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Critique d'album

Louis Durdek


Unnamed Road


(21/06/2024 - - Indie folk - Genre : Rock)
Produit par

1- The Long Way / 2- Unnamed Road / 3- This Horizon / 4- Me & Mrs D. / 5- Holy Waters / 6- Road Of Sorrow / 7- All Of Our Wild Destinations / 8- In My Heart Grows A Tree
Note de 5/5
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Note de 4.0/5 pour cet album
"Même escarpés, les chemins que l’on emprunte mènent toujours à soi-même."
Daniel, le 27/06/2024
( mots)

Musique folk

Le terme anglais folk vient du langage germain Volk qui signifie "le peuple dans son ensemble". Dans cette optique, l’art folk s’inspirerait essentiellement des traditions, coutumes et superstitions des classes (essentiellement incultes).

De tradition généralement orale, la musique folk formerait ainsi une sous-catégorie non académique réservée à une populace qui n’entendrait pas grand-chose à l’expression artistique savante.

A part les sémanticiens, je connais peu de gens que les dictionnaires font rêver…

Louis Durdek est-il folk ?

Rocker reconverti, guitariste (1) et chanteur autodidacte, citoyen français, Breton d’adoption mais "musicien américain" dans l’âme (2), Louis Durdek se définit comme un artiste "indie folk". Si l’on en croit les théories transgénérationnelles, il tiendrait probablement de ses origines plurielles (Espagne et Pologne) son sens aigu du métissage et ses penchants pour le voyage.

Tant qu’à débroussailler le terrain sémantique, le terme "indie folk" est ici beaucoup trop étriqué et desservirait même Unnamed Road. Par sa touchante humanité, cet album prend un caractère universel (3) ; il mérite mieux qu’un enfermement dans une catégorie certainement "sympathique" mais en réalité réductrice.

Voyage(s)

Depuis Ulysse jusqu’à Armstrong (Neil, pas Louis), en passant par Marco Polo, Rasmus Klump, Tintin ou Florence Arthaud, le voyage et le voyageur ont toujours fasciné les "immobiles". C’est que l’être humain est paradoxe : il aime à savoir où sont rangées ses pantoufles mais rêve sans cesse à des ailleurs (4).

Unnamed Road est le carnet de route d’un voyage.

Voyage physique ou voyage intérieur ? Louis Durdek reste énigmatique sur le sujet. Ce qui est certain, c’est qu’il y a eu rupture, départ, itinérance, réflexion et retour. Tous ces événements peuvent aussi bien être concentrés dans un jardin de banlieue que dispersés au hasard des chemins escarpés de grande randonnée qui serpentent dans les Pyrénées.

Tout qui a fait l’expérience de se perdre volontairement (pour se donner une chance de se retrouver, au sens philosophique du terme) comprendra le propos de Louis Durdek. La démarche est rude mais salutaire. Et quand s’impose l’heure de "quitter", tout ce qui est nécessaire à l’homme en partance tient comme par miracle dans son sac à dos.

Le résultat vaut toujours le sacrifice. Sacrifice parce que le chemin qui conduit à soi-même demande du courage. Il provoque des ampoules aux pieds puis des bleus à l’âme et détrempe le paquetage quand la pluie s’en mêle. Mais, et c’est là le paradoxe, les êtres (humains ou autres) que l’on croise lorsque l’on préfère ne voir personne sont toujours inoubliables et les paysages que l’on découvre lorsqu’on cherche une forme de néant sont toujours inouïs.

Au point d’inspirer des chansons. Au risque de raconter des dingueries. Au péril de (re)tomber en amour.

Tout ça se trouve dans les trente-six minutes et quelques de Unnamed Road.

Cathédrale athée

Même s’il s’agit clairement de l’album d’un seul homme, c’est en trio que les titres ont été patiemment maturés durant trois ans avant le passage en studio. Brice Tenailleau (batterie) et Luc-Antoine Duret (contrebasse) sont deux funambules issus du Conservatoire de Jazz nantais.

Cette préparation a créé une telle émulation que les fondations de certains titres de Unnamed Road ont été enregistrées dans les conditions du live. On sait que c’est un procédé casse-gueule et exigeant mais, quand ça fonctionne, c’est-à-dire lorsque la complicité harmonique est parfaite, le son est autrement plus authentique qu’un mixage opéré au départ d’enregistrements séparés.

Comme toute cathédrale sonique, Unnamed Road comporte une clé de voûte, "Holy Waters". Le texte, volontairement cryptique et vaguement halluciné (5), imposait une approche gospel. Et la chanteuse Ivy Fof (6) explose tout dans un duo christique qui transporte l’âme vers une forme d’absolution. Ce sera un des titres de mon année et je n’aurai pour seul regret qu’il ne soit pas deux fois plus long.

Le reste oscille entre très bon et excellent. On pourrait reprocher à la plage conclusive, "In My Heart Grows A Tree" d’être un peu datée (il faut aimer les accents sixties) dans la section centrale de son triptyque. Mais le ton harmonieux de cette coda fait plaisir à entendre, en ce sens que la fin heureuse d’un voyage donne envie de rechausser ses godasses de randonnée pour "y retourner".

Le travail des voix et des instruments est remarquable et subtil de bout en bout. Comme tout choix est un renoncement, j’aimerais plébisciter les titres dans leur ensemble même si mes préférences subjectives vont, outre "Holy Waters" déjà cité, à "The Long Way", à la plage titulaire, à l’exotique "Road Of Sorrow", et au très introspectif "All Of Our Wild Destinations". Mais, en réalité, l’album forme un ensemble extrêmement cohérent et doit s’écouter de bout en bout comme se lit un récit de voyage. Ce serait péché que de le "saucissonner" à la mode Spotify.

L’artwork d’Alice Van de Walle, tout en aquarelles pastelles et en nuances, mérite également une mention d’excellence. Les illustrations du livret – qui accompagnent subtilement le voyage du Breton – proposent un petit supplément de bagage enchanté.

Au bout du chemin, il y a un autre chemin…

Ceux qui habitent au Sud rêveront toujours du Nord (et vice-versa). Par conséquent, un voyage en appelle un autre. Demain ou plus tard.

Et, un jour ou l’autre, Louis Durdek nous reviendra plus que probablement avec un nouveau carnet de voyage.

En mode indie folk ? En mode rock ? En mode pop ? En mode world music ?

Peu importe. Tant que la musique transporte ceux du Nord au Sud et ceux du Sud au Nord. Histoire pour chacun d’échapper à ses tourments du moment…


(1) Louis Durdek a planté sa guitare électrique, ses pédales d’effets et son ampli quand il a compris à quel point une guitare acoustique exprime en musique ce que la vérité toute nue exprime en droit pénal.

(2) Je me montre souvent assez critique avec les artistes qui préfèrent l’anglais à leur langue maternelle mais, en l’occurrence, le résultat (texte et scansion) est assez convaincant.

(3) Unnamed Road flirte plus avec la world music chère à Peter Gabriel qu’avec le récitatif feutré de Léonard Cohen que Louis Durdek considère comme un artiste inspirant.

(4) Ce qui fait la fortune des vendeurs de mobilhomes qui, la plupart du temps, passent leur vie à rouiller, frein à main tiré, dans une entrée de garage.

(5) Louis Durdek se veut athée mais entretient un rapport mystique avec les lacs d’eau froide qui soignent les tourments et aiguisent la pensée. On retrouve ici la conception biblique des fonds baptismaux dans la mesure où le bain permet de "renaître" à l’issue du voyage.

(6) Française et originaire de Côte d’Ivoire, Ivy est à l’origine du projet blues-gospel-soul-pop Sunshine Ivy. A découvrir.

Cette chronique est dédiée à Jodie Devos qui a entrepris inopinément le plus grand des voyages.

Mille mercis aux relecteurs et relectrices de mes textes.

Mille mercis à Xavier Chezleprêtre (www.attitude-net.com) pour sa patience et son amabilité.

Mille mercis à Louis Durdek pour le temps passé à éclairer ma lanterne. 

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