons lycéens, leurs diplômes de fin d’étude secondaires. Plus qu’une bonne bande de potes, nos 5 brooklynois passent une bonne partie de leur temps libre à squatter un sous-sol, jammant et façonnant leur projet musical : Geese. Histoire des plus classiques me direz-vous, mais celle-ci se concrétise si prématurément avec un contrat portant le sceau de Partisan, label de renom sur la sphère indé, qu’il serait injuste d’y faire l’impasse.


Ce n’est qu’avec une maigre poignée de singles diffusés sur le net que le bastion d’autres IDLES et Fontaines D.C. tentera son approche, conquit par l’écoute de “Low Era”, qui deviendra quelques mois plus tard la pièce maitresse de leur labyrinthique premier disque. Rejoignant immédiatement le rayonnage intello du post-punk, intercalé entre Squid et Black Midi, Projector a su séduire d’emblée son auditoire de par cette maturité sidérante émanant de jeunots même pas en âge de s’enquiller une pinte à domicile. Dès lors, et après avoir potassé ce brillant coup d’essai, nous attendions avec ferveur l’acte second, impatients de voir évoluer cette vague de succès juvénile.


Qui aurait finalement pu anticiper un tel changement de cap ? Sans faire dans la demi-mesure, nos cinq garçons ont brutalement décidés de garder à distance les riffs informes et les rythmiques capricieuses pour nous embarquer avec fougue et inventivité dans un trip halluciné contant une folle traversée du désert d’un cowboy sous stéroïdes. Les portes tridimensionnelles de ce nouvel univers s’ouvrent avec ardeur, le soleil caniculaire du far west et les couleurs vives d’un indie rock relâché venant immédiatement nous éblouir, laissant s’effacer la forêt obscure de Projector, où chaque sentier tortueux ouvrait la voie à plusieurs autres. Dans la veine des Strokes et bien plus léger dans ses structures et progressions mélodiques, ce second cru n’est en rien dénué d’intérêt, ce côté à la cool s’alliant avec malice au ton tantôt crooner tantôt crieur de Cameroun Winter, toujours aussi bluffant dans son interprétation.


L’entame se fait avec panache sur le foutraque “2122”, sa guitare bluesy bien retro agrémentée d’une mandoline et de percussions africaines qui foutent la pêche. Ce joyeux bazar aux forts accents ‘70s (Led Zeppelin et les Stones en tête), captent instantanément notre attention, assurant la parfaite transition entre le rock bigarré de Projector et les nouvelles envolées country du nouveau venu. Malgré cette amorce sur les chapeaux de roue, c’est finalement une atmosphère bien plus posée qui s’imposera lors du déroulé. Bien que “Undoer” et sa structure fourre-tout jouissive vienne assurer un autre trait d’union entre passé et présent, la bande semble décidée à prendre son temps et consacrer une plus ample importance aux mélodies et arrangements. C'est globalement une première face solide qui s’offre à nous, marquée par le triptyque vitaminé “3D Country”, “Cowboy Nudes”, “I See Myself”, invoquant la chaleur de la soul, des chœurs gospel bien sentis qui collent à la peau, des refrains entêtants et une section rythmique punchy. L’indie-rock n’aura jamais été si palpable que sur les deux balades de l’album, “Gravity Blues” et “Crusades”, invoquant la douceur des cordes et la nostalgie des chœurs. 


La fin de parcours se plait tout de même à brouiller les pistes, instaurant peu à peu une sorte de bazar synthétique. L’esprit de notre explorateur s’embrume, déteignant sur l'instabilité des tempos et des intensités (“Tomorrow’s Crusade” et son final étrangement jubilatoire). Cameron Winter n’en est que plus à l’aise, déstructurant l’harmonie à coup de sauts (et sursauts) d’humeur saisissants, retrouvant par moment ses bon vieux réflexes. “Mysterious Love” en est le parfait exemple, alternant passages hurlés abrasifs et chant de gorge crooné. Les cassures rythmiques et les explosions de guitares sont tout bonnement jouissives, nous faisant presque regretter l’absence de l’un ou l’autre sursaut punk complémentaire. Nous nous consolerons tout de même avec une fin de parcours rondement menée, par la richesse harmonique de “Domoto” et les traits enfantins de “St. Elmo”, venant conclure cette nouvelle galette de façon décalée. 


Vous l’aurez compris, bien qu’évoluant à des lieues des repères tracés à leurs débuts, ce nouvel album vient s’imposer comme une franche réussite. L’effet de surprise dissipé, les émanations indie-country se laissent apprécier à leurs justes valeurs, le troc de Dan Carey, grand gourou post-punk contre James Ford (Arctic Monkeys, Blur, Foals) à l’aise avec un registre bien plus catchy, relevant dès lors d’un malin coup de maitre. Et pour un groupe ayant tout juste la vingtaine, être en mesure de présenter deux albums si différents et, qui plus est, de haute volée, constitue un petit exploit sur les terres du rock indépendant.


Toujours pas rassasiés ? 4D Country, sera présenté à la mi-octobre sous la forme d’un EP bonus, 4 nouveaux titres et une revisite du morceau éponyme dans son sillage. On ne sait pas vous, mais pour nous, le rendez-vous est pris.


 


À écouter : “3D Country”, “Cowboy Nudes”, “Mysterious Love” 

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