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Critique d'album

Red Pill


Common Sense


(27/11/2024 - - Modern Classic Rock - Genre : Rock)
Produit par Red Pill

Note de 4.5/5
Vous aussi, notez cet album ! (26 votes)
Consultez le barème de la colonne de droite et donnez votre note à cet album
Note de 3.5/5 pour cet album
"J'étais bienveillant et bon ; la misère a fait de moi un rocker... "
Daniel, le 11/02/2025
( mots)

Le rock ne crée pas au départ du vide mais du chaos...

Il existe une légende selon laquelle, dans un endroit reculé du Grand Est de l’Hexagone, au cœur d’une forêt que traverse la Route 66, il existerait un laboratoire maudit où un savant (pilleur de cimetières à ses heures) chercherait à fabriquer des rockers.

Et il se raconte que le guitariste Vince Red (guitares) serait – peut-être – issu des expériences contre nature de Victor Rockenstein.

L’on sait que, dans tous les contes gothiques dignes d’intérêt, le créateur perd le contrôle de sa créature. Victor imaginait un Vince glam-rocker. Mais le six-cordiste s’est affranchi des paillettes et, profitant d’une nuit sans Lune, il s’est échappé. Après avoir erré dans la lande en solo, il a compris qu’il lui fallait réunir un vrai collectif pour que puisse enfin résonner la musique obsédante qui hantait son âme de rocker.

On obtient plus avec un mot gentil et un six-coups (ou une six-cordes)

La petite histoire  du rock l’a cent fois prouvé : ce n’est pas parce que l’on enquille quatre notes perchées sur trois power chords amplifiés que l’on écrit un titre mémorable (1). Il est probable que, dans le cas de Vince Red, Rockenstein ait utilisé plusieurs cerveaux assemblés pour animer sa créature. Parce que Vince compose des hymnes imparables qui, au-delà de provoquer un simple frétillement de tympan chez le petit rocker, s’inscrivent durablement dans ses méninges un peu abruties par la puissance sonore.

Lorsqu’il s’arme d’une six cordes (2) chargée de décibels, Vince maîtrise d’instinct tous les plans du modern-classic-rock couillu que nous aimons tous. Celui qui résonne d’accents contemporains mais qui reste fidèle à des racines implantées dans un terreau historique extrêmement fertile, imprégné de glaise bluesy mais aussi d’humus folk.

Le rocker de goût sait qu’un guitariste qui porte un t-shirt Sandro cultissime (3) en guise de costume du dimanche ne peut être que le défenseur d’une orthodoxie rock au-delà de tous soupçons.

En quête de cordes vocales d’exception pour magnifier ses compositions, Vince Red a croisé la route de Luca Ohmeiss (4). Et il y a eu "fusion".

Après quelques temps passés à jouer au chat et à la souris, les deux hommes ont fini par comprendre que la conjugaison de leurs savoir-faire sentirait bon la dynamite. Et Red Pill a pris son envol.

C’est comme ça que naissent les groupes. Peu importe finalement que l’on invoque la chance, le hasard, le conte de fées, la bonne fortune ou (plus raisonnablement) la synchronicité...

Si tu avales la pilule bleue, l’histoire s’arrête là...

Mais si tu choisis la pilule rouge, tu auras au moins une chance d’apprendre la Vérité. Même si elle peut s’avérer fatale...

Common Sense est un EP (5). Et, dès les premières notes, on devine que Red Pill vaut mille fois mieux que ce format réducteur de quatre titres (6).

Il suffit d’observer l’excellent cliché de la pochette (7) pour comprendre que le quintet n’est pas là pour attendre que l’histoire frappe à sa porte. Et ce n’est pas la bouteille de rhum Kraken (8) qui sert aux gargarismes d’avant concert qui va me contredire.

Red Pill s’inscrit dans un univers très personnel. S’il fallait citer une référence, lointaine mais vaguement pertinente, on pourrait citer Rival Sons. Comme chez les Américains, il y a ici une réelle magie qui opère entre la guitare de Vince Red, la puissante section rythmique et Luca Ohmeiss. La voix lead est régulièrement secondée par les chœurs de son guitariste, ce qui vient renforcer le propos en apportant un harmonieux effet de "surenchère" vocale.

Les premières notes de "Time Is Marching On" s’articulent en une rythmique ensorcelante qui conduit malicieusement à un refrain aux allures chorales d’un hymne rock. Le genre de mélodie en overdrive qui fait bondir la fosse et se lever les gradins...

Affronte ton destin
Ta foi sera ton guide
Accroche-toi à tes rêves
Ne confie à personne le soin
De décider pour toi

Le groupe est plus soudé qu’une escouade de mercenaires aguerris. La réjouissante avalanche de sons saturés qui déboule des enceintes est d’une parfaite lisibilité. Et chaque instrument (basse, batterie, guitares) est excellemment mis en valeur par un enregistrement et un mixage d’une très rare pertinence, ce qui a pour effet de renforcer le sentiment de cohésion.

Au départ d’une intro en subtilités de blues, "Greener Grass" s’épanouit dans un mid tempo réjouissant, à la fois musclé et nuancé. Le titre prend alors de la vitesse pour culminer sur un splendide chorus de guitare où s’expriment pleinement les qualités mélodiques et narratives de Vince Red (9).

Très loin d‘ici
Il y a un endroit
Fait de rêves infinis

La plage titulaire – où il est beaucoup question de revanche sur fond de vérités et de mensonges – explose à son tour dans un magnifique refrain "de stade" et dans un solo mélodieux, aussi mémorable que parfaitement amené. L’accélération finale du tempo invite au headbanging et à la communion rock.

"Unwanted Guest", le plus ambitieux des quatre titres, aborde (crûment mais avec énormément d’humanité) le sujet pesant et douloureux d’une maladie létale. Le pont instrumental est remarquablement construit et instille ce sentiment de menace sourde qu’un patient peut ressentir lorsque le médecin prend cet air grave de croque-mort qu’il estime adapté aux circonstances...

Et si je choisissais de mentir
De te dire que je vais (sur)vivre
Que je ne vais pas partir
Que ce n’est pas un cancer
De la pilule rouge au Pays des Merveilles ?

Je pourrais parier le demi-dollar 1964 collector à l’effigie de JFK qui m’a été légué par mon grand-père paternel que Red Pill nous proposera (bientôt et ici-bas ou plus tard dans un monde parallèle de la Matrice), un vrai, beau et grand album rock. Mais je déteste les jeux d’argent et je tiens trop à cette pièce de monnaie...

Comme nous le savons tous, les chemins du rock sont souvent impénétrables !

Et puis, comme disait l’autre, il y a une sacrée différence entre connaître un chemin et arpenter ce chemin.

Il nous reste à croiser les doigts et espérer que Red Pill choisira la bonne pilule…


(1) Tout à fait au hasard, on pourrait évoquer Vinnie Vincent, Luca Turilli ou Ingwie Malmsteen. C’est qu’il existe une kyrielle de branleurs de manche du dimanche. Et, comme ils ont tous leurs fans irréductibles, je préfère limiter ma liste par mesure de prudence...

(2) Une Flying V qui n’obéit à personne ou une Les Paul qui, malgré son poids, se laisse plus aisément apprivoiser.

(3) Le T-shirt The Doors évoque le célèbre "Miami Incident" du 1er mars 1969 au Dinner Key Auditorium.

(4) Ceux qui ont eu la bonne idée de consacrer une oreille attentive à l’excellent Find A Way (chroniqué ailleurs dans ces pages) de The Bowstrings connaissent – et apprécient – le chant de Luca Ohmeiss.

(5) Égaré entre le single (dont il serait une extension) et l’album (dont il serait une réduction), l’Extended Play (ou EP – à prononcer "iii-piii" pour faire chic) a toujours eu un petit côté "bâtard" qui fait que l’on apprécie sa brièveté quand la musique est moche pour mieux regretter son manque d’ampleur quand les vibrations sont bonnes. Il existe cependant quelques EP qui ont marqué le rock en tant qu’œuvres abouties :  Bowi de Nick Lowe, Live At The Marquee d’Eddie & the Hot Rods, Queen First EP de Queen et évidemment, la version originale de Magical Mystery Tour (1967) de The Beatles qui, au Royaume-Uni, était sorti originellement sous la forme d’une double EP (devenu un des  plus merveilleux collectors rock de l’univers). 


(6) La notion de durée reste relative. Il a suffi des quatre petites minutes du duo "Amour Sacré de la Patrie" (extrait de La Muette de Portici de l’oublié Daniel-François-Esprit Auber) pour précipiter la révolution belge il y a presque deux siècles.  

(7) Fan d’images, je suis ravi de voir qu’un humain puisse encore saisir des clichés aussi remarquables que celui qui illustre Common Sense. Erwan Jonak abuse des sens en jouant sur les symétries et des perspectives classiques qu’il pervertit par un artifice de lumière. La photo se lit classiquement de gauche à droite jusqu’à aller se perdre dans l’étincelle d’un briquet qui apporte un peu de chaleur à un ensemble plutôt "glacé". Ce type est clairement fou. Et je suis jaloux face à tant de pertinence artistique.

(8) 40° et onze épices secrètes... A consommer avec extrême modération (comme dirait Ace Frehley).

(9) J’entends par "musique narrative" une forme d’expression instrumentale qui conte une partie de l’histoire. Il faut comprendre le terme par opposition au solo convenu qui n’est qu’un déroulé de notes académiques supposé meubler un passage non chanté.


 

Commentaires
DanielAR, le 12/02/2025 à 14:30
Merci (ému) pour la lecture et les commentaires. J'ai complété la chronique. L'oubli m'incombe ; je suis d'une nullité abyssale dans le domaine informatique et j'avais effectivement omis d'insérer du texte en bas de page. Pour le reste, mes enthousiasmes sont parfois puérils. J'en ai parfaitement conscience mais c'est un moyen qui me semble efficient pour ne pas vieillir trop rapidement. Je pars du principe que chaque minute d'enthousiasme (réel, évidemment) aide à gagner une minute de vie supplémentaire. Et j'ai la chance, à mon âge des cavernes, d'entendre encore des musiques qui me donnent aussitôt l'envie de monter au créneau. Ca me fait toujours le même effet que la première fois où j'ai entendu un vinyle rock pur jus. Prenez soin de vous et vivez heureux ! Rock On !
Dim, le 11/02/2025 à 22:49
Juste un petit mot, d'abord pour remercier toute l'équipe d'albumrock pour le partage (J'allais horriblement écrire "le travail effectué", alors qu'il ne s'agit que de partage d'une passion...même si ce partage ne se réalise pas sans efforts) et ensuite pour me désespérer de ne pas voir apparaître, dans la chronique ci-dessus, les renvois de bas de page 6 à 9 pourtant notées dans le texte de base. Car je dois avouer, Daniel, être très amateur de vos chroniques et autres articles, avec toutes leurs références, anecdotes et autres digressions, même si je ne partages pas tous vos enthousiasmes. Merci pour les bons moments de lecture et les écoutes qui vont avec