
Band Of Horses
Infinite Arms
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1- Factory / 2- Compliments / 3- Laredo / 4- Blue Beard / 5- On My Way Back Home / 6- Infinite Arms / 7- Dilly / 8- Evening Kitchen / 9- Older / 10- For Annabelle / 11- NW Apt. / 12- Neighbor


Franchement, ce serait mentir que d'affirmer qu'on les avait vu venir,  ceux-là. Car même si la bande à Ben Bridwell s'était retrouvée encensée  par le milieu indie branchouille depuis son apparition en 2006,  l'honnêteté nous fera admettre que ses deux réalisations studio ne nous  avaient pas forcément laissé un souvenir impérissable. Comprenons-nous  bien : les amateurs d'indie trouveront toujours que ce courant musical  est le meilleur qui soit, et que les artistes qui y officient sont les  plus dignes d'intérêt parmi toutes les formations de la grande famille  du rock. Ce qui n'empêche pas de raison garder et de reconnaître que, si  les précédents disques de Band Of Horses se laissaient écouter sans  aucun déplaisir, il leur manquait pourtant le petit quelque chose qui  fait la différence, la petite marque de fabrique infalsifiable qui offre  le sésame pour entrer dans la cour des grands. Or on ne peut  s'empêcher, en se replongeant dans la disco des chevaux, de faire  remonter à la surface des éléments déjà largement employés par d'autres  condisciples, Nada Surf et My Morning Jacket en tête, sans que ces  éléments ne fassent oublier ces illustres prédécesseurs.
Et  voilà-t-y pas que les cinq gus sont allés signer chez une major pour y  faire éclore ce troisième album. "Bouh, les vilains !", a-t-on  pu voir fleurir partout dans la presse spécialisée et parmi les fans,  entités hypocrites qui aiment à médire sans modération sur ce genre  d'attitude jugée "commerciale" tout en faisant mine d'oublier que les  plus grands acteurs du créneau indé ont depuis longtemps tourné le dos à  leur petit label d'origine. Pour Band Of Horses, ça va même encore  plus loin puisque le groupe est accusé d'avoir prostitué son intégrité  musicale afin de toucher le plus de monde possible. Accusation très  grave, vous en conviendrez. Or un simple coup d'oreille à Infinite  Arms a tôt fait de lever le voile d'opprobre qui a été jeté sur la  formation, car ce disque est tout simplement son meilleur album à ce  jour.
Il est le meilleur car il fait rapidement une très forte  impression dans un domaine essentiel : la mélodie. Sans aller jusqu'à  faire oublier les talents de songwriting des plus grands esthètes indés  du moment (Ben Gibbard ou encore James Mercer, pour ne citer que les  plus indispensables), on ne pourra plus nier à Ben Bridwell un réel  talent de sculpteur d'émotions et d'orfèvre de la musique. Si l'entame  réalisée par "Factory" prend le risque d'une entrée douce sans pour  autant parvenir à soulever les coeurs, que dire, en revanche, du  magnifique "Compliments" qui lui fait suite ? Voilà le parfait exemple  de la pop song élégante, enrobée dans des harmonies vocales riches et  emmenée par une flopée de guitares flatteuses ayant oublié une bonne  partie de leur réverb' d'antan, et ce n'est finalement pas plus mal. Si  les précédentes réalisations de Band Of Horses laissaient volontiers  traîner leurs guêtres du côté de chez Nada Surf, c'est désormais à Death  Cab For Cutie et à sa finesse que l'on pense immanquablement à l'écoute  d'Infinite Arms, impression renforcée par la grande force de  morceaux comme "Dilly" ou encore "Laredo" qui laissent la diction douce  de Bridwell surfer sur de jolis airs pop dans la plus grande tradition  américaine. L'album se révèle bien plus calme que ses deux  prédécesseurs, avec en point d'orgue le magnifique et très Burtonien "Evening  Kitchen" et ses vagues de chœurs contemplatifs, ou encore le délicat "Infinite  Arms" qui effectue la transition idéale avec Cease To Begin par  sa six cordes pleines d'échos sereins. Ce troisième jet studio est  également plus immédiat que les deux autres, mais l'intérêt ne faiblit  pourtant pas avec le temps malgré quelques morceaux un peu mous du genou  ("Blue Beard", "On My Way Back Home"). On a même droit au très enlevé "NW  Apt." en fin de liste, titre costaud qui laisse éclater des guitares  presque shoegaze sur les harmonies cristallines du chant. Du tout bon,  en somme.
Band Of Horses réussit donc une entrée remarquée dans  la cour des grands avec cet hécatonchire parfaitement ciselé qui devrait  permettre au groupe de se tailler un beau succès auprès des amateurs de  rock soft et de belles mélodies. Et tant pis pour les râleurs qui  n'apprécieront pas le (léger) changement de registre qui a vu alléger le  poids des arrangements instrumentaux antérieurs : Ben Bridwell semble  définitivement plus à son aise dans l'épure et le dépouillement, état  d'esprit qui convient comme un gant à l'orchestre de chevaux et qui ne  présage que du bon pour l'avenir. La prochaine fois, promis, on les  guettera avec avidité.
























